Discussion éclair sur le racisme environnemental au Canada

Type de publication
Le travail de lutte contre le racisme
Sujet
Droits de la personne

Rapport sommaire

22 avril 2024

La CCDP reconnaît la contribution inestimable du groupe de spécialistes qui a participé à cette importante discussion éclair. Leurs précieuses connaissances et compétences techniques ont clairement établi le lien entre le racisme environnemental et les droits de la personne au Canada.

No de catalogue : HR4-108/2023F-PDF

ISBN : 978-0-660-68502-1

Sommaire

« La Terre mère devrait avoir des droits parce que nous avons besoin d'elle. Il y a un dicton qui dit que si tous les animaux disparaissaient, nous ne survivrions pas. Si les poissons disparaissaient, nous ne survivrions pas. Si les animaux volants et nageurs, les plantes et les arbres disparaissaient, nous ne survivrions pas. Mais si tous les êtres humains disparaissaient de la terre, elle survivrait ».

Spécialiste du panel

Le 16 février 2023, la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) a tenu une discussion éclair sur le racisme environnemental. Une « discussion éclair » est une mini-table ronde consultative sur un enjeu particulier qui, dans ce cas-ci, a réuni un groupe de cinq spécialistes ayant des connaissances dans le domaine du racisme environnemental en raison de leurs activités dans les milieux de l'activisme, de la défense d'intérêts et des universités ou en raison de leur vécu.

Les spécialistes ont soulevé un certain nombre de points au sujet de la nature interreliée des répercussions et des enjeux découlant du racisme environnemental. Parmi les sujets abordés, on peut mentionner les répercussions du colonialisme, les normes sociétales, les systèmes de pouvoir, les répercussions sur la santé, le droit de la personne à un logement adéquat, le savoir autochtone, le système juridique, la collecte de données et les changements climatiques.

Les spécialistes ont noté que le racisme environnemental est un sous-produit direct du colonialisme. Ils ont fait savoir que le maintien des pratiques coloniales nuit encore aujourd'hui aux communautés autochtones, noires et aux autres communautés racisées. Collectivement, bon nombre de spécialistes ont déclaré que, en tant que société, le Canada a normalisé un niveau de vie moindre pour les communautés racisées et défavorisées sur le plan socioéconomique. De nombreuses histoires ont été racontées sur la façon dont ces normes sociétales ont mené à des situations de racisme environnemental qui ont eu des répercussions négatives sur les communautés touchées.

Les spécialistes ont souligné que, bien que le racisme environnemental ait une incidence sur le droit de la personne logement adéquat, il va bien au-delà des maisons et des structures. Les communautés qui vivent dans des situations de racisme environnemental sont également touchées de façon disproportionnée par les taux élevés de maladies chroniques et de décès. Les spécialistes ont expliqué comment le stress permanent et les perturbations des communautés et des modes de vie entraînent de graves répercussions sur la santé spirituelle, culturelle et mentale. Certains spécialistes ont mentionné que l'une des principales conséquences du racisme environnemental est la destruction des communautés. Par exemple, les projets d'infrastructure réalisés dans les communautés existantes ont traditionnellement entraîné le déplacement de ces communautés et la perte de biens culturels.

Les systèmes de pouvoir étaient également un sujet d'intérêt pour les spécialistes du panel. Ils ont fait part de leurs frustrations à l'égard du système juridique canadien et du manque de respect et de l'exclusion dont font souvent preuve les membres de ce système à l'égard des communautés autochtones, noires et d'autres communautés racisées qui sont victimes de racisme environnemental. Cette exclusion empêche les communautés autochtones, noires et les autres communautés racisées de participer à la conversation et aux processus décisionnels concernant leurs communautés. Selon de nombreux spécialistes, cette situation est en partie attribuable à l'effacement de la culture autochtone parce que les droits des Autochtones ne sont pas considérés comme valides en droit canadien. Un spécialiste a indiqué que pour les communautés noires en particulier, leur exclusion de ces processus décisionnels doit être comprise dans le contexte des effets résiduels de l'esclavage des Noirs au Canada.

Certains spécialistes ont également constaté que l'on accordait plus d'importance aux connaissances théoriques qu'à l'expérience vécue dans le système juridique. Les spécialistes ont souligné l'importance de veiller à ce que les lois, les règlements, les programmes et les politiques visant à lutter contre le racisme environnemental soient élaborés en collaboration avec les communautés touchées et comprennent de solides mesures de responsabilisation. Les spécialistes ont également souligné la valeur de l'intégration du savoir et des systèmes de valeurs autochtones dans les lois et les politiques environnementales afin d'assurer le maintien de l'intégrité de l'environnement pour les générations à venir.

Plusieurs spécialistes ont fait part de la nécessité, au Canada, de recueillir systématiquement des données sur le racisme environnemental fondées sur la race. Ils ont souligné que la collecte de données joue non seulement un rôle essentiel dans la compréhension de la portée et de la gravité du racisme environnemental, mais aussi pour raconter l'histoire. Les spécialistes ont souligné l'importance de la narration de récits comme outil de sensibilisation au racisme environnemental au Canada et de plaidoyer pour changer les normes sociétales qui normalisent cette réalité inacceptable.

Enfin, les spécialistes ont soulevé la préoccupation émergente des changements climatiques et les répercussions disproportionnées qu'ils ont et continueront d'avoir sur les communautés qui sont déjà aux prises avec le racisme environnemental. Ils ont indiqué que les répercussions des changements climatiques sont et continueront d'être néfastes pour les communautés autochtones, noires et les autres communautés racisées en raison des différences socioéconomiques existantes au sein de la population générale.

Les spécialistes ont formulé un certain nombre de suggestions pour le travail que la CCDP devrait envisager en ce qui concerne la défense des droits sur l'enjeu du racisme environnemental et les enjeux de droits de la personne. Les mesures s'inscrivent généralement dans les trois thèmes suivants (voir la section Mesures recommandées à la CCDP pour de plus amples renseignements) :

  • Faire des représentations auprès du gouvernement
  • Changer la norme grâce au récit
  • Analyser les moyens de soutenir les communautés

La CCDP reconnaît la contribution inestimable du groupe de spécialistes qui a participé à cette importante discussion éclair. Leurs précieuses connaissances et compétences techniques ont clairement établi le lien entre le racisme environnemental et les droits de la personne au Canada.

