Lettre de succession

 

À la prochaine personne qui occupera le poste de président de la Commission canadienne des droits de la personne,

Je vous écris pour vous parler de l'organisation que j'ai eu le privilège de diriger depuis presque huit ans. Occuper le rôle de présidente et première dirigeante fut, pour moi, le plus grand honneur de ma vie. J'aimerais vous donner une idée du contexte actuel de la remarquable organisation que vous êtes sur le point de diriger.

Comme vous le savez, quarante-cinq ans se sont déjà écoulés depuis l'adoption de la Loi canadienne sur les droits de la personne et l'ouverture de la Commission canadienne des droits de la personne. Tout au long de son histoire, la Commission s'est appuyée sur l'objet de la Loi : « […] en donnant effet... au principe suivant : le droit de tous les individus, dans la mesure compatible avec leurs devoirs et obligations au sein de la société, à l'égalité des chances d'épanouissement et à la prise de mesures visant à la satisfaction de leurs besoins, […]. »

Ces mots sont tout autant pertinents aujourd'hui qu'ils ne l'étaient à l'époque où les parlementaires ont pris la plume pour rédiger cette loi. Cependant, notre monde est bien différent de ce qu'il était. Au fil de décennies marquées par des changements constants, ce sont les principes d'égalité, de dignité et de respect qui ont inspiré et orienté les progrès que nous avons réalisés.

Il semble qu'année après année, l'importance des changements et la vitesse à laquelle ils se produisent s'accentuent. Durant la période où j'ai occupé le poste de présidente et première dirigeante, j'ai été témoin d'avancées incroyables en matière de droits de la personne au Canada. Les questions de justice sociale font maintenant partie des conversations de tous les jours. Des mouvements populaires ont galvanisé les voix fortes et puissantes qui s'élèvent pour dénoncer de multiples enjeux comme la haine, l'intolérance, le racisme, les inégalités entre les sexes, le harcèlement fondé sur le genre et bien d'autres encore. Les efforts considérables que nous avons déployés et ceux des intervenants et des champions des droits de la personne ont entraîné une vague d'avancées en matière de droits de la personne qui ont permis une progression des droits des personnes trans et non binaires, à ceux des personnes handicapées; de la protection des droits des personnes autochtones, jusqu'à l'entrée en vigueur de nouvelles lois visant à protéger le profil génétique, en passant par la promotion de l'accessibilité et de l'importance de verser à chaque personne un salaire égal pour un travail de valeur égale.

Pourtant, au moment d'écrire cette lettre, le Canada continue de faire face à une crise. D'une part, nous sommes encore aux prises avec les répercussions d'une pandémie mondiale, qui est, en définitive, une crise économique et sociale et une crise des droits de la personne qui continuent d'aggraver les difficultés vécues par beaucoup de personnes au Canada qui se trouvaient déjà en situation de vulnérabilité bien avant que la COVID-19 ne plane sur le monde.

D'autre part, cette situation contribue à accroître le sentiment collectif de fatigue pandémique, de lassitude et une perte croissante de confiance envers les institutions publiques qui alimentent les divisions, la rhétorique, les agressions vitrioliques, et les discours haineux dans nos espaces publics et dans le cyberespace.

Alors que les médias sociaux nous offrent de précieuses plateformes pour partager nos opinions, la colère en ligne a encouragé et popularisé ceux qui utilisent l'ignorance, la désinformation et la complaisance pour servir leurs agendas personnels ou attirer l'attention, souvent en attisant la colère et la division. De récents mouvements de protestation et d'appels à l'occupation ont donné de l'assurance à d'autres personnes et donnent une légitimité à l'intolérance. La fréquence des incidents xénophobes, racistes et haineux est très préoccupante.

Aujourd'hui, plus que jamais, les principes d'égalité, de dignité et de respect sont essentiels pour réconcilier notre passé honteux et trouver notre chemin vers l'avenir - qu'il s'agisse de se remettre de cette pandémie ou de faire face au racisme systémique.

Il est clair que la Commission a un rôle important à jouer et doit diriger par l'exemple.

Aujourd'hui, le gouvernement, les intervenants et la communauté internationale des droits de l'homme considèrent la Commission comme une institution nationale des droits de la personne indépendante, pertinente, crédible et digne de confiance. Nous sommes des leaders d'opinion, nous sommes une voix nationale audacieuse et directe, et nous sommes attentifs aux questions émergentes qui se présentent.

La Commission peut s'appuyer sur des connaissances, une expertise et une réputation solides pour influencer les législateurs et la population et faire en sorte qu'ils soient bien informés, pour défendre l'intérêt public devant les tribunaux ou pour encourager et obliger les employeurs et les fournisseurs de service à repérer et à éliminer les obstacles à l'égalité. Plus important encore, elle a su gagner la confiance des titulaires de droits et de ceux qui recherchent l'égalité au Canada.

Il n'en a pas toujours été ainsi. Au cours de la dernière décennie, la Commission a procédé à des changements délibérés et stratégiques dans sa façon de travailler et de communiquer son travail afin de gagner cette confiance.

Nous avons entrepris de devenir l'institution nationale des droits de la personne à la hauteur des attentes des Canadiennes et les Canadiens : une institution dans laquelle ils se reconnaissent grâce au travail que nous faisons, aux enjeux que nous faisons progresser et qui est capable de s'adapter et de suivre le rythme de notre société qui évolue rapidement.

