La CCDP : une alliée en quête de justice

Notes d’allocution

Marie-Claude Landry

Présidente
Commission canadienne des droits de la personne 

Présentation au
Congrès de l’Association du Barreau autochtone 

Le 15 octobre 2016 

Vancouver, Colombie-Britannique

 

Bonjour tout le monde ! 

Je crois au respect. 
Je crois aux rapprochements. 
Je crois aux liens de confiance. 
Je crois aux droits de la personne pour tous. 

C’est le chemin du coeur qui m’amène à  être parmi vous. 

C’est un honneur pour moi d’être ici, sur le territoire traditionnel des Nations de Musqueam et Tsawwassen

Je me sens très privilégiée d’avoir l’occasion de participer à  cette discussion. 

Je dois vous avouer que je me suis sentie très inspire par les idées et les perspectives que plusieurs d’entre vous avez partagées au cours des deux derniers jours. 

Je crois que ces conversations sont plus importantes que jamais auparavant. 

Nous avons l’occasion d’influencer des changements profonds et durables qui amélioreront la vie des peuples autochtones au pays. 

Après de nombreuses décennies de luttes silencieuses, les Canadiens commencent enfin à  voir la vérité au sujet de notre passé honteux. 

Le grand public commence enfin à  comprendre la réalité quotidienne des peuples autochtones. 

La Commission de vérité et de réconciliation a créé une grande sensibilisation du public. Elle a permis à  plusieurs de confronter leurs attitudes racistes, qui se perpétuent encore au pays. 

Mais avec cette plus sensibilisation plus répandue, les enjeux autochtones ont avancé dans le cadre des discussions nationales.  

Jamais auparavant avons nous constaté un plus grand désir de changements, tant de nos leaders que des citoyens. 
 
Notre Procureure générale du Canada est une femme autochtone, une première dans notre histoire. 

Les enjeux autochtones qui ont si longtemps été ignorés, sont désormais des priorités pour le gouvernement : l’éducation, la violence faite aux filles et aux femmes, l’eau potable, le logement. 

Le Tribunal canadien des droits de la personne a affirmé le droit des enfants autochtones quand il a déterminé que le financement du Programme des services de soutien à  l’enfance et à  la famille des Premières Nations était discriminatoire. La Commission avait d’ailleurs consacré d’importantes ressources à  défendre cette cause. 

Par ailleurs, le Gouvernement a récemment annoncé qu’il s’apprêtait à  entériner l’adoption de la Déclaration des Nations-Unies sur les droits des peuples autochtones. 

Toutefois, seule la conjoncture n’est pas suffisante. S’il nous faut avancer la justice sociale et légale des peuples autochtones au Canada, nous devons engendrer des gestes non seulement du gouvernement mais aussi des citoyens. 

Comme l’a si bien dit le chef national Perry Bellegarde, chaque personne au Canada devra « faire de la place » pour les Autochtones canadiens en « ouvrant son coeur et son esprit ». 

Et comme l’a mentionné Dr Robert Joseph, que j’ai rencontré un peu plus tôt cette semaine : L’amour est au coeur de la réconciliation. 

Au cours des dernières années, la Commission a voyagé d’un bout à  l’autre du Canada pour entendre ce que les femmes autochtones avaient à  dire au sujet des obstacles qu’elles ont dû franchir pour faire valoir leurs droits. 

D’abord, nous avons entendu leurs expériences face à  la violence, à  la discrimination enracinée, au manqué de services, à  l’injustice, à  la peur des représailles et au besoin d’une réconciliation. 

Apprendre ce qui doit être réparé et rétabli n’est qu’un premier pas. 

La sensibilisation en soi n’est pas suffisante pour provoquer les changements que nous devons voir. 

Pensez-y : une étude réalisée par Environics et publiée en juin dernier a démontré que 84 % des Canadiens sont conscients que chaque individu doit jouer un rôle en vue de la Réconciliation.

La même étude démontre que seulement 15 % des Canadiens peuvent citer un des appels à  l’action du rapport de la CVR. 

Je crois toutefois que la plupart des Canadiens sont des gens sensibles et empathiques. 