L'information recueillie dans le cadre de cette discussion éclair servira à cerner les principaux enjeux afin d'aider la CCDP à planifier ses travaux futurs sur ces enjeux et à analyser des moyens de défendre les droits de la personne touchés par le racisme environnemental au Canada.

Contexte

“ Le racisme environnemental fait référence à la proximité disproportionnée et l'exposition accrue des communautés autochtones, noires et d'autres minorités raciales aux industries polluantes et aux activités dangereuses pour l'environnement ”Note de bas de page 1.

Le 16 février 2023, la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) a tenu une discussion éclair pour analyser l'enjeu du racisme environnemental au Canada. Une « discussion éclair » est une mini-table ronde consultative qui réunit virtuellement un petit groupe de spécialistes sur un sujet donné. Dans le cadre de cette discussion éclair, l'objectif était d'accroître la sensibilisation collective de la CCDP et de renforcer sa capacité de comprendre le problème du racisme environnemental, y compris ses intersections avec l'action climatique et les droits de la personne, en particulier le droit de la personne à un logement adéquat. L'information recueillie dans le cadre de cette discussion éclair servira à cerner les principaux enjeux afin d'aider la CCDP à planifier ses travaux futurs sur ces enjeux et à analyser des options pour défendre les droits de la personne touchés par le racisme environnemental au Canada.

La discussion éclair a réuni un groupe de cinq spécialistes dont les connaissances dans le domaine du racisme environnemental en raison de leurs activités dans les milieux de l'activisme, de la défense d'intérêts et des universités ou en raison de leur vécu ont éclairé la CCDP en augmentant et en élargissant ses connaissances et sa compréhension des réalités actuelles, de la recherche et de la réflexion sur ces enjeux.

Spécialistes du panel

Voici la liste des spécialistes qui ont participé à la discussion éclair (voir les biographies complètes à l'annexe A).

  • Beze Gray – Personne issue de la Première Nation Aamjiwnaang en Ontario qui se consacre à la protection des terres et des eaux anishnaabe et à ses études. Beze Gray fait partie des sept jeunes qui poursuivent le gouvernement Ford devant les tribunaux pour avoir baissé la cible de l'Ontario en matière de changements climatiques pour 2030.
  • Dorene Bernard – Mère, grand-mère, survivante, traditionaliste, gardienne de l'eau, marcheuse pour l'eau, enseignante, activiste, herboriste mi'kmaq
  • Louise DeLisle – Organisatrice pour la justice environnementale pour les résidents noirs de Shelburne et fondatrice de la South End Environmental Injustice Society (SEED)
  • Naolo Charles – Fondateur et directeur de projet, Black Environmental Initiative et Coalition canadienne pour la justice environnementale et climatique
  • Niladri Basu – Professeur, Chaire de recherche du Canada (niveau 2) en sciences de la santé environnementale, Université McGill

Questions stratégiques

La discussion éclair s'est déroulée en deux étapes. Tout d'abord, on a demandé aux spécialistes de répondre par écrit aux questions stratégiques suivantes :

  1. Comment le recours à des cadres comme l'analyse intersectionnelle, sexospécifique, antiraciste et décolonisante pourrait-il aider à révéler et à corriger les répercussions du racisme environnemental sur diverses communautés autochtones, noires et autres communautés racisées?
  2. Comment la souveraineté, le savoir et la justice climatique des Autochtones, compte tenu des appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation, éclairent-ils notre compréhension du racisme environnemental et notre responsabilité à l'égard de la réconciliation avec les Autochtones?
  3. À quoi la CCDP devrait-elle porter attention en ce qui concerne les disparités géographiques, régionales et rurales par rapport aux disparités urbaines en ce qui concerne le racisme environnemental et son intersection avec les changements climatiques et le droit au logement?
  4. Comment le racisme environnemental affecte-t-il le droit des peuples autochtones, des communautés noires et d'autres communautés racisées à un logement adéquat (p. ex. droit au maintien dans les lieux, accès aux commodités de base comme l'eau potable et dans un endroit qui n'est pas dangereux ou pollué)?
  5. Quels types de mesures de lutte contre le racisme environnemental avez-vous vues au Canada, ainsi que dans d'autres pays, dont le Canada peut tirer des leçons?
  6. Que pensez-vous du projet de loi émanant d'un député (C-226) présenté au Parlement le 2 février 2022?
  7. Quel rôle la CCDP pourrait-elle jouer sur cette importante question, compte tenu de sa position en tant qu'institution nationale des droits de la personne et organisme de surveillance indépendant des droits de la personne au Canada?

Les réponses ont été compilées et communiquées aux spécialistes et au personnel de la CCDP avant la discussion éclair. La CCDP et les spécialistes ont ensuite participé à une réunion de trois heures sur Zoom pour approfondir la question. Sue Butchart, gestionnaire des politiques à la CCDP, a animé la discussion éclair et de nombreux membres du personnel de la CCDP étaient présents à titre d'observateurs, y compris les commissaires à temps plein, Sacha Cragg-Gore et Jose Ordonez, et la présidente intérimaire, Charlotte-Anne Malischewski.

Discussion éclair

Répercussions continues du colonialisme

“ Si je pouvais… je ferais une [étude de] recherche sur… les répercussions environnementales de toute forme de colonisation dans le monde afin que les gens commencent à comprendre comment la colonisation, le processus colonial, est toujours liée à la destruction de l'environnement ”.

Spécialiste du panel

Un thème dominant de la discussion éclair était l'influence du colonialisme au Canada et ses effets dévastateurs continus sur les communautés autochtones, noires et racisées. Les spécialistes ont indiqué qu'un certain nombre de problèmes actuels au Canada, au-delà du racisme environnemental, découlent du colonialisme et du traumatisme du colonialisme, notamment dans les domaines de la santé et de l'éducation. Un spécialiste a fait valoir que le racisme environnemental n'est pas un problème nouveau et qu'il est une réalité depuis les premiers jours de la colonisation. Le colonialisme est profondément enraciné dans les systèmes et les structures du Canada et, par conséquent, les répercussions du colonialisme se poursuivront jusqu'à ce que des changements structurels aient été apportés. Un spécialiste a mentionné que le colonialisme est directement lié à la destruction de l'environnement.

Divers spécialistes ont parlé du traumatisme générationnel causé par le colonialisme et ses manifestations directes au Canada. Par exemple, plusieurs spécialistes ont parlé de l'interdépendance du racisme environnemental, des pensionnats indiens, de la Loi sur les Indiens, de l'industrie pétrolière et du nombre disproportionnellement élevé de femmes, de filles et de personnes bispirituelles autochtones disparues et assassinées au Canada. Certains spécialistes ont également parlé de la façon dont le colonialisme perpétue l'effacement du savoir, de la culture et du droit des peuples autochtones de protéger la terre.

Un autre spécialiste a mentionné Africville comme un important rappel du mépris actuel et continu du gouvernement à l'égard des droits et de l'histoire de longue date des communautés noires dans l'Est du Canada. Le spécialiste a décrit comment les dépotoirs municipaux sont à proximité de nombreuses communautés noires et comment l'abus de pouvoir de l'administration municipale a empêché plusieurs membres de la communauté de dénoncer les violations de l'environnement. Le spécialiste a également discuté du déplacement forcé de personnes et de familles vers des territoires inconnus et de l'absence d'une source durable d'eau potable dans les communautés noires.

Collectivement, de nombreux spécialistes ont convenu qu'en raison des répercussions continues du colonialisme qui coïncident avec le racisme environnemental, leurs collectivités sont exposées à des problèmes de santé et à des traumatismes énormes et préjudiciables.

Répercussions sur la santé

“ De plus, vous devez être conscient des problèmes de santé liés au racisme environnemental qui touchent nos communautés. Et les problèmes de santé sont énormes et nuisent aux communautés noires de la Nouvelle-Écosse parce qu'ils nous tuent. ”

Spécialiste du panel

Les spécialistes ont indiqué que les communautés confrontées au racisme environnemental sont touchées de façon disproportionnée par les résultats négatifs en matière de santé, lesquels sont exacerbés par des enjeux interreliés comme le statut socioéconomique, les niveaux d'éducation, le manque de soutien gouvernemental pour les infrastructures communautaires, et la disponibilité des ressources pour répondre aux besoins quotidiens. Une personne du panel a expliqué que la richesse est très racisée dans notre société. Elle a également fait remarquer que la race est le principal prédicteur des cas de racisme environnemental. Une autre personne a indiqué que le racisme environnemental découle d'autres types de racisme, comme le racisme en matière d'emploi, de santé et de logement, qui touche de façon disproportionnée les Autochtones, les Noirs et d'autres communautés racisées. Plusieurs spécialistes ont convenu que le Canada a adopté une norme sociétale qui permet aux personnes qui vivent ces disparités d'avoir un niveau de vie inférieur.

Une personne du panel a raconté son histoire au sujet de sa lutte pour obtenir de l'eau potable dans une communauté historiquement noire qui dépend de puits creusés et dont l'approvisionnement en eau est contaminé en raison du racisme environnemental. Les conduites d'eau potable qui relient les communautés avoisinantes contournent complètement la communauté noire. Lorsque la question a été soulevée auprès du conseil municipal, on leur a dit d'aller chercher de l'eau potable dans un robinet de l'usine d'égout. La personne du panel a fait part de son incrédulité quant à la façon dont cela pourrait être considéré comme un niveau de vie acceptable au Canada. Elle a déclaré que cet acte de racisme environnemental est impensable, et pourtant les décideuses et décideurs ne veulent toujours pas reconnaître qu'il s'agit d'un problème raciste.

Plusieurs spécialistes ont parlé d'un nombre croissant de maladies chroniques et de décès dans les communautés qui continuent de subir les répercussions du racisme environnemental. Certaines personnes ont fait part de taux élevés de maladies chroniques dans les communautés touchées. Par exemple, le cancer et les maladies respiratoires qui découlent de l'approvisionnement en eau contaminée et de la proximité des résidents des installations d'élimination des déchets et des industries émettrices de pollution élevée. Les spécialistes ont signalé que les communautés se retrouvent sans infrastructure pour l'eau potable, les réseaux d'égout, les logements durables et les routes accessibles pour entrer et sortir de leur communauté, ce qui aggrave les disparités causées par le racisme environnemental.

En plus des répercussions sur la santé physique, plusieurs spécialistes ont soulevé les graves répercussions sur la santé spirituelle et mentale des personnes vivant dans des communautés confrontées au racisme environnemental. Des spécialistes ont indiqué que cela découle du stress et du traumatisme continus liés à la lutte contre les situations de racisme environnemental, à la reconnaissance des répercussions sur la santé communautaire et au manque de soutien de la part du gouvernement pour remédier à la situation. Une personne du panel a fait part de ses préoccupations au sujet de la façon dont les personnes vivant dans des communautés situées à proximité d'industries ou d'usines très polluantes sont utilisées comme cobayes non consentants. Les effets à long terme sur les résidents de l'exposition aux produits chimiques rejetés par ces industries et ces usines sont inconnus.

Plusieurs spécialistes ont également évoqué le traumatisme intergénérationnel du racisme environnemental. Une personne du panel a indiqué que l'exposition aux produits chimiques cause des traumatismes intergénérationnels, tant physiques que mentaux. Elle a fait le récit de réactions traumatisantes à des sirènes auditives, parce que dans leur communauté, en grandissant, une sirène signalait un déversement de produits chimiques. Cette personne a également expliqué que, bien que certains produits chimiques ne soient plus produits au Canada, on peut encore en détecter des traces dans les systèmes sanguins de leur famille des générations plus tard. Cela a non seulement un impact générationnel sur la santé physique, mais aussi sur la santé psychologique.

Cela va au-delà du logement

“ Il y a une histoire de retrait des peuples autochtones de leurs terres. C'était la politique du Canada : prendre le contrôle des terres et les placer quelque part […] dans des endroits isolés, où il n'y a pas d'infrastructure, d'infrastructure durable pour les communautés. Et ils sont inondés et envoyés dans des villes loin de leurs maisons, et leurs maisons sont rendues inhabitables par la moisissure […]. ”

Spécialiste du panel

Le droit de la personne à un logement adéquat et ses répercussions intersectionnelles sur les communautés autochtones, noires et les autres communautés racisées au Canada est une priorité particulière pour la CCDP. Plusieurs spécialistes nous ont dit que le racisme environnemental va bien au-delà du logement.