Ce travail continu a été guidé à la fois par les réponses franches que nous avons sollicitées et reçues, ces dernières années, d'un large échantillon diversifié d'intervenants et de titulaires des droits, et étant toujours engagés à rester une force proactive dans le domaine des droits de la personne au Canada.

Pour accomplir ce travail, nous nous sommes appuyés sur plusieurs principes comme notre détermination à affirmer et à protéger notre indépendance. Un autre important principe que nous avons suivi a été de toujours viser à « placer la personne avant tout ». Il a été le principe directeur que nous avons suivi pour réaliser notre transformation, que ce soit en consultant les intervenants situés partout au pays, ou en changeant notre façon de servir les personnes, de partout au Canada, qui s'adressent à nous pour avoir accès à la justice.

Nos activités de sensibilisation, de mobilisation des intervenants, et notre participation à toute une gamme de conversations nationales portant sur les droits de la personne ont permis à la Commission de gagner la confiance du public qui s'exprime également par la confiance de nombreux intervenants et parlementaires.

Nous avons aussi travaillé sans relâche pour mettre en place un réseau d'intervenants en matière de droits de la personne qui est représentatif de tous les groupes sous-représentés. Afin de développer des relations de confiance avec les personnes composants ces groupes, vivant d'un océan à l'autre, nous avons dû d'abord les écouter et apprendre, avant d'agir. Je continue de leur demander ce que je peux faire mieux, en tant que présidente, pour que la Commission corresponde davantage à leurs besoins.

Nous sommes à l'écoute, nous continuons d'apprendre et d'agir concrètement pour que la Commission corresponde à ce que les personnes s'attendent de l'institution nationale des droits de la personne, et qu'elle réponde à leurs besoins. Nous nous sommes appliqués à respecter cet engagement dans notre travail à l'extérieur de l'organisation comme à l'intérieur de notre organisation à titre d'employeur, de fournisseur de service et de défenseur des droits. Cet engagement se remarque tant dans notre travail pour apporter un changement organisationnel antiraciste que dans celui en faveur de l'accessibilité.

Nous avons transformé la Commission pour la rendre plus accessible, pertinente et fiable pour toutes les personnes qui comptent sur nous pour défendre leurs droits fondamentaux. Elles qui comptent sur nous pour que « placer la personne avant tout » soit plus qu'un principe que ce soit une réalité.

Forte de ces réalisations, la Commission s'est vue confier de nouveaux mandats et de nouvelles responsabilités sur des questions clés comme l'équité salariale, l'accessibilité, le droit au logement, et s'est vue désigner le titre de Mécanisme national de surveillance. Il est possible que d'autres responsabilités relatives à l'approche du Canada pour contrer la haine en ligne nous soient également bientôt confiées.

Je crois que la Commission canadienne des droits de la personne se trouve à un moment décisif. La Commission est en pleine croissance et son statut s'élargit au-delà de celui qu'elle avait en tant que petite organisation responsable de deux principaux mandats. Elle devient maintenant une organisation de taille moyenne responsable de multiples mandats et se rapportant à plusieurs ministres. L'un des principaux défis posés par cette croissance est de faire en sorte que la Commission demeure une organisation unie qui accorde la priorité à la santé et au bien-être de son personnel, tout en travaillant afin de répondre aux responsabilités et aux priorités qui lui ont été confiées par le Parlement qui lui fait confiance.

Ces nouvelles responsabilités ont profondément transformé notre organisation et présentent de nouvelles opportunités et de nouveaux défis. Il existe maintenant diverses tensions — même si elles sont productives — entre nos différents rôles à titre d'organisme de défense des droits de la personne, d'expert en politiques, plaideur en matière de droits de la personne pour l'intérêt public, et de fournisseur de services relatifs aux droits de la personne qui est le premier point de contact pour les personnes ayant vécu de la discrimination.

Parallèlement, chaque jour présente de nouveaux défis. La situation des droits de la personne se transforme rapidement. Les avancées technologiques fulgurantes et les changements climatiques ont des répercussions sur les droits de la personne qui étaient inimaginables il y a à peine dix ans. Je vous invite à parcourir les trois articles de fond qui se trouvent au début du Rapport annuel 2021 de la Commission canadienne des droits de la personne.

À mesure que la Commission poursuit sa croissance et continue de prendre de nouvelles responsabilités et de faire face à de nouveaux défis, qu'il sera essentiel pour l'organisation de continuer à donner la priorité à la sensibilisation et à l'engagement, à des activités de revendication courageuses et à des efforts délibérés pour faire partie de la conversation nationale en matière de droits de la personne. Ces activités sont la base de la crédibilité et la pertinence de l'organisation et ce sont elles qui nous permettent de gagner et de maintenir la confiance du public. La Commission ne peut pas se permettre d'être silencieuse, elle doit continuer de parler haut et fort dans l'intérêt public sur les enjeux actuels et émergents. Cependant, plus les personnes qui connaissent la Commission sont nombreuses, plus nos services sont en demande.

Je tenais à vous écrire cette lettre comme il est important pour moi de vous présenter le contexte de l'organisation et vous donner de l'information sur le cheminement important et les efforts soutenus de tout un chacun qui l'a mené jusqu'ici. Je suivrai avec grand intérêt le cheminement de la Commission.

Vous prendrez la direction d'une organisation exceptionnelle composée de personnes exceptionnelles. Vous aurez le soutien de toute une équipe de personnes engagées, dévouées et bienveillantes. Leurs connaissances, leur expertise, leur créativité et leur passion n'ont jamais cessé de m'inspirer. Avec cette équipe à vos côtés, en suivant la vision que vous donnerez à la Commission, je suis confiante que vous vous aurez une influence positive et forte sur les droits de la personne au Canada.

Cordialement,

Marie-Claude Landry, Ad. E.

 

 

Historique

Les changements surviennent à une vitesse qui a considérablement augmenté au cours des dix dernières années.

Qu'il s'agisse de faire en sorte que les Autochtones au Canada soient pleinement protégées par la Loi canadienne sur les droits de la personne, ou d'assumer nos nouveaux mandats en matière d'équité salariale, de logement ou d'accessibilité, ou encore d'ajouter de nouveaux motifs à la liste des motifs de discrimination prévus par la loi, notre rôle s'est élargi davantage au cours des dix dernières années qu'au cours des 34 années depuis sa fondation.

L'un des changements fondamentaux apportés est dans la façon dont à la Commission, nous engageons avec le public. À partir de 2015, lorsque j'ai commencé mon mandat de commissaire en cheffe, j'ai initié une série de consultations avec les intervenants diversifiés et avec des perspectives différentes, et ce à l'échelle du pays. Ces consultations ont inspiré des changements fondamentaux dans notre façon de travailler.

Peu de temps après ma nomination, j'ai entrepris de voyager à travers le pays à la rencontre d'une multitude d'intervenants, notamment des représentants d'organisations et des personnes qui luttent pour les droits de la personne au Canada. Parmi les personnes rencontrées, notons la présence de ministres, d'agents du Parlement, d'universitaires, de représentants d'organisations non gouvernementales, de représentants de divers Barreaux, de dirigeants de Premières Nations, de membres de groupes de défense des droits de la personne, d'employeurs, de personnes travaillant dans les Commissions de droits de la personne territoriales et provinciales, et de personnes provenant de nombreuses organisations communautaires qui travaillent étroitement avec les titulaires des droits et les personnes en situation de vulnérabilité.

Au cours de ces premières consultations de 2015, les intervenants nous ont parlé avec candeur et franchise. Ils nous ont clairement fait comprendre qu'ils sentaient que la Commission les avait laissés tomber et que nous avions beaucoup de travail à faire si nous voulions devenir une voix nationale crédible des droits de la personne au Canada. Les trois thèmes prioritaires qui se sont alors imposés et qui ont largement contribué à orienter notre façon d'aborder l'élaboration de nos plans pour l'avenir et de revoir nos priorités et nos processus sont les suivants :

  • Démontrer que nous étions vraiment indépendants du gouvernement.
  • Se prononcer et se faire entendre davantage à titre d'institution nationale des droits de la personne sur tous les enjeux en matière de droits de la personne au Canada.
  • Faire en sorte que les personnes en situation de vulnérabilité aient le même accès à la justice que tout le monde.

À ce jour, nous continuons de tenir des rencontres avec le réseau des intervenants sur une base régulière.

Affirmer notre indépendance

L'un des défis de communication les plus importants auxquels la Commission est confrontée est depuis longtemps la perception que nous faisons partie gouvernemental fédéral.

La Commission canadienne des droits de la personne travaille pour la population canadienne et indépendamment du gouvernement. Elle contribue à ce que chaque personne au Canada soit traitée équitablement, peu importe son identité. Elle est responsable de représenter l'intérêt public et de demander au gouvernement du Canada de rendre compte quant aux enjeux de droits de la personne. Il est crucial que la Commission soit indépendante et perçue comme telle.

Il est essentiel que cette réalité soit comprise par toute personne au Canada, et tout particulièrement par les personnes en situation de vulnérabilité notamment considérant que moitié des plaintes que nous recevons visent le gouvernement fédéral. La confiance est fondamentale pour un système efficace et crédible.

Trouver notre voix

Conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Commission a le pouvoir de faire des recherches, de sensibiliser et de s'exprimer sur toutes questions liées aux droits de la personne au Canada.

Bien que la Commission ne se soit pas prononcée régulièrement sur des enjeux de droits de la personne au cours des premières décennies de son histoire, en 2015, nous avons décidé de suivre une nouvelle approche dynamique pour informer le public canadien sur ses droits de la personne et ceux des autres. En nous inspirant des communications de marketing, nous avons élaboré de nouveaux processus et produits pour atteindre davantage de Canadiens et Canadiennes dans un esprit de transparence et de responsabilité.

Nous sommes maintenant parties de la conversation nationale en matière de droits de la personne au Canada. Nous nous nous exprimons avec audace sur des questions pour lesquelles les Canadiens et Canadiennes s'attendent à ce que leur champion des droits de la personne ait une opinion d'expert. En une petite décennie, la vitesse à laquelle se déroulent les communications — tant dans le cycle de l'actualité que dans les médias sociaux — s'est accélérée de façon spectaculaire. Lorsqu'une nouvelle question émerge, nous ne pouvons pas être lents à réagir. Désormais, lorsqu'une question ou un événement relatifs aux droits de la personne gagne soudainement en intérêt ou en notoriété dans le forum public, nous sommes là pour réagir, pour fournir des conseils et des perspectives au moyen de déclarations et de positions de principe. Nous nous engageons à faire en sorte que la lentille des droits de la personne soit appliquée à ces questions et événements au fur et à mesure qu'ils se déroulent, et surtout lorsqu'ils sont discutés dans les cercles politiques et médiatiques.

