Rapport sommaire sur la conférence « Affronter le racisme et traiter des droits de la personne en situation de pandémie »

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Rapports de recherche
Sujet
Droits de la personne

INTRODUCTION

La pandémie de COVID-19 génère une crise sur le plan des droits de la personne au Canada et dans le monde entier. Les segments de la société les plus vulnérables au racisme, à la haine, à la discrimination et à l’exclusion sont également les plus touchés par la pandémie. Les communautés racisées et les Autochtones, ainsi que les minorités religieuses, font partie des groupes les plus touchés en raison de l’héritage et des effets continus du colonialisme, de la discrimination et du racisme systémique. Sans l’adoption d’une approche fondée délibérément sur les droits de la personne et d’une perspective éthique antiraciste, les réactions à la crise et les mesures de rétablissement postpandémie continueront à accroître les inégalités existantes et à menacer des vies partout au pays.

Le 16 septembre 2020, le Secrétariat fédéral de lutte contre le racisme (Secrétariat fédéral) s’est associé à la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) pour tenir un événement virtuel qui a réuni des défenseurs et des spécialistes de différentes disciplines dans le but de sensibiliser les gens aux répercussions négatives disproportionnées de la COVID-19 sur les communautés racisées, les Autochtones et les minorités religieuses au Canada. Les personnes invitées à titre de conférencières et conférenciers ont offert des perspectives provocatrices pour inciter les participants à envisager un rétablissement postpandémie véritablement inclusif et fondé sur les droits de la personne. Le rapport sommaire présente leurs conclusions et recommandations.

CÉRÉMONIE ET OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES

L’aînée Claudette Commanda, professeure à la faculté de droit de l’Université d’Ottawa, prononce une prière d’ouverture pour rendre hommage aux ancêtres du territoire où a lieu la conférence et pour souhaiter, à tous et à toutes, la bienvenue sur la terre natale de la Nation Algonquine Anishinabeg. Après avoir remercié l’aînée Commanda, la présidente de la CCDP, Marie Claude Landry, présente ses observations préliminaires en soulignant la gravité et l’omniprésence du racisme au Canada. Elle rappelle aux personnes présentes que ces problèmes ne se limitent pas aux États-Unis et que toute mesure qui se veut efficace doit prendre racine dans une écoute continue et un apprentissage continu. Les dernières observations préliminaires sont celles de Peter Flegel, directeur du Secrétariat fédéral, qui se dit inquiet des incidents haineux ayant ciblé récemment les Canadiennes et Canadiens d’origine asiatique qui seraient responsables de la pandémie selon certaines personnes, d’une part, et de la montée de l’islamophobie au Canada, d’autre part. M. Flegel soutient que, partout au pays, des intervenantes et des intervenants insistent sur la nécessité absolue d’avoir une perspective antiraciste pour conseiller le gouvernement quant aux mesures à prendre au moment même où le Canada essaie de se sortir de la pandémie.

ALLOCUTIONS D’OUVERTURE : « VISION : ENVISAGER UN RÉTABLISSEMENT ÉQUITABLE ET PROSPÈRE POUR TOUS »

WES HALL

Wes Hall, innovateur, entrepreneur et philanthrope bien connu, prend la parole en premier. Il présente d’abord une vidéo sur l’Initiative BlackNorth, un projet mené par des entreprises pour « mettre fin au racisme systémique ayant un impact sur tous les aspects de la vie des Noirs [...] en suivant [une] approche calquée sur celle du monde des affaires ».1 Il explique comment l’indignation soulevée récemment par la mort de George Floyd l’a amené à rassembler des dirigeantes et dirigeants d’entreprises pour se pencher sur la représentation des Noirs aux conseils d’administration et à des postes de cadre au Canada. Les dirigeantes et dirigeants d’entreprise qui ont accepté de participer à l’Initiative BlackNorth reconnaissent l’ampleur du racisme anti-Noirs, ses répercussions sur les personnes noires du Canada et la nécessité de créer des perspectives d’avenir pour les personnes noires dans les entreprises.2 M. Hall cite des données tirées du document intitulé « Les relations raciales au Canada 2019 », un rapport d’enquête publié par Environics qui suggère l’existence d’un écart entre le racisme vécu par les personnes noires du Canada et le déni de cette réalité par les personnes non noires du Canada.3 Son allocution a mis l’accent sur quatre grands aspects du racisme systémique.