Un logement adéquat comprend plus de quatre murs et un toit. Selon les critères énoncés par les Nations UniesNote de bas de page 2, le droit de la personne à un logement adéquat va au-delà de la structure physique et comprend des choses comme l'accès à des services de base comme l'eau potable et la possibilité de vivre dans une région qui n'est ni polluée ni dangereuse.

Les spécialistes ont fait remarquer que les gens perdent également leur communauté, leur espace et leurs biens culturels en raison des répercussions directes du racisme environnemental. Par exemple, une personne du panel a parlé de la difficulté de trouver un endroit où enseigner le mode de vie traditionnelle aux enfants et aux jeunes de sa communauté. Elle a expliqué que de grandes industries ont envahi et détruit les terres où sa communauté pratiquait la chasse et la pêche et appliquait des modes de vie durables. Une autre personne a dit qu'elle était personnellement incapable de suivre les enseignements des générations précédentes parce que l'environnement a changé en raison de la pollution dans leur communauté.

Les spécialistes ont indiqué que non seulement les infrastructures de logement des communautés autochtones, noires et d'autres communautés racisées se détériorent dans de nombreux cas, mais que, dans certaines communautés, il n'y a pas suffisamment de logements pour loger tout le monde. Une personne du panel a dit qu'il ne lui était pas possible de vivre dans sa communauté parce qu'il y a un manque de logements, un problème qui oblige des membres de sa communauté à aller vivre ailleurs, ce qui a pour effet de les couper de leur collectivité et de leurs terres ancestrales.

Nécessité d'un changement systémique

“ La norme que nous avons, à savoir que les personnes à faible revenu vivent dans des environnements pollués, est vraiment la cible. À mon avis, nous pouvons changer cette norme et c'est là-dessus que nous devons nous concentrer. ”

Spécialiste du panel

De nombreux spécialistes ont soulevé la nécessité de provoquer un changement systémique et de décoloniser les structures de pouvoir existantes au Canada pour lutter contre le racisme environnemental, étant donné qu'il s'agit d'un problème systémique. Une personne du panel a fait référence au rapport sur le changement systémique que Foundation Strategy Group (FSG)’sNote de bas de page 3 a publié sous le titre Water of Systems ChangeNote de bas de page 4. Ce rapport analyse les phases du changement systémique : dans un premier temps, il y a les politiques, les pratiques et le flux des ressources; dans un deuxième temps, il y a les relations et la dynamique du pouvoir; dans un troisième temps, il y a les modèles mentaux.

Cette personne du panel a souligné l'importance des modèles mentaux ou des normes dans la société lorsqu'il s'agit d'envisager des solutions pour un changement systémique. À titre d'exemple, elle a expliqué qu'il existe actuellement dans la société canadienne des normes qui associent directement la valeur d'une personne à sa situation financière. Cela entraîne un manque de respect à l'égard des personnes dont le statut socioéconomique est inférieur, ce qui fait qu'on ne respecte pas leur environnement, ce qui en fin de compte a pour effet qu'on ne prend pas soin de leurs infrastructures et de leurs communautés. Les spécialistes ont aussi expliqué que la richesse est très racisée dans notre société. Par conséquent, en tant que société, nous avons normalisé un niveau de vie pire pour les communautés pauvres et racisées. Les spécialistes ont déclaré que ces types de modèles mentaux ou de normes sociétales qui existent en ce moment dans la société canadienne sont directement liés à l'histoire coloniale et aux systèmes de valeurs que le colonialisme a mis en place.

Les spécialistes ont convenu que l'utilisation du récit joue un rôle important dans la promotion de l'évolution des modèles ou des normes de santé mentale dans la société. Les spécialistes ont dit que la diffusion de récits et d'expériences de communautés directement touchées par le racisme environnemental était un moyen clé de changement. Une personne du panel a donné l'exemple du mouvement #MoiAussi pour illustrer l'incidence que le récit oral a eue sur l'évolution des normes de la société en matière de violence sexuelle. Les spécialistes ont convenu à l'unanimité que le récit oral est essentiel pour sensibiliser les gens à l'urgence des répercussions du racisme environnemental et pour changer la façon de penser de la société afin qu'on ne considère pas comme normal que des collectivités vivent dans des zones polluées.

One expert participant made a comment regarding the documentary, “ There's Something In The WaterNote de bas de page 5 ” au sujet du projet ENRICHNote de bas de page 6 comme étant le premier exemple percutant et réussi d'un récit sur les réalités du racisme environnemental au Canada. Cette personne a souligné que le documentaire avait créé un mouvement de gens qui ont commencé à se préoccuper de la question en Nouvelle-Écosse. Une autre personne du panel a fait remarquer que le récit peut être utilisé pour promouvoir à l'échelle mondiale la question du racisme environnemental au Canada.

Intégration des connaissances autochtones

“ Donc, quand vous voyez ce qui se passe dans le monde, vous voyez les femmes autochtones de cette terre être les premières à s'avancer parce qu'elles ont la responsabilité de protéger l'eau pour leur communauté, leur peuple, mais aussi pour les animaux, la faune ailée, la faune à nageoires et toute la vie, les plantes, tout ce qui a besoin de cette eau pour vivre ”.

Spécialiste du panel

L'intégration des connaissances autochtones aux efforts visant à atténuer les effets du racisme environnemental a été un sujet récurrent tout au long de la discussion éclair. Une personne du panel a parlé du rôle traditionnel des femmes autochtones en tant que gardiennes de l'eau et de leur devoir sacré de protéger les terres et les eaux. Selon cette personne, on ne respecte pas le droit de la personne de protéger la terre et l'eau au Canada. Elle considère qu'une partie du problème tient au fait que, à son avis, la population canadienne compte sur les peuples autochtones pour sauver la terre et l'eau en raison des droits et des rôles inhérents des Autochtones en tant que gardiens et gardiens des terres et des eaux du Canada. Toutefois, cette personne a précisé que cette tâche était difficile parce que le droit des peuples autochtones de protéger la terre n'est inscrit dans aucun livre de droit. Elle a profité de la discussion éclair pour transmettre un enseignement sur l'importance de l'eau – comment tout en dépend et comment il est important de savoir d'où vient notre eau afin que nous puissions la respecter et la protéger.