En tant qu'institution nationale des droits de la personne au Canada, la Commission exerce un leadership en contribuant à l'orientation du programme des droits de la personne au Canada. Nous avons mis en place des mesures proactives de communication et de sensibilisation afin de raconter des histoires vécues ce qui permettant ainsi, une prise de conscience et donnant au gouvernement et à la société civile les moyens de tisser des liens, toujours dans l'intérêt du public.

Faciliter l'accès à la justice

Ces dernières années, les Canadiennes et les Canadiens nous ont indiqué que le processus de plainte de la Commission comprenait de sérieux obstacles bloquant l'accès à la justice en matière de droits de la personne. La pauvreté, un faible niveau d'alphabétisation ou un accès limité à la technologie menaient à certains de ces obstacles. D'autres, nous a-t-on confié, étaient causés par notre système qui était trop coûteux, trop complexe et trop juridique. Considérant que, chaque année, de plus en plus de gens se tournent vers la Commission afin d'obtenir de l'aide et que le nombre de plaintes à traiter augmente considérablement, nous avons dû redessiner notre système des droits de la personne pour qu'il soit plus simple, plus efficace et mieux adapté aux besoins des personnes que nous servons.

Ce qui est le plus important pour nous, c'est que chaque personne au Canada puisse se reconnaître dans notre système visant à protéger les droits de la personne, afin qu'elle sache et ait confiance qu'elle peut y participer de manière significative et l'utiliser pour trouver un résultat significatif.

Nous nous sommes mis au travail, et nous avons modernisé nos façons de faire et mis en place un certain nombre d'initiatives telles qu'une plateforme de plainte en ligne qui utilise un langage accessible et simple. Ce changement signifie que, quel que soit votre lieu de résidence, déposer une plainte demande le même effort et le même temps. Les démarches qui prenaient autrefois des semaines ou des mois ne prennent plus que quelques minutes. Cette plateforme en ligne permet de répondre à plusieurs questions, à fournir de l'information et du support à ceux et celles qui peux utiliser la technologie et permet ainsi de libérer des ressources pour soutenir ceux et celles qui ont besoin d'aide.

Nous avons aussi mis en place un processus de triage des plaintes afin de prioriser les cas allégués de discrimination continue, les cas graves et les cas où le plaignant se trouve en situation de vulnérabilité. Cette méthode nous permet de répondre d'abord aux cas les plus urgents en utilisant les ressources limitées dont nous disposons pour répondre aux très nombreuses plaintes que la Commission reçoit. Tous les dossiers sont importants, mais tous ne sont pas urgents! Les situations pouvant changer, la situation urgence ou non est réévaluée par l'équipe des plaintes.

En 2021, la Commission changée son approche de l'examen préalable et le renvoi des plaintes vers d'autres instances. Autrement dit, nous avons changé les questions que nous posons et le moment de les poser dans le processus. Il s'agit d'un aspect important puisque, dorénavant, lorsqu'il est clair qu'une plainte doit être envoyée devant les tribunaux en raison des faits qui y sont présentés ou des enjeux juridiques qu'elle soulève, la Commission travaille pour qu'elle soit adressée au Tribunal des droits de la personne le plus tôt possible.

Fondamentalement, le processus de plainte modernisé permet aux plaignants et aux mis en cause de faire avancer leur dossier plus rapidement, et permet au nombre limité d'analystes et d'agents des droits de la personne de la Commission de concentrer leur attention sur les participants les plus vulnérables qui ont besoin de notre aide à chaque étape du processus.

Nous devons bon nombre des améliorations que nous avons mises en œuvre cette année aux précieux commentaires que nous avons recueillis auprès de divers d'intervenants, notamment des groupes de personnes handicapées ainsi que ceux représentant les personnes racisées du Canada. Ils nous ont fait part de la façon dont la Commission pouvait améliorer l'examen des plaintes pour racisme. Au cours de l'année 2021, nous avons intégré leurs commentaires significatifs à nos outils de sélection des plaintes.

Cela a permis de moderniser l'ensemble du processus. Un élément clé de tout cela a été de faire en sorte que tout changement apporté à nos processus et toute formation dispensée à notre personnel chargé des plaintes soient guidés par une approche tenant compte des traumatismes. À titre d'exemple, nous évitons aux plaignants de devoir raconter plusieurs fois leur histoire difficile.

Nous avons aussi uniformisé les règles pour les plaignants en veillant à ce que les deux parties concernées par une plainte communiquent tous les renseignements qu'elles possèdent, dès le début du processus. Aucune surprise. Une complète transparence dès le départ.

Nous atteignons cet objectif au moyen d'une série de nouveaux formulaires en ligne qui sont continuellement mis à jour en fonction de la rétroaction des utilisatrices et utilisateurs. Ces formulaires posent les questions clés en début de processus de sorte que les parties à la plainte puissent rapidement obtenir une médiation ou une audience au Tribunal canadien des droits de la personne. Disposant des renseignements nécessaires et sachant que seulement le Tribunal peut déterminer s'il y a ou non-discrimination, nous pouvons lui renvoyer des plaintes plus rapidement.

Nous sommes plus exigeants lorsqu'il s'agit de rejeter une plainte et nous soumettons cette décision à un examen plus minutieux. Autrement dit, si une plainte ne semble pas fondée, nous nous faisons tout ce qui est possible afin de nous assurer que rien ne nous a échappé.

La modernisation de notre processus de traitement des plaintes est toujours en cours. À l'image du monde dans lequel évoluent les personnes que nous servons, nos processus doivent évoluer aussi si nous voulons demeurer pertinents. Notre objectif ultime est de mettre en place un processus qui répond aux besoins de la population canadienne.