  1. Perspectives d’emploi et soutien du revenu Les données suggèrent que les personnes noires du Canada ont moins de chances d’être retenues lors d’un processus d’embauche et que les effectifs noirs voient leur progression professionnelle ralentie et sont sujets à des niveaux d’intégration plus faibles.4

  2. Services de santé et services communautaires Comparativement aux autres groupes, les données suggèrent que la population noire a moins accès aux soins de santé physique et mentale,5 un problème dont on voit les répercussions pendant la pandémie de COVID-19 alors les communautés noires et les autres communautés racisées sont les plus touchées.6 Les données suggèrent aussi que les femmes noires subissent davantage différentes formes d’iniquités.7

  3. Développement des enfants et des jeunes Les données suggèrent que les élèves noirs réussissent moins bien à l’école.8

  4. Services de police Les données suggèrent que les services de police mènent trop d’interventions dans la communauté noire et qu’ils font du profilage racial des Noirs. À Toronto, les communautés noires sentent que les policiers ont des préjugés importants les concernant.9

M. Hall souligne l’avantage du Canada en matière de diversité culturelle et fait valoir que cela pourrait être un avantage concurrentiel en particulier à un moment où nous avons besoin des plus grands esprits pour aider à la reprise économique. Selon lui, si le Canada arrive à régler son problème de racisme systémique, les gens viendront au Canada parce qu’ils y verront un avantage concurrentiel.

LARRY ROUSSEAU

Larry Rousseau, vice-président exécutif du Congrès du travail du Canada, parle de la contribution des travailleurs essentiels à la pandémie : les personnes qui travaillent dans le secteur de la santé et dans les épiceries, le personnel d’entretien... des emplois bien souvent occupés par des femmes et en particulier des femmes racisées. Dans la main-d’œuvre, les minorités racisées font encore l’objet de disparités salariales, en plus des pratiques abusives des employeurs durant la pandémie, comme le refus d’accorder des congés de maladie au personnel de la santé publique. M. Rousseau souligne aussi qu’il importe pour le mouvement ouvrier d’appliquer des modèles intersectionnels pour soutenir tous les groupes visés par l’équité au moyen de la collecte de plus de données désagrégées. Dans ce contexte, les syndicats ont lancé une campagne de mobilisation de la population canadienne en faveur de meilleurs emplois, soins de santé et services sociaux ainsi que de logements abordables.10

GINA WILSON

Gina Wilson est une Algonquine qui a amorcé sa carrière dans sa Première Nation comme directrice générale de la santé et des services sociaux. Elle a ensuite occupé différents postes à Service correctionnel du Canada et à Sécurité publique Canada. Elle a été nommée sous-ministre des Femmes et de l’Égalité des genres en 2017, sous-ministre de Sécurité publique Canada en 2019 et sous-ministre de la Diversité, de l’Inclusion et de la Jeunesse en 2020. Mme Wilson commence son exposé en rendant hommage aux femmes et aux filles autochtones disparues et assassinées, estimant quecet enjeu est au cœur même du racisme pur et simple que l’on voit au Canada. Partant de ce principe, elle donne son point de vue sur la réconciliation et la guérison, en encourageant les fonctionnaires à prendre conscience que personne n’est à l’abri du racisme systémique et à faire ce qu’il faut aussi bien à l’échelle de leur organisation que sur le plan personnel. Parmi les initiatives dignes de mention du Secrétariat fédéral, elle souligne le groupe de travail sur la COVID-19, qui représente 25 ministères et organismes fédéraux, ainsi qu’une série d’assemblées publiques virtuelles ayant pour but de demander à divers groupes en quête d’équité de faire leurs recommandations aux 25 ministères et organismes. Selon Mme Wilson, le gouvernement devra à l’avenir mieux intégrer la perspective d’équité entre les genres dans ses activités quotidiennes.

GROUPE DE SPÉCIALISTES : À QUOI RESSEMBLERA LA SOCIÉTÉ CANADIENNE APRÈS LA PANDÉMIE?

Kathy Hogarth, Ph. D., professeure agrégée à l’École de service social de l’Université de Waterloo, agit comme modératrice de la discussion axée sur une série de questions posées au groupe composé des personnes suivantes :

  • Alex Neve, membre d’Amnistie internationale depuis 1985 et secrétaire général d’Amnesty International Canada de 2000 à 2020;

  • Diane Brisebois, présidente et chef de la direction du Conseil canadien du commerce de détail depuis 1995;

  • Josephine Wong, Ph. D., professeure à l’École des sciences infirmières Daphne-Cockwell de l’Université Ryerson; son enseignement est axé sur la santé en milieu urbain afin de mettre l’accent sur la violence historique et structurelle, le racisme systémique et d’autres formes d’oppression qui entraînent d’inévitables disparités sociales et sanitaires;

  • Marjorie Villefranche, directrice générale de la Maison d’Haïti, un établissement communautaire dont les activités sont axées sur l’éducation et l’intégration des familles immigrantes à Montréal;

  • Sheila Block, économiste principale et commentatrice pour le Centre canadien de politiques alternatives.