Plusieurs spécialistes ont souligné que les modèles sur lesquels reposent les lois environnementales doivent intégrer les valeurs autochtones. Lorsqu'elles prennent des décisions, les communautés autochtones tiennent compte des sept générations du passé et des sept générations à venir. De cette façon, on respecte les relations que les générations passées ont eues avec l'environnement, et on préserve l'intégrité de l'environnement pour les générations à venir. De plus, alors que les croyances autochtones considèrent que tous les êtres vivants, y compris la terre, sont égaux, les spécialistes ont indiqué qu'une hiérarchie a été créée par le colonialisme, qui considère au contraire que la terre est une ressource ou un bien qui peut être utilisé à des fins capitalistes. Une personne du panel a fait remarquer que si nous pouvions penser comme les communautés autochtones, nous n'aurions pas de problèmes de racisme environnemental.

Accès à la justice

“ Nous devons expliquer nos modes de vie autochtones et le fait que nos lois ne sont pas considérées comme étant aussi valides que les lois canadiennes, qui sont beaucoup plus récentes que nos modes de vie autochtones, et que nos lois, nos lois naturelles, ne sont pas vues ”.

Spécialiste du panel

De nombreux spécialistes ont parlé du fait que les communautés qui sont aux prises avec des problèmes de racisme environnemental au Canada n'ont pas accès à la justice. Une personne du panel a révélé avoir participé à la fondation de la Coalition canadienne pour la justice environnementale et climatique dans le but de créer une structure permettant aux communautés de signaler des situations de racisme environnemental et de demander de l'aide. Cette personne a insisté sur le fait qu'il ne faudrait pas compter sur la société civile pour créer ces systèmes, mais qu'il devrait y avoir un organisme gouvernemental responsable où les communautés confrontées au racisme environnemental pourraient dénoncer la situation et demander de l'aide pour exposer le problème et trouver des solutions.

Les membres des communautés touchées par le racisme environnemental, y compris les jeunes et les aînés, sont souvent en première ligne pour tenter de faire entendre leur voix en raison de l'inaction. Des récits puissants ont été racontés par des membres en première ligne des manifestations, dont bon nombre ont fini par être criminalisés pour leurs actes.

Une personne du panel a indiqué que les membres de la communauté ne sont pas pris au sérieux par les tribunaux et les milieux juridiques parce que les modes de vie et les lois autochtones ne sont pas considérés comme valides par le droit canadien – que le parcours scolaire est plus respecté que l'expérience vécue. Par conséquent, les membres de la communauté, y compris les aînés qui transmettent les récits traditionnels et les jeunes qui ayant une expérience vécue, ne sont pas pris au sérieux lorsqu'ils défendent leurs communautés et leurs droits dans ces sphères juridiques. Une personne du panel a exprimé sa frustration du fait que les universitaires sont plus souvent acceptés dans ces sphères pour communiquer les récits des communautés que les membres de la communauté eux-mêmes. Une autre personne a également souligné que les défenseurs des terres autochtones ne peuvent pas gagner leur cause devant les tribunaux parce que le droit des peuples autochtones de protéger leurs terres n'est pas inscrit dans les livres de droit du Canada.

Des spécialistes ont exprimé leur frustration en voyant que les personnes qui mettent en place des politiques et des lois ne vivent pas elles-mêmes dans les communautés touchées par le racisme environnemental, et qu'elles n'écoutent pas ou ne consultent pas les gens directement touchés. Une personne du panel a dit que, lorsque des pipelines éclatent ou que des produits chimiques se déversent dans la terre et dans l'eau, cela n'a aucune répercussion dans la vie des gens qui ont élaboré les lois ou les règlements parce qu'ils ne vivent pas dans les communautés touchées. Une autre personne du panel a donné l'exemple de décideuses et décideurs qui n'ont pas vécu dans leur communauté et qui ont le pouvoir de refuser à la communauté un accès à de l'eau potable traitée. D'autres spécialistes ont exprimé leurs préoccupations concernant le fait que les lois en cours d'élaboration ne prévoient pas de mesures de reddition de comptes adéquates, y compris le nettoyage et l'assainissement des terres. Les spécialistes du panel s'entendaient pour dire que les décideuses et décideurs doivent faire preuve de respect envers les communautés autochtones et noires et les autres communautés racisées touchées et amener ces communautés aux tables de décision. Une personne du panel a également souligné l'importance pour les décideuses et décideurs de reconnaître l'histoire et les racines coloniales du racisme environnemental.

Plusieurs spécialistes du panel ont souligné la nécessité d'intégrer plus largement la justice environnementale dans les règlements, les politiques et les programmes canadiens. Une personne du panel a indiqué que le Canada n'a pas de réglementation efficace pour l'industrie minière. Une autre personne a fait remarquer que tous les organismes fédéraux américains doivent avoir des programmes de justice environnementale, mais qu'il n'y a pas d'exigence comparable pour les ministères fédéraux canadiens.

Les spécialistes du panel ont convenu à l'unanimité que les lois sur les droits environnementaux au Canada ne fonctionnent pas. Une personne du panel a fait remarquer que, puisque tout le monde a droit à de l'eau et à de l'air propres, nous devons inscrire dans nos lois que nous avons droit à un environnement propre. Deux projets de loi fédéraux actuellement à l'étude au Parlement ont été abordés lors de la discussion éclair : les projets de loi C-226 et S-5. Les spécialistes ont déclaré que le fait que ces questions soient inscrites dans un texte est un signal d'espoir dans la lutte pour le changement.

S'il est adopté, le projet de loi C-226Note de bas de page 7 (présenté au cours d'une session précédente de la législature sous le nom de projet de loi C-230) entraînera l'élaboration d'une stratégie nationale pour étudier le racisme environnemental et s'attaquer aux torts qu'il a causés à l'échelle fédérale. Une personne du panel a souligné l'importance de la façon dont ce projet de loi obligerait le gouvernement du Canada à recueillir des données sur la réalité du racisme environnemental. Cette personne a dit que les données sont essentielles, non seulement pour mieux comprendre le problème, mais aussi pour pouvoir diffuser le récit et en parler.

Le projet de loi S-5Note de bas de page 8 donnera à la population canadienne un droit légal à un environnement sain. Il obligerait également le gouvernement fédéral à tenir compte des effets cumulatifs des substances toxiques sur la santé humaine et l'environnement. Au cours de la discussion, on a fait remarquer que le projet de loi S-5 stipule que la population canadienne a droit à un environnement sain « sous réserve des limites raisonnablesNote de bas de page 9 ». Une personne du panel a dit très simplement que cette disposition devrait être retirée parce que le droit à un environnement propre n'est pas négociable.

Plusieurs spécialistes ont souligné que les lois ne sont pas suffisantes à moins qu'elles ne contiennent de solides mesures de responsabilisation et qu'elles ne soient mises en œuvre efficacement, en particulier dans les communautés autochtones, noires et les autres communautés racisées. Cela comprend des consultations sérieuses dirigées par les communautés touchées, ainsi que des sanctions et des conséquences exécutoires en cas de violation des lois. Plusieurs spécialistes du panel partageaient la frustration qu'à l'heure actuelle, lorsque les entreprises qui polluent une communauté sont finalement obligées de cesser, on leur donne simplement une tape sur les doigts, mais elles ne sont pas obligées de restaurer le terrain comme avant le début du projet. Une personne du panel a dit que les amendes ne sont pas suffisantes. Elle a dit qu'il fallait prévoir des exigences exécutoires pour la remise en état des terres. Les spécialistes ont également fait remarquer que la nécessité pour les organismes gouvernementaux d'être responsables de la surveillance des répercussions environnementales devrait être intégrée à la loi plutôt que de laisser cette responsabilité aux membres de la communauté. Une personne du panel nous a dit que des membres de sa communauté avaient découvert, grâce à leurs propres recherches indépendantes, qu'il y avait un bassin de décantationNote de bas de page 10 qui s'infiltrait dans leurs communautés, leurs terres humides et l'océan. Cette personne du panel a fait remarquer que si les membres de la communauté n'avaient pas pris l'initiative de recueillir des données, la fuite n'aurait jamais été découverte parce que les sociétés n'ont pas tendance à se surveiller elles-mêmes et à se dénoncer elles-mêmes.

Rôle des données

“ Le suivi consiste à institutionnaliser systématiquement les communautés, à les habiliter, à leur fournir l'éducation, les ressources, le financement, afin qu'elles puissent prendre des mesures jour après jour. ”

Spécialiste du panel

Un grand nombre de spécialistes ont souligné l'importance de la collecte de données et le rôle que jouent les données pour comprendre la gravité et la réalité du racisme environnemental. Les spécialistes ont indiqué que les données jouent également un rôle important en fournissant aux communautés les données probantes nécessaires pour communiquer le problème plus efficacement. Les spécialistes ont exprimé leur préoccupation quant au manque de données recueillies au Canada sur les répercussions du racisme environnemental sur les personnes autochtones et noires et d'autres personnes et communautés racisées.

Les spécialistes ont noté que les membres des communautés et les organisations locales prennent en charge ce fardeau en recueillant la majorité des données existantes. Plusieurs spécialistes ont donné des exemples de communautés qui ont pris l'initiative de surveiller et de recueillir des données liées au racisme environnemental. Chaque spécialiste a donné des exemples de communautés, d'ONG et d'universitaires qui testent proactivement la qualité de l'air, de l'eau et du sol, ainsi que des données sur la pollution, afin de documenter les répercussions du racisme environnemental.

Plusieurs spécialistes ont fait remarquer que lorsque les études sont menées par le gouvernement, les consultations avec les communautés sont traitées comme une « case à cocher » et ne sont pas menées de façon sérieuse. Les spécialistes ont souligné que les consultations avec les communautés touchées par le racisme environnemental doivent être sérieuses et être à la fois dirigées, détenues et exploitées par la communauté. Par conséquent, il faudrait permettre aux membres de la communauté de dicter les modalités de la recherche dès le début et non pas lorsque la collecte a déjà commencé.

Une personne du panel nous a parlé du rôle que les universitaires peuvent jouer en collaborant avec les communautés pour les écouter et les aider à signaler les effets du racisme environnemental. Cette personne a également souligné que, bien que les universités canadiennes mettent beaucoup l'accent sur le racisme environnemental, il y a un manque de financement pour favoriser la collaboration avec les communautés à l'appui de la recherche. Cette personne a insisté sur l'importance des fonds de recherche versés aux communautés afin qu'elles puissent diriger le travail et dicter les modalités de la recherche. Cette norme commence à s'imposer, mais il faut en faire davantage. La personne du panel a parlé du Programme de lutte contre les contaminants dans le Nord comme d'un exemple positif de la façon dont la recherche entreprise dans le Nord est maintenant largement contrôlée par la population inuite et les personnes dirigeantes du Nord.

Des spécialistes ont souligné que la collecte de données est essentielle, car elles peuvent être utilisées pour les efforts de sensibilisation visant à faire en sorte que le racisme environnemental et ses effets demeurent une question prioritaire au Canada.

Les spécialistes ont indiqué que le récit oral peut aussi être utilisé comme méthode de collecte de données et d'application des connaissances. Cela peut aider à promouvoir le changement en faisant connaître les réalités et les besoins uniques des différentes communautés touchées par le racisme environnemental. Les spécialistes ont indiqué que, bien que les données scientifiques sur le racisme environnemental soient importantes, les récits sur les répercussions sur les communautés constituent souvent un point de basculement critique pour la promotion du changement.

Effets des changements climatiques

“ Je suis très préoccupé par les changements climatiques et les lois environnementales lorsqu'il s'agit de nos communautés. ”

Spécialiste du panel

Les spécialistes ont soulevé des préoccupations concernant l'urgence de s'attaquer au racisme environnemental à mesure que les changements climatiques s'aggravent. Les spécialistes ont souligné que les répercussions des changements climatiques seront disproportionnellement dévastatrices pour les communautés touchées par le racisme environnemental. Les spécialistes ont indiqué que certaines communautés ont déjà de la difficulté à avoir accès à de l'eau potable. Ce qui est préoccupant, c'est ce qui arrivera lorsque les changements climatiques affecteront les niveaux d'eau de puits dans les communautés qui n'ont pas encore accès à de l'eau potable.

Des spécialistes nous ont fait part de leur frustration à l'égard de la façon dont les jeunes Autochtones tentent de réapprendre leur enseignement et leur culture traditionnels. Cependant, ces jeunes font face à un sérieux problème parce que la pratique active de ces enseignements et de ces cultures a été ébranlée au cours des dernières générations par les répercussions du colonialisme. Une personne du panel a dit que les générations précédentes avaient appris à avoir honte de leur culture, alors que les générations actuelles essaient de la récupérer et de l'apprendre. Cependant, cette personne a noté que ces générations le font dans un état de crise. Les communautés peuvent constater les répercussions directes du racisme environnemental sur leurs enseignements et leurs modes de vie en raison du manque d'espace physique nécessaire pour pratiquer des traditions comme la chasse, la pêche et d'autres activités ancestrales. Une autre personne du panel a indiqué que les répercussions du racisme environnemental et des changements climatiques sur les communautés autochtones créent d'autres vagues de traumatismes dans les communautés qui luttent déjà depuis des générations contre les effets durables et continus du colonialisme et des pensionnats.

Les spécialistes de la discussion éclair ont suggéré diverses mesures concrètes que la CCDP devrait envisager.

Faire des représentations auprès du gouvernement

Enjeux législatifs

Les spécialistes ont souligné le rôle de la CCDP dans la promotion de l'adoption de projets de loi fédéraux pertinents actuellement étudiés par le Parlement : les projets de loi C-226 et S-5. Les spécialistes ont également insisté sur le fait que, pour que ces projets de loi soient efficaces, ils doivent comprendre des dispositions relatives à la reddition de comptes, à des consultations sérieuses et à des conséquences exécutoires en cas de violation.

Les spécialistes ont également souligné l'importance de veiller à ce que les projets de loi soient bien rédigés du premier coup, puisque les lois seront en vigueur pour des générations une fois que le Parlement les adopte. Il sera essentiel que les personnes, les communautés et les organisations concernées soient consultées et que les projets de loi tiennent compte des points de vue et des idées des personnes ayant une expérience vécue.

Politiques et programmes du gouvernement

Les spécialistes ont souligné l'importance de plaider en faveur de l'intégration des points de vue de la justice environnementale dans une vaste gamme de politiques et de programmes du gouvernement fédéral.

Une personne du panel a indiqué que la CCDP peut collaborer avec les autorités provinciales du logement pour veiller à ce que le droit au logement, qui est un droit de la personne, soit respecté dans les communautés, y compris l'accès à de l'eau potable.

Changer la norme grâce au récit

Les spécialistes ont suggéré à la CCDP d'écouter, d'apprendre et de faire des représentations pour appuyer les efforts visant à modifier la norme actuelle dans la société canadienne. Autrement dit, il faut changer la façon de penser de la société pour qu'il ne soit pas considéré comme normal que des communautés vivent dans des zones polluées.

Un grand nombre de spécialistes ont suggéré que cela pourrait prendre la forme d'une collecte de données pour aider à diffuser les récits des communautés touchées par le racisme environnemental. Pour ce faire, la CCDP pourrait commander des rapports et des études.

Les spécialistes ont également souligné le rôle de la CCDP pour ce qui est d'aider à amplifier les récits des collectivités confrontées au racisme environnemental, notamment en recueillant, en préservant et en partageant des récits.

Une personne du panel a indiqué que la CCDP peut jouer un rôle important dans la poursuite du dialogue sur le racisme environnemental, notamment grâce à des activités comme cette discussion éclair, afin que les pairs puissent continuer de se réunir pour mettre en commun et échanger des connaissances.

Une personne du panel a également suggéré que des organisations comme la CCDP devraient s'assurer de poursuivre leur important travail interne pour analyser les types d'idées et de comportements dans leur propre organisation qui pourraient perpétuer le statu quo.

Analyser les moyens de soutenir les communautés

Les spécialistes ont suggéré que la CCDP pourrait jouer un rôle dans la promotion de la création d'un organisme ou d'un mécanisme gouvernemental désigné où les communautés pourraient signaler les problèmes ou les violations concernant le racisme environnemental.

Cela pourrait également servir d'outil aux communautés qui auraient besoin d'aide pour cheminer à travers dans le système juridique.

Plusieurs spécialistes ont également exprimé la nécessité pour la CCDP d'envisager des options d'indemnisation ou de recours lorsque les communautés sont touchées par le racisme environnemental.

Conclusion

Cette discussion éclair sur le racisme environnemental a fourni des connaissances approfondies qui continueront d'éclairer notre travail à la CCDP. Nous en sommes arrivés à une meilleure compréhension des nombreux facteurs interreliés qui contribuent à perpétuer le racisme environnemental au Canada. Les différentes idées présentées par les spécialistes éclaireront les actions futures de la CCDP dans le cadre de notre travail visant à aborder et à sensibiliser l'état actuel et futur des intersections entre le racisme environnemental, l'action climatique et le droit de la personne à un logement adéquat. Les spécialistes qui ont accepté notre invitation à participer à la discussion éclair ont fourni des renseignements précieux que la CCDP utilisera pour renforcer le rôle qu'elle jouera à l'avenir pour régler cet enjeu.

Annexe A

Biographies des spécialistes

Beze Gray - Personne issue de la Première Nation Aamjiwnaang en Ontario qui se consacre à la protection des terres et des eaux anishnaabe et à ses études. Beze Gray fait partie des sept jeunes qui poursuivent le gouvernement Ford devant les tribunaux pour avoir baissé la cible de l'Ontario en matière de changements climatiques pour 2030.