S'adapter à la société en perpétuelle transformation

Transformer la Commission canadienne des droits de la personne pour qu'elle écoute, travaille et plaide autrement s'est avéré nécessaire afin que nous restions pertinents, et continuions d'exercer une influence, alors que bien des aspects de la société se sont transformés rapidement au cours des 10 dernières années.

Mettre l'emphase sur la lutte contre la haine en ligne

Lorsque la Loi canadienne sur les droits de la personne a été adoptée en 1977, l'un de ses objectifs visait à mettre fin aux discours haineux. Plus précisément, l'article 13 de la loi interdisait l'utilisation de moyen de communication relevant de la compétence fédérale « pour aborder ou faire aborder des questions susceptibles d'exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable. » À l'origine, cet article s'appliquait aux communications téléphoniques. En 2002, sa portée a été élargie pour inclure les communications par Internet.

L'article 13 a été abrogé en 2014. Depuis cette date, des appels ont été lancés pour demander que cet article soit remplacé par de nouvelles dispositions dans la loi. Parmi ceux qui plaident en faveur de la prise de mesures concrètes, on trouve la Commission canadienne des droits de la personne.

En 2019, j'ai fait une présentation au Comité permanent de la justice et des droits de la personne pour l'étude sur la haine en ligne. Elle contenait les déclarations suivantes :

“The internet has given everyone the power to be a broadcaster. People can be louder than ever before and influence more people than ever before. While this has had many positive benefits, it has also amplified hate speech.

« Internet a donné à chacun le pouvoir d'avoir sa tribune et d'être un diffuseur. Plus que jamais, les gens peuvent se faire entendre et influencer. À bien des égards, il s'agit d'un progrès formidable. Internet a toutefois permis d'amplifier et de propager les discours haineux.

Trop souvent, les personnes sont victimes de haine en ligne en raison de leur race, de leur religion, de leur genre, de leur orientation sexuelle ou de leur origine. Il a été démontré que la haine en ligne peut causer de la peur et de graves conséquences psychologiques. Elle réduit au silence et encourage les conflits, la division et les tensions sociales.

Le discours haineux – et plus particulièrement le phénomène de la haine en ligne – est non seulement une question urgente de sécurité publique pour le Canada, mais aussi une question fondamentale en matière des droits de la personne. Elle menace la sécurité publique, viole les droits de la personne et mine la démocratie. Dans sa pire forme, la haine en ligne mène à la violence, et trop souvent à des situations tragiques.

Si l'on accepte ou tolère que les Canadiens ciblés par la haine en ligne doivent vivre leur vie dans un climat toxique, nous les abandonnons! »

J'ai aussi déclaré que l'enjeu de la lutte contre la haine en ligne ne devait pas être la responsabilité d'une seule organisation; cette responsabilité ne devait pas, non plus, reposer sur les épaules des personnes touchées par la haine en ligne. Toutefois, la Commission doit jouer un rôle important dans l'élaboration d'une solution coordonnée et plus large pour régler cet enjeu complexe. La Commission estime qu'une simple modification de la Loi, visant des clauses similaires à l'ancien article 13, serait insuffisante. Ce changement à la Loi ne permettrait pas à lui seul d'offrir un niveau de protections ou de recours nécessaire et n'aurait pas une portée suffisante afin de faire diminuer efficacement la propagation de haine en ligne. Cet outil du 20e siècle est désuet et ne représente plus une solution envisageable pour régler ce qui est devenu un problème urgent du 21e siècle. Des efforts concertés et pluridimensionnels seront nécessaires suivant une approche où le gouvernement doit prendre les devants et réunir tous les intervenants concernés.

Juste avant que la session parlementaire ne soit interrompue en vue des plus récentes élections fédérales, le gouvernement a déposé le projet de loi C-36 visant les formes graves de discours haineux en ligne. Bien que ce projet de loi soit mort au feuilleton au moment de la dissolution du Parlement, le Parti libéral du Canada a promis de présenter un nouveau Plan d'action national de lutte contre la haine d'ici 2022 dans le cadre d'une stratégie canadienne de lutte contre le racisme qui est repensée. J'attends avec impatience l'arrivée de nouvelles mesures législatives en matière de droits de la personne qui serviront à affronter ce problème dont l'urgence ne fait qu'augmenter, comme nous avons pu le constater ces dernières années, au Canada, aux États unis, et partout dans le monde.

Changements au sein de l'organisation et transformation pour la lutte contre le racisme

Pour inspirer tous les Canadiens et toutes les Canadiennes à reconnaître et préserver leurs droits fondamentaux, nous nous sommes appliqués à donner l'exemple en faisant preuve de respect mutuel, d'équité et de transparence et en nous assurant que notre propre milieu de travail à la Commission se caractérise par des notions de respect et d'égalité, et qu'il respecte l'individualité de chaque personne de l'équipe.

Ces dernières années, à la Commission, nous avons créé un modèle de communication interne plus ouvert et « horizontal » qui favorise la transparence dans les communications inter organisationnelles et qui va au-delà des obstacles hiérarchiques traditionnels.

Cela signifie que les commissaires, les gestionnaires et d'autres appliquent une politique de la « porte ouverte » permettant à n'importe quel membre du personnel de proposer des suggestions ou d'exprimer ses préoccupations et de disposer d'un espace sécuritaire pour être entendu.

La Commission a opéré un changement de culture fondamental dans ses processus.

Avant 2015, le fonctionnement de la Commission était plus cloisonné, en silo. Au cours des dernières années, nous avons déployé des efforts considérables afin de défaire les silos et nous assurer que les membres de la gestion collaborent et travaillent ensemble, au sein d'une même équipe.

Nous avons aussi reconnu qu'en tant qu'employeur, la Commission doit donner l'exemple dans sa lutte contre le racisme, et pour l'équité et l'inclusion. Cela a donné lieu à un certain nombre d'initiatives internes et externes où nous avons pu partager nos expériences et les leçons apprises dans l'espoir que cela puisse aider à orienter d'autres organisations, partout au Canada, qui procèdent à des changements organisationnels. Je pense également à la vérification de la représentation des personnes racisées à la fonction publique fédérale dans son ensemble et la mise en œuvre de notre propre Plan d'action de lutte contre le racisme.

Nous nous sommes engagés à créer un milieu de travail ouvert, sain, sûr et inclusif qui repose sur des principes de lutte contre le racisme, d'équité et d'inclusion. La Commission encourage et respecte la diversité de nos commissaires, nos dirigeants et de notre personnel. La formation continue nous permet d'accroître la sensibilisation aux iniquités historiques et structurelles qui ont créé des obstacles sociaux auxquels font face les personnes autochtones, les personnes noires et les autres personnes racisées.

Ces dernières années, nous avons étudié de près tous les aspects de notre travail, qu'il s'agisse de notre fonctionnement interne ou des services que nous offrons à la population. La clé du succès de ce travail est sa constance et sa continuité. Il doit se renouveler et être durable.

J'aimerais vous inviter à consulter les documents suivants publiés par la Commission et portant sur la lutte contre le racisme : Plan d'action de lutte contre le racisme et notre lettre ouverte sur la mise en œuvre de l'Appel à l'action en faveur de la lutte contre le racisme, de l'équité et de l'inclusion dans la fonction publique fédérale publiés en 2021.

Ils vous permettront de constater que cet important travail de lutte contre le racisme est un impératif organisationnel et intégré de manière permanente au fondement même de nos opérations dans nos trois principaux rôles : en tant qu'employeur, fournisseur de service et organisme de réglementation, et défenseur des droits de la personne. Afin de promouvoir et instaurer un changement organisationnel antiraciste durable au sein de la Commission, le directeur exécutif de la Commission et moi agissons également à titre de co-champions de l'inclusion, la diversité, l'équité, l'accessibilité et l'antiracisme, et de co-champions de notre Plan de lutte contre le racisme.

Nouveaux mandats

Abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (2011)

Avant 2011, la protection offerte par la Loi canadienne sur les droits la protection de la personne ne protégeait pas toutes les personnes au Canada en raison de l'article 67 de la première loi canadienne des droits de la personne adoptée en 1977. Cet article empêchait les quelque 700 000 personnes autochtones de porter plainte contre le gouvernement du Canada ou un conseil de bande en raison des dispositions discriminatoires de la Loi sur les Indiens. Autrement dit, la Commission ne pouvait pas accepter les plaintes des membres de Premières Nations qui estimaient avoir subi de la discrimination dans plusieurs aspects de leur vie quotidienne. L'article 67 a été abrogé par le Parlement en 2008, et cette abrogation est entrée en vigueur le 18 juin 2011.

Grâce à ce changement, les personnes visées par la Loi sur les Indiens ont obtenu la pleine protection des lois couvrant les droits de la personne, pour la première fois de l'histoire. Ce fut une retentissante victoire longtemps en matière de droits de la personne qui s'imposait depuis. En ce qui concerne la Commission, cette décision a marqué le début d'une étroite collaboration avec les communautés autochtones pour aider les membres de ces communautés à mieux connaître leurs droits de la personne et les mesures en place leur permettant d'accéder à la justice au Canada. Ce changement coïncide bien sûr avec les premières années de la mise sur pied de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Cette époque constitue un moment charnière en matière de droits de la personne des personnes autochtones au Canada.

La réconciliation doit commencer par une écoute attentive. En 2015, j'ai demandé aux communautés autochtones de partout au Canada, de l'océan Atlantique jusqu'au Pacifique, en passant par l'océan Arctique, ce que nous devions faire pour défendre et protéger leurs droits de la personne. J'ai personnellement rencontré des personnes de douzaines d'organisations autochtones et tenues des tables rondes auxquelles ont participé des aînés de nations Algonquine, Anishinaabe, Crie, Inuit, Mi'kmaq, Mohawk, Déné du Sahtu, Squamish et Tlingit. L'une des importantes préoccupations qu'ils nous ont confiées est que même après que l'article 67 ait été pleinement abrogé, il restait difficile d'avoir accès à la justice.

En 2007, l'Assemblée des Premières Nations et la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières Nations ont déposé une plainte à la Commission portant sur le financement inapproprié et inéquitable des services à l'enfance et à la famille pour les Premières Nations vivant dans les réserves. La formule utilisée par le ministère fédéral alors connu sous le nom d'Affaires autochtones et du Nord Canada (et maintenant appelé le ministère des Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada) pour calculer les montants de ce financement était au coeur du litige.

Malgré des demandes répétées de personne ne travaillant pas à la Commission pour que la plainte soit rejetée, mon prédécesseur a transmis la plainte au Tribunal canadien des droits de la personne qui l'a d'abord rejetée, en mars 2011. En avril de cette même année, la Commission a soumis une demande de contrôle judiciaire, faisant valoir que le fait de rejeter la plainte pourrait affaiblir les lois sur les droits de la personne en vigueur au Canada et empêcher le dépôt de plaintes de discrimination contre le gouvernement fédéral dans le domaine du financement des services fournis dans les réserves. Un an plus tard, la Cour fédérale annule la décision du Tribunal et ordonne que la plainte soit entendue sur le fond.

L'audience complète s'est déroulée de février 2013 à octobre 2014. La Commission a défendu l'intérêt public dans cette affaire. Amnistie internationale Canada et les Chefs de l'Ontario sont également intervenus dans l'affaire. En 2016, un an après ma nomination au poste de présidente, le Tribunal a rendu sa décision. Il confirme que le programme actuel des services à l'enfance et à la famille et son financement étaient discriminatoires.

Ce jugement a été pour nous la confirmation qu'en tant que Commission, notre voix à titre d'institution nationale des droits de la personne au Canada apporte des résultats.

Après avoir consacré des années à peaufiner notre message, à faire en sorte que notre voix soit plus ferme et à expliquer clairement au public que nous sommes vraiment un organisme de défense des droits de la personne pour l'ensemble du Canada qui n'a aucun lien de dépendance avec le gouvernement, le Parlement est venu frapper à notre porte.

À partir de 2019, le champ des activités de la Commission a été élargi, alors que nous avons reçu de nouveaux mandats en vertu de nouvelles lois : la Loi sur l'équité salariale, la Loi canadienne sur l'accessibilité et la Loi sur la stratégie nationale sur le logement. Cette expansion découle non seulement des nouvelles responsabilités qui nous ont été confiées, mais aussi de changements que nous avons réclamés et dont nous avons été chargés en raison de notre expertise et des actions que nous avons posées.

Non-discrimination génétique (mai 2017)

En 2017, la Loi sur la non-discrimination génétique a entraîné des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne pour interdire toute discrimination fondée sur « les caractéristiques génétiques ». C'était la première fois depuis l'ajout du motif de « l'orientation sexuelle », en 1996, qu'une modification était apportée à la liste des motifs de discrimination.

Cette Loi sur la non-discrimination génétique interdit à toute personne d'obliger une personne à subir un test génétique (ou à partager les résultats d'un tel test) pour lui fournir des biens ou des services, ou pour conclure ou maintenir un contrat. Cette loi a aussi entraîné des modifications au Code canadien du travail pour que toute personne travaillant comme employé soit protégée contre ce type d'obligation.

Cette victoire en matière de droits de la personne aura de vastes conséquences, dont certaines que nous pouvons à peine imaginer. La recherche génétique et son utilisation sont un domaine de la science extrêmement prometteur et qui progresse rapidement. Les bienfaits ont été démontrés. Par contre, il en demeure que nous ne connaissons pas encore tous les risques potentiels qu'elle comporte. Le développement de nouvelles technologies fait en sorte qu'il est plus important que jamais de veiller à ce que les droits de la personne et le droit à la vie privée évoluent parallèlement pour nous protéger contre la discrimination génétique.

Procéder à une analyse qui peut vous sauver la vie ne devrait pas soulever des craintes d'un autre ordre. Chaque personne au Canada mérite que ces droits importants soient bien protégés pour que nous puissions tous vivre sans avoir peur que son profil génétique soit un jour utilisé pour nous désavantager.

En 2020, après être intervenues pour protéger l'intérêt public, la Commission et d'autres organisations qui luttent pour les droits et pour la protection de la vie privée ont célébré, ensemble, la décision de la Cour suprême du Canada confirmant la constitutionnalité de la Loi sur la non-discrimination génétique qui avait été contestée par le procureur général du Québec.

L'identité ou l'expression de genre (juin 2017)

En 2016, le gouvernement a déposé le projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code criminel. Une fois adoptée en juin 2017, cette loi a ajouté « l'identité ou l'expression de genre » à la liste des motifs de discrimination illicite contenue dans la Loi canadienne sur les droits de la personne ainsi qu'à la liste des « groupes identifiables » protégés contre de la propagande haineuse, par le Code criminel.

Simplement dits, ces ajouts ont permis d'établir clairement et une fois pour toutes qu'au Canada, il est interdit par la loi de discriminer ou de harceler une personne en raison de son identité ou de son expression de genre.

La Commission a longtemps milité pour ce changement. Nous déclarons que « personne ne devrait vivre dans la peur d'être ce qu'il est » et que « les droits des personnes trans sont des droits de la personne ». Nous avons célébré cette victoire aux côtés des intervenants majeurs qui, pendant les nombreuses années qui ont précédé, avaient d'abord ouvert la voie vers la résolution de cette importante question.

Loi sur l'équité salariale (2019)

L'histoire de notre engagement pour l'équité salariale remonte à la création de notre organisation. Depuis que le parlement a adopté la Loi sur les droits de la personne en 1977, les femmes de partout au Canada nous ont porté plainte à la Commission pour des situations de discrimination liées à l'équité salariale.

Cependant, pendant plusieurs dizaines d'années, nous avons soutenu que de régler les situations de discrimination en matière d'équité salariale en traitant les plaintes reçues après qu'une situation se soit produite n'était pas la façon idéale de lutter pour que chaque personne obtienne un salaire égal pour un travail de valeur égale. Nous savions qu'il fallait mettre en place, au Canada, une approche proactive – et nous l'avons longtemps réclamé.

Enfin, en 2019, la Loi sur l'équité salariale a été adoptée. Elle vise à corriger les écarts salariaux dus à la discrimination systémique fondée sur le sexe à l'égard des personnes qui occupent des emplois dans des catégories d'emplois à prédominance féminine.

Alors que la Loi canadienne sur les droits de la personne permettait aux personnes employées de porter plainte en raison d'une discrimination fondée sur le genre, la Loi sur l'équité salariale agit quant à elle de façon proactive. Elle impose aux employeurs d'évaluer, selon un échéancier précis, si les employés à des postes communément occupés par des femmes gagnent un salaire égal pour un travail de valeur égale sur leur milieu de travail.

La Loi sur l'équité salariale prévoit la création d'une unité de l'équité salariale à la Commission et lui confère le mandat de favoriser l'égalité des femmes en s'assurant que les organisations des secteurs public et privé sous réglementation fédérale évaluent le travail accompli par des femmes de la même façon qu'elles évaluent le travail accompli par des hommes.

L'Unité de l'équité salariale fournit des directives aux employeurs, aux membres du personnel et à leurs représentants concernant les diverses mesures à mettre en place pour atteindre l'équité salariale dans leur organisation.

Le Canada, pays exempt d'obstacles (2019)

Comme nous l'avons fait pour l'équité salariale, la Commission a longtemps mis l'accent sur les droits des personnes handicapées. Pendant de nombreuses années, presque depuis notre création, les plaintes de discrimination fondées sur un handicap ont constitué la plus grande part des plaintes que nous recevons.

Toutefois, à partir du moment où une personne sent qu'elle doit porter plainte à la Commission en raison d'une situation de discrimination, le mal est déjà fait. Prendre des mesures proactives pour éliminer les obstacles et empêcher ces situations avant même qu'elles ne se produisent est une façon beaucoup plus efficace de bâtir une société inclusive. C'est la perspective que nous avons continué de défendre, et en 2019, le Parlement a rencontré ses engagements à cet égard.

La Loi canadienne sur l'accessibilité a pour objectif de créer un Canada sans obstacle d'ici le 1er janvier 2040. Au nombre de ces obstacles, on retrouve les obstacles technologiques et ceux dans les espaces physiques, ainsi que les obstacles liés aux communications ou aux politiques qui empêchent les personnes handicapées de participer pleinement et de manière égale dans la société. Ils nuisent aux personnes qui vivent avec un handicap, quel qu'il soit : physique, de santé mentale, intellectuel, cognitif ou lié aux capacités sensorielles, qu'il s'agisse d'un trouble d'apprentissage ou de limitation fonctionnelle.

La Loi canadienne sur l'accessibilité prévoit qu'une unité de l'accessibilité soit établie à la Commission et lui confère le mandat de soutenir les employeurs et les fournisseurs de service sous réglementation fédérale pour les aider à reconnaître et à éliminer les obstacles ainsi qu'à prévenir de nouveaux obstacles à l'accessibilité et ainsi contribuer à la transformation du Canada en un pays exempt d'obstacles.

Mécanisme national de surveillance (2019)

La Commission, ainsi que plusieurs autres intervenants, a longtemps réclamé que le Canada désigne un Mécanisme national de surveillance pour répondre à ses obligations en vertu de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. Le 21 juin 2019, cette désignation a été rendue officielle par l'adoption de la Loi canadienne sur l'accessibilité qui comprend des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

En tant que Mécanisme national de surveillance (MNS), l'objectif de la Commission sera de suivre les progrès que doit accomplir le Canada pour respecter ses obligations concernant les droits des personnes handicapées énoncés dans la Convention et de faire rapport à ce sujet. La Commission, dans son rôle de MNS, doit également entreprendre un processus d'engagement public avec des personnes handicapées à travers le Canada et des organisations qui défendent leurs intérêts et assurer leur participation active tout au long du processus.

Loi sur la stratégie nationale sur le logement (2019)

La Loi sur la stratégie nationale sur le logement reconnaît que le droit à un logement adéquat est un droit fondamental de la personne ancré dans le droit international. Elle énonce une vision à long terme pour le logement au Canada qui reconnaît l'importance du logement dans l'atteinte d'objectifs en matière de santé et en matière sociale, économique et environnementale. La loi oblige également le gouvernement à prévoir, à l'échelle nationale, des objectifs en matière de logement et de lutte contre l'itinérance ainsi que des priorités, des initiatives, des échéanciers et des résultats souhaités relativement à ces objectifs. Elle prévoit la création d'un poste de défenseur fédéral du logement et que la Commission canadienne des droits de la personne fournira au titulaire de ce poste services administratifs et installations dont il a besoin pour exercer ses fonctions.

Selon la Loi sur la stratégie nationale sur le logement, le bureau du défenseur fédéral du logement est situé à la Commission canadienne des droits de la personne, laquelle est également responsable de lui offrir du soutien pour la mise en œuvre de la Stratégie nationale sur le logement.

Le mandat de la personne au poste de défenseur fédéral du logement est de contribuer à la promotion et à la protection du droit au logement au Canada. Ses activités visent à entraîner des changements qui répondront aux principaux enjeux systémiques en matière de logement et qui provoqueront des avancées en matière de droit au logement pour tous et toutes au Canada en s'appuyant une approche fondée sur les droits de la personne, laquelle favorise la participation, la responsabilisation, la non-discrimination, l'équité, l'autonomisation, et le respect des lois et obligations relatives aux droits de la personne.

Date modifiée :