David Langtry parle de discrimination génétique devant le Comité sénatorial permanent des droits de la personne

Notes d'allocution de

David Langtry

président par intérim

Commission canadienne des droits de la personne

Allocution devant le Comité sénatorial permanent des droits de la personne

concernant le projet de loi S-201, Loi visant à  interdire et à  prévenir la discrimination génétique

Le 11 décembre 2014

Ottawa (Ontario)

Le texte prononcé fait foi

Madame la présidente, honorables membres du Comité, 

Je vous remercie d’avoir invité la Commission canadienne des droits de la personne à  contribuer à  l'étude du projet de loi S-201, Loi visant à  interdire et à  prévenir la discrimination génétique

Je vous présente mes collègues. ma gauche, Macella Daye, analyste principale des politiques de notre Division des politiques, de la recherche et des affaires internationales. à€ ma droite, Fiona Keith, directrice par intérim de la Division des services du contentieux, et avocate-conseil. 

Nous sommes ici aujourd’hui pour communiquer trois messages importants : 

Premièrement, il faut interdire la discrimination fondée sur des caractéristiques génétiques, de manière à  protéger les Canadiennes et les Canadiens contre le risque de voir leurs renseignements génétiques être utilisés à  leur désavantage. 

Deuxièmement, en ajoutant les « caractéristiques génétiques » à  la liste de motifs de distinction illicites, on permettrait à  la population canadienne de porter plainte à  la Commission sans avoir à  invoquer d’autres motifs — comme c'est le cas à  l'heure actuelle.

Troisièmement, si cette protection était inscrite noir sur blanc dans la Loi, il deviendrait clair que chaque personne a le droit d'être traitée équitablement quelles que soient ses caractéristiques génétiques. 

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Permettez-moi de vous résumer notre mandat et nos activités. Comme vous le savez sans doute, le Parlement a voulu que la Loi canadienne sur les droits de la personne favorise l’égalité et protège la population canadienne contre la discrimination fondée sur des motifs comme l’âge, le sexe, la déficience, la race, etc. – il y en a 11 en tout. 

La Commission applique la Loi. Nous recevons des plaintes de discrimination concernant l’emploi et les services offerts par les organisations sous réglementation fédérale. Il s’agit du secteur public fédéral et des entreprises privées dans les domaines du transport, des télécommunications et des services bancaires. 

La Commission évalue toutes les plaintes qu’elle reçoit. Dans certains cas, nous renvoyons des plaintes au Tribunal canadien des droits de la personne pour qu’il rende une décision. Le Tribunal agit indépendamment de la Commission.

***

La recherche génétique est extrêmement prometteuse. Elle a généré de nouvelles méthodes diagnostiques et thérapeutiques. Certaines personnes pensent qu’elle révolutionnera les soins de santé. 

De nombreuses personnes admettent qu'elle a ses avantages, mais il demeure de très grandes zones grises. 

Les renseignements sur notre bagage génétique sont des plus personnels. Des gens nous ont dit éviter les analyses génétiques parce qu’ils ont peur – ils ont peur que les analyses qui sont censées les aider soient un jour utilisées pour leur nuire. 

Ces personnes ont peur de subir de la discrimination – que ce soit par des employeurs ou par des compagnies d’assurance – en raison de ce que leurs gènes peuvent révéler. 

Mais qui peut les blâmer? Il y a un flou juridique quant à  nos droits dans ce domaine. La discrimination génétique est un domaine du droit tout nouveau pour lequel les tribunaux n'ont pas établi de critères. Il n’y a pratiquement pas de jurisprudence canadienne dans ce domaine. 

Aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Commission peut accepter les plaintes de discrimination en raison de caractéristiques génétiques, à  la condition qu’elles soient liées à  un autre motif comme la déficience. 

Cette façon de faire est manifestement trop contraignante. 

Étant donné que la recherche fait des progrès à  un rythme accéléré, les analyses génétiques dévoileront de plus en plus de détails sur nous. Elles pourraient un jour mesurer d’autres tendances naturelles comme les traits de caractère. Supposons qu'un employeur se mette à  exiger des profils génétiques comme critères d’embauche. Les personnes qui n'auraient pas le bon profil génétique subiraient-elles de la discrimination alors qu'elles auraient pourtant les diplômes et l’expérience nécessaires? 

Voulons-nous voir la société canadienne s'engager dans cette voie? 

Le Parlement sait depuis longtemps que les lois doivent évoluer pour s'adapter aux changements sociaux et technologiques. 

Si on ajoutait les « caractéristiques génétiques » à  la liste des motifs de distinction interdits par la Loi canadienne sur les droits de la personne, on favoriserait cette adaptation. La Commission pourrait alors accepter des plaintes pour discrimination génétique sans avoir à  les relier à  des motifs existants.

Mais le plus important est le fait que les protections prévues par la Loi seraient clairement définies. Il serait clair que toute personne a légalement le droit à  un traitement équitable, peu importe son identité et ce que son bagage génétique peut révéler. De plus, les employeurs seraient mieux à  même de comprendre leurs obligations et à  faire le nécessaire pour prévenir la discrimination.

La Commission appuie donc le projet de loi S-201

tout comme nous appuyons l’engagement pris dans le discours du Trône, soit que le gouvernement « empêchera les employeurs et les compagnies d’assurance de faire de la discrimination sur la base d’analyses génétiques ».

J'ai bon espoir que l’ajout de cette protection ferait avancer la recherche génétique et favoriserait la santé des gens. 

Au lieu de dissuader les gens de se soumettre à  des analyses pour détecter des caractéristiques héréditaires susceptibles d'hypothéquer leur santé, cette protection les encouragerait probablement à  le faire, ce qui ferait progresser les connaissances scientifiques tellement prometteuses. 

Je vous remercie. 

Mes collègues et moi-même ferons de notre mieux pour répondre à  vos questions.

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Date modifiée :