Beze Gray est une personne bispirituelle, trans, non binaire Anishnaabe/Oneida/Munsee/Lunaape de la Première Nation Aamjiwnaang. Dans la vie, Beze se concentre principalement sur la revitalisation de la langue et de la culture et défend les jeunes bispirituels contre le racisme et les injustices environnementales auxquels est confrontée sa communauté Aamjiwnaang. Beze protège les terres et les eaux et parle de l'industrie pétrochimique (pétrolière) du Canada et de ses répercussions sur les eaux, les terres et les gens des Grands Lacs. Beze a obtenu son diplôme du Collège Georgian en anishnaabemowin et en développement de programmes et continue d'étudier la langue. Ayant contribué à leur fondation, Beze est membre du Niizh Manidook Hide Camp, du Toxic Tour – une tournée de sensibilisation dans la vallée chimique du Canada – et de ASAP (Aamjiwnaang et Sarnia Against Pipelines). Beze fait partie des sept jeunes qui poursuivent le gouvernement de l'Ontario devant les tribunaux relativement à la cible de l'Ontario en matière de changements climatiques pour 2030. Beze travaille actuellement au Technoscience Research Lab de l'Université de Toronto, à la recherche de données sur la pollution et à la création de ressources accessibles pour la nation Aamjiwnaang.

Dorene Bernard - Mère, grand-mère, survivante, traditionaliste, gardienne de l'eau, marcheuse pour l'eau, enseignante, activiste, herboriste mi'kmaq.

Dorene Bernard est membre du groupe mi'kmaq Grassroots Grandmothers, issue de la bande Sipekne'katik de Mi'kmak'i. Elle est gardienne de l'eau, marcheuse pour l'eau et survivante du pensionnat autochtone de Shubenacadie. Elle est titulaire d'une maîtrise en travail social et a travaillé pendant 15 ans pour les services de protection de l'enfance micmacs, et offert du soutien communautaire aux survivants et survivantes des pensionnats au cours des 10 dernières années. En 2017, elle a été titulaire de la chaire en justice sociale de la Coady International Institute, partageant ses enseignements sur les séquelles des pensionnats autochtones, la justice sociale, les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, le racisme environnemental et la justice climatique. Dorene a participé au documentaire « There's Something in the Water », réalisé par Elliot Page sur le racisme environnemental.

Le groupe Grandmother Water Protectors a reçu le premier prix Wel-Lukwen (Prix des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse) en 2022, en reconnaissance de son engagement désintéressé envers Netukulimk, la protection de notre eau, l'environnement et le bien-être des générations futures.

Louise DeLisle - Organisatrice pour la justice environnementale pour les personnes noires résidant à Shelburne en Nouvelle-Écosse et fondatrice de la South End Environmental Injustice Society.

Louise Delisle est une activiste communautaire et fondatrice de SEED (South End Environmental Injustice Society). SEED est une société sans but lucratif dirigée par des personnes noires, en réponse directe de la base au choix de l'emplacement d'un site d'enfouissement près de la communauté afro-néo-écossaise de Shelburne et de la communauté de travailleurs pauvres. Il s'agit d'un effort bénévole visant à régler les problèmes de racisme environnemental. SEED a reçu un prix des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse en 2018 et a fait les manchettes internationales avec la publication du documentaire « There's Something in The Water ». Afin d'améliorer l'accès à l'eau potable dans sa communauté, Louise a lancé une vaste analyse de l'eau en partenariat avec Rural Water Watch, a plaidé avec succès pour la création d'un puits communautaire en partenariat avec le NSCC et les partenaires financiers, installé des systèmes de traitement et de filtration aux UV dans les maisons de la communauté noire où l'eau est contaminée, en partenariat avec LUSH Canada.

Naolo Charles - Fondateur et directeur de projet, Black Environmental Initiative

Naolo Charles est un spécialiste des communications environnementales. Il est le fondateur de la Black Environmental Initiative (BEI). Naolo a également cofondé la Coalition canadienne pour la justice environnementale et climatique (CCJC), une coalition lancée pour soutenir les communautés racisées touchées par la pollution et les effets des changements climatiques. Naolo a été invité à maintes reprises à prendre la parole dans des conférences et dans les médias au sujet de la justice environnementale. Titulaire d'une maîtrise en environnement, Naolo a également été l'un des spécialistes invités à participer à une table consultative organisée par Environnement et Changement climatique Canada pour élaborer la première stratégie nationale d'adaptation du Canada. En plus de son entrepreneuriat social, Naolo travaille actuellement comme directeur de programme dans une fondation. Avant de lancer le BEI, Naolo a travaillé pendant plus de huit ans pour diverses organisations, dont des fondations, des universités, des gouvernements et des entreprises en démarrage.

Niladri Basu - Professeur, Chaire de recherche du Canada (niveau 2) en sciences de la santé environnementale, Université McGill

Niladri (Nil) Basu est professeur à l'Université McGill, où il est titulaire de la Chaire de recherche du Canada (CRC) en sciences de la santé environnementale. Son groupe fait partie du Centre d'études sur la nutrition et l'environnement des peuples autochtones (CENEPA) de McGill. Il a été créé par les dirigeants autochtones en tant que centre de recherche et d'éducation participatif pour répondre à leurs préoccupations au sujet de l'intégrité de leurs systèmes alimentaires traditionnels. L'objectif de la recherche du professeur Basu est d'adopter une approche écosystémique de la santé communautaire, professionnelle et environnementale par laquelle les données probantes sont recueillies, examinées et comparées à partir des communautés humaines et des organismes écologiques. Ses travaux ont donné lieu à environ 240 articles examinés par des pairs et ont permis d'appuyer la formation avancée d'une centaine de personnes, dont 8 scientifiques invités, 16 boursiers postdoctoraux et 13 étudiants au doctorat. La recherche a été soutenue par plus de 45 subventions dont le total dépasse 35 millions de dollars. Les recherches du professeur Basu sont à la fois interdisciplinaires (elles établissent des ponts entre la qualité de l'environnement et la santé humaine, et accroissent la participation des spécialistes des sciences sociales) et intersectorielles (la plupart des projets sont axés sur les besoins des intervenants, notamment les gouvernements et les communautés). Son travail est axé sur les préoccupations en matière de justice environnementale. De plus en plus, le professeur Basu occupe des postes de leadership à l'échelle nationale et internationale pour réunir diverses équipes afin de relever les grands défis dans le domaine (p. ex., essais de toxicité au XXIe siècle, pollution par le mercure). Les recherches du professeur Basu se situent également à l'interface de la science et de la politique avec des activités notables liées à la Convention de Minamata des Nations Unies, au Plan de gestion des produits chimiques du Canada et à la Commission Lancet sur la pollution et la santé.