Des gens capables et compétents. 

Si nous sommes tous conscients des changements qui sont requis, pourquoi ne sont-ils pas encore réalisés ? 

Comment pouvons-nous motiver les gens à  passer de la sensibilisation à  l’action ? 

Cela me rappelle les propos de David Matas, cet ardent défenseur des droits de l’homme à  l’échelle internationale. Il a identifié quatre ennemis dans la lutte pour le respect des droits de la personne

Ils sont l’indifférence, l’absolutisme, l’hypocrisie et le sentiment d’impuissance. 

Matas fait référence à  l’idée que la discrimination réservée aux autres ne motive pas suffisamment à  agir

Ou encore que la difficulté semble insurmontable. Les gens préfèrent se résigner par sentiment d’impuissance. 

Personne ne peut nier que les enjeux des peuples autochtones du Canada figurent parmi les problèmes les plus urgents en matière de droits de la personne au Canada. 

Nous devons réaliser et comprendre que notre passé collectif et nos relations avec les peuples autochtones ne reflètent pas l’identité que nous pensons ou désirons projeter. 

Nous devons d’abord nous livrer à  une introspection pour mieux comprendre et apprendre. 

Nous avons le devoir de transmettre ce message aux autres et d’agir sur ce que nous avons appris. Voilà la première étape vers une réconciliation d’abord avec notre véritable identité et avec les populations autochtones. 
Il existe toujours un besoin insistant pour une meilleure compréhension et une plus grande empathie à  l’égard de l’histoire, de l’héritage et des dommages causés à  plusieurs générations par la colonisation et le racisme systémique.  

Il est important de faire connaître au public comment des barrières à  l’égalité ont été imposées à  plusieurs générations de Premières Nations, de Métis et d’Inuit. 

Et nous devons éduquer nos enfants de façon à  ce que ces attitudes racistes du passé demeurent du passé, de notre histoire. 

Mais pour profiter de la conjoncture, je crois que nous devons aussi concentrer nos efforts à  trouver des pistes de solution

Quelles seront les prochaines étapes ? 

Je crois qu’il est grand temps de nous attarder à  comment les choses devraient être, sur les prochaines étapes et sur les actions concrètes qui peuvent être mises en oeuvre dès maintenant. 

Ce type de changement exige qu’on fasse entendre des centaines et des milliers de voix. 

Il faudra aussi un effort concerté et soutenu pour discuter des besoins et d’une solution pour corriger les manques du passé. 

Et il faudra de la patience et de la persévérance. 

À titre d’institution nationale pour les droits de la personne, une large part de notre travail consiste à  sensibiliser le public à  changer leur façon de penser. 

C’est une responsabilité que nous partageons avec plusieurs organisations. 

C’est d’ailleurs pourquoi nous créons des partenariat avec nos intervenants et avec les commissions provinciales et territoriales. 

C’est pourquoi nous nous tournons vers vous, de l’Association du Barreau autochtone. 

Vous êtes des avocats, des leaders de vos communautés unis pour promouvoir l’avancement de la justice, tant au niveau juridique que social. Vous avez un rôle extrêmement important à  jouer pour les peuples autochtones du Canada. 

On ne pourrait trouver un meilleur groupe à  assembler pour aborder cette discussion. 

Ainsi, en terminant, je demande à  chacun d’entre vous : 

Comment pouvons-nous saisir cette occasion pour faire changer les choses?

Comment pouvons-nous alimenter cette conjoncture favorable ? 

Comment trouver des solutions à  tant de problèmes complexes ? 

Comment pouvons-nous rallier l’appui des Canadiens à  l’égard de ces solutions ? 

Comment nous assurer que le gouvernement tienne ses promesses ?

Pendant que nous réfléchissons, il me faut vous réitérer que la Commission canadienne des droits de la personne est véritablement avec vous. 

J’anticipe nos discussions avec beaucoup d’enthousiasme et j’espère que je pourrai accroître notre collaboration avec chacun d’entre vous.

Ensemble, nous pourrons accomplir tellement plus. 

Merci, Thank you, Meegwetch.

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