DANS QUELLE MESURE LE PAYSAGE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DU CANADA SERA-T IL SIMILAIRE OU DIFFÉRENT APRÈS LA PANDÉMIE? QUE DEVONS-NOUS FAIRE DIFFÉREMMENT?

Sheila Block rappelle que, au début de la pandémie, on avait la certitude que la situation serait un vecteur d’égalité, tant du point de vue de la santé que de l’économie. Dans les faits, les expériences ne sont pas les mêmes pour tout le monde et ont parfois même été exacerbées par la crise. Certaines personnes peuvent travailler à partir de leur domicile, ce qui leur fait économiser de l’argent, mais de nombreuses personnes qui travaillent à faible salaire ou qui occupent des postes essentiels sont confrontées à des pertes d’emploi ou à de la précarité en emploi, ce qui représente un risque pour leur propre santé et celle de leur famille. Ces problèmes ont particulièrement touché les femmes et les communautés racisées. Comme il a fallu que tous les ordres de gouvernement interviennent pour soutenir les familles et maintenir les services, un désengagement gouvernemental aggraverait les inégalités.

Selon Diane Brisebois, les secteurs du commerce de détail et du service sont touchés par la crise et continueront de l’être. Il y a eu de nombreuses faillites et des changements dans les modèles opérationnels. Des milliers d’emplois ont été perdus ce qui a eu de profondes répercussions économiques et sociales pour le pays. Les difficultés que nous devons surmonter ont intensifié le contrecoup des grands changements en cours dans l’industrie, notamment la tendance au magasinage en ligne et à l’utilisation de nouvelles technologies qui remplacent une partie de la main-d’œuvre.

Cet aspect était crucial pour les discussions de la conférence étant donné que le commerce de détail est souvent un portail vers le marché de l’emploi pour de nombreuses personnes qui viennent d’immigrer au Canada, qui sont jeunes ou qui sont racisées pour y acquérir une expérience de travail leur permettant d’améliorer leur profil économique.

À QUEL POINT CERTAINES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES MISES EN ŒUVRE PENDANT LA PANDÉMIE ONT ELLES EU DES RÉPERCUSSIONS DISPROPORTIONNÉES SUR LES COMMUNAUTÉS?

Selon Alex Neve, dès le début de la pandémie, les restrictions et les lois ont eu des répercussions disproportionnées sur les groupes vulnérables, un aspect largement documenté par Amnesty International Canada. Il avance que la crise a seulement pour effet de rendre visibles des vulnérabilités évidentes et profondes qui existent depuis longtemps et qui prennent racine dans le racisme, le sexisme, la pauvreté et l’inégalité. Il faut particulièrement s’inquiéter de trois catégories de dispositions législatives :

  • les restrictions concernant l’isolement, la quarantaine, le confinement et l’obligation de maintenir une distanciation physique ont des répercussions disproportionnées sur les personnes âgées, les femmes dans leur sphère professionnelle et conjugale, et les personnes migrantes qui travaillent;

  • le recours aux services de police pour appliquer ces restrictions a des répercussions disproportionnées sur les personnes noires, autochtones et racisées qui sont alors sans aucun doute ciblées;

  • la fermeture de la frontière a des répercussions sur les personnes qui se trouvent aux États-Unis, mais qui souhaitent immigrer ou demander l’asile au Canada.

Pour Marjorie Villefranche, les dispositions législatives sont en elles-mêmes une forme de racisme systémique puisqu’elles ne tiennent pas compte de la difficulté pour des familles immigrantes à respecter la règlementation, comme les familles nombreuses et multigénérationnelles qui vivent dans de petits logements. De plus, la quarantaine ne protège pas les personnes qui occupent des emplois ou donnent des soins essentiels, dont une proportion écrasante de femmes et de personnes racisées.

COMMENT PENSEZ-VOUS QUE LES CONSIDÉRATIONS LIÉES AUX DROITS DE LA PERSONNE, À LA LUTTE CONTRE LE RACISME ET À L’ÉQUITÉ FAÇONNERONT LE RÉTABLISSEMENT À VENIR?

Alex Neve estime que les considérations doivent faire bien plus que simplement définir le rétablissement : elles doivent opérer une transformation nationale et mondiale qui commence par un véritable respect des droits de la personne. Plus précisément, il faudra lutter contre le racisme, favoriser la réconciliation avec les Autochtones, appliquer une approche féministe et analyser les enjeux dans une perspective intersectionnelle.

Marjorie Villefranche établit un lien entre les répercussions de la COVID-19 sur les communautés racisées et les déterminants sociaux de la santé. Elle invite les participants à voir le racisme systémique comme élément central dans ce processus et à trouver des mesures particulières pour atténuer le problème.

Sheila Block apporte une perspective économique à la discussion en expliquant que nous ne pouvons pas amorcer une reprise économique sans remédier aux inégalités économiques aggravées par la pandémie. Par exemple, le Roosevelt Institute a publié un rapport affirmant que mettre la blanchité (ou blanchitude) au centre des politiques et de leur processus d’élaboration nuit à la population, au potentiel économique des États-Unis et au rétablissement postpandémie.11

QUE DEVRAIENT FAIRE LES GOUVERNEMENTS POUR ATTÉNUER LES INÉGALITÉS À L’AVENIR? POURQUOI N’ONT ILS RIEN FAIT APRÈS LA CRISE DU SRAS?

Josephine Wong invite les personnes présentes à aborder la pandémie sans se limiter à ce qui se passe en ce moment, mais en s’appuyant aussi sur le passé. L’éclosion du SRAS eu pour effet de préparer les gouvernements à faire face à la présente pandémie de COVID-19 en tant que maladie biomédicale, on a oublié que la crise du SRAS avait amplifié le racisme systémique. Cette année, de nombreuses personnes d’origine asiatique au Canada ont encore une fois subi du racisme en lien avec la pandémie, et certains groupes en quête d’équité sont plus touchés que d’autres. Cela nous rappelle que même si les ressources allouées pour atténuer les conséquences du virus sont réparties également, la pandémie, elle, n’affecte pas tous les groupes de la même manière. Inversement, comme la maladie constitue une menace pour l’ensemble de la population canadienne, les personnes dont le statut d’immigration est précaire ou dont la couverture des soins de santé est faible peuvent, pour la première fois, avoir accès à de meilleurs services. Mme Wong invite les personnes présentes à se poser les questions suivantes : Dans quel genre de monde voulons-nous vivre? Quelles politiques pouvons-nous mettre en place pour améliorer la situation?

QUELLES SERONT LES RÉPERCUSSIONS À LONG TERME DE LA PANDÉMIE SUR LA SANTÉ MENTALE?

Tout le monde doit se préoccuper de sa santé mentale pendant la pandémie, mais Josephine Wong souligne que les personnes plus privilégiées ou aisées ont moins de sujets de préoccupation et qu’elles risquent donc moins de souffrir de problèmes de santé mentale. Le racisme joue un rôle à ce chapitre; les communautés asiatiques ont été dévastées par la violence dont elles ont fait l’objet. De plus, le système de santé néglige certains segments de la population, comme les personnes âgées qui n’ont pas accès à l’information aussi facilement que d’autres, les personnes avec des problèmes de santé mentale préexistants et les personnes racisées qui se sentent mises en marge quant à l’accès aux services. Un autre problème touche les personnes qui ne peuvent pas s’isoler physiquement ou qui vivent dans des petits logements avec leurs proches, par exemple celles qui travaillent dans des centres d’hébergement et de soins de longue durée, ce qui peut générer de la culpabilité ou de la détresse. Dans l’ensemble, la pandémie alourdit la charge mentale pour les membres des communautés racisées et le rétablissement nécessitera un effort collectif fondé sur l’amour et la gentillesse.

LA PANDÉMIE A-T ELLE EU POUR EFFET DE MODIFIER NOTRE DÉFINITION ET NOTRE COMPRÉHENSION D’UNE TRAVAILLEUSE ESSENTIELLE OU D’UN TRAVAILLEUR ESSENTIEL?

Diane Brisebois soutient que la crise a relancé la conversation sur le salaire minimum et le salaire vital comme elle a poussé les gens à reconnaître l’importance des personnes qui occupent un emploi de première ligne dans tous les secteurs d’activités. La seule façon d’aborder correctement la question passe par une étroite collaboration entre employeurs et décideurs politiques des provinces et territoires, pour éviter qu’une discussion politique ou économique ne crée des dissensions. Mme Brisebois abonde dans le sens des autres spécialistes concernant le racisme vécu par les communautés racisées et ajoute que des membres racisés du Conseil canadien du commerce de détail ont subi de graves incidents de harcèlement ces derniers mois.

Marjorie Villefranche réoriente la discussion vers la définition d’un travailleur essentiel qui s’est élargie depuis le début de la pandémie. Les personnes qui travaillent dans le secteur de la santé, les premières intervenantes et premiers intervenants sont habituellement considérés comme des travailleuses essentielles et des travailleurs essentiels, mais cette catégorie inclut maintenant les personnes

qui travaillent dans le secteur de l’alimentation, du nettoyage, de la garde d’enfants, etc. Tandis que beaucoup de gens sont restés en sécurité grâce au confinement, les personnes effectuant un travail essentiel mettaient leur vie en danger, soit en majorité des personnes racisées et immigrantes au Canada ainsi que de nombreuses personnes réfugiées au Canada. Bref, ce sont des gens de couleur qui ont assuré les services essentiels durant la pandémie.

Selon Alex Neve, la crise montre la vulnérabilité des personnes qui ont un statut d’immigration précaire, ce qui mène à des violations des droits de la personne parce que ces personnes ont difficilement accès aux mesures de protection en emploi et aux services de soins de santé. La crise a aussi mis en évidence le rôle joué par les personnes ayant un statut d’immigration précaire dans l’économie et la société. Il faut donc élargir l’accès à la régularisation du statut de ces personnes migrantes.

QUELS SONT LES MOYENS CONCRETS DE FAIRE PROGRESSER NOTRE RÉFLEXION SUR LE RENFORCEMENT DES DROITS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX?

Sheila Block propose que les gouvernements adoptent des lois qui renforcent les droits dans le domaine du travail, notamment en ce qui concerne les congés de maladie, la définition « d’employé », les heures supplémentaires, etc. Les travailleuses et travailleurs doivent aussi pouvoir compter sur l’application de dispositions législatives en vigueur.

Josephine Wong suggère que, en plus d’exiger une réforme gouvernementale, il faudrait inviter la population canadienne à remettre en question le statu quo en matière de logement et de garde d’enfants, par exemple. Les mouvements politiques populaires doivent être un élément crucial du processus de changement.

Diane Brisebois propose que les gouvernements adoptent une perspective d’équité pour concevoir des programmes d’aide qui donnent généreusement aux organisations commerciales.

Alex Neve soutient que le Canada doit reconnaître que les droits économiques et sociaux sont des droits de la personne, remédier aux lacunes de longue date en matière de données désagrégées et adapter ses engagements pour créer des politiques plus équitables.

Marjorie Villefranche convient que, même s’il y a beaucoup de travail à faire en matière de politiques, il faut songer à renforcer les capacités des organisations communautaires et locales qui sont si vulnérables en contexte de pandémie.

CONCLUSION

Peter Flegel remercie les personnes ayant prononcé une allocution et les membres du groupe de spécialistes pour la discussion enrichissante et explique le rôle unique du Secrétariat fédéral au sein du gouvernement du Canada. Le Secrétariat a comme mandat de surveiller les répercussions des lois sur les communautés marginalisées et veille à ce que les ministères appliquent des critères antiracistes dans l’exécution de leur mandat et de leurs programmes. Le Secrétariat fédéral est aussi engagé dans un dialogue avec des organisations locales afin de promouvoir la cause. Marie Claude Landry conclut la séance en invitant toutes les personnes présentes à contribuer à ce dialogue crucial et au changement. Elle exhorte les participants à continuer d’écouter, d’apprendre, de demander des données utiles, d’encourager la prise de mesures concrètes, de sensibiliser nos leaders et de galvaniser les jeunes générations de brillants esprits.

ANNEXE : BIOGRAPHIES

WES HALL, PRÉSIDENT-DIRECTEUR DE KINGSDALE ADVISORS

Wes Hall est un innovateur, un entrepreneur et un philanthrope bien connu. En tant que président- directeur et fondateur de Kingsdale Advisors, il est reconnu comme l’un des hommes d’affaires les plus influents du Canada. M. Hall est également propriétaire de QM Environmental, un fournisseur de services environnementaux et industriels de premier plan; de Titan Supply, un grand fabricant et distributeur d’équipement d’arrimage et de produits d’usure pour des entreprises des industries du pétrole, de la construction et du transport; et de l’hôtel Harbor Club (Curio Collection de Hilton), l’un des principaux complexes touristiques de Sainte-Lucie.

M. Hall reçoit en 2009 le prix d’Entrepreneur de l’année d’Ernst & Young pour la région de l’Ontario (Canada) et en 2011 le titre « IAS. A » décerné par l’Institut des administrateurs de sociétés en partenariat avec l’École de gestion Rotman de l’Université de Toronto. En 2020, M. Hall devient membre du groupe de travail sur la modernisation relative aux marchés financiers du gouvernement de l’Ontario, un groupe consultatif de cinq spécialistes ayant pour mