Les droits individuels sont assortis d’une responsabilité collective

Éditorial publié dans La Presse

Par Isha Khan et Marie-Claude Landry

On vous demande de porter un masque et de vous faire vacciner. Si vous ne le faites pas, vous ne pouvez pas participer à des rassemblements sociaux, prendre un avion ou manger dans un restaurant. Vous pourriez perdre votre emploi.

Est-ce de la discrimination? Une violation des droits de la personne?

Certaines personnes répondent oui à ces questions et appuient leur argumentaire en choisissant seulement quelques articles de la Déclaration universelle des droits de l'homme, de la Charte canadienne des droits et libertés et de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Elles ont tort.

En tant qu'avocates et dirigeantes de deux importantes organisations canadiennes vouées aux droits de la personne, nous considérons que ces affirmations sont non seulement fausses, mais également dangereuses. Elles mettent à risque notre santé et prolongent la pandémie en favorisant les contraventions aux consignes sanitaires et en ignorant la science. Elles mettent en danger les droits de la personne et elles détournent l'attention publique des enjeux réels.

Le 10 décembre est la Journée internationale des droits de la personne parce que c'est ce jour-là, en 1948, que la Déclaration a été adoptée. Elle est née du génocide et des atrocités de la Seconde Guerre mondiale, un chapitre sombre de l'histoire.

La Déclaration repose sur le principe que nous avons en commun une humanité fondamentale, que chaque personne a des droits fondamentaux et que ces droits doivent être protégés pour le bien de la société.

Cependant, les droits et libertés individuels peuvent se réaliser seulement si nous protégeons aussi le bien-être de la société dans son ensemble.

Les personnes qui s'opposent aux restrictions liées à la COVID-19 ont leurs favoris parmi les 30 articles de la Déclaration. Par exemple, elles citent souvent l'article 3 : « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne. »

Manifestement négligé, l'article 29 reconnaît qu'il y aura des moments comme celui que nous vivons maintenant où des limitations raisonnables aux libertés individuelles sont nécessaires pour le bien commun. La protection du public contre une pandémie mortelle est certainement importante pour la santé de l'ensemble des populations et pour notre humanité commune.

Tout le monde prétend soutenir les droits de la personne, mais on ne reconnaît pas toujours que les libertés individuelles s'accompagnent toujours de responsabilités individuelles envers les autres.

Sans cette compréhension, les droits de la personne peuvent être dénaturés et attaqués. La haine, la violence, les menaces, le racisme et la peur en sont les conséquences.

La population s'est polarisée dans ses opinions, ce qui fausse les perceptions et engendre l'intolérance. Les médias sociaux nous offrent de précieuses plateformes pour faire connaître nos opinions, mais la colère en ligne (et les inquiétants algorithmes numériques) a encouragé et popularisé les personnes qui utilisent l'ignorance, la désinformation et la complaisance pour servir leur dessein personnel ou obtenir plus d'attention, souvent en attisant encore plus de colère et de division.

Aujourd'hui, alors que nous célébrons le 73e anniversaire du document fondateur des droits de la personne qui nous est cher, engageons-nous à apprendre ce qu'il dit réellement et ce qu'il signifie vraiment. Pour protéger les droits de la personne, il faut d'abord les comprendre, sans quoi nous risquons de répéter l'histoire même que les auteurs et autrices de la Déclaration universelle des droits de l'homme voulaient empêcher de se reproduire.

Isha Khan est la directrice générale du Musée canadien pour les droits de la personne à Winnipeg. Marie-Claude Landry est la présidente de la Commission canadienne des droits de la personne, à Ottawa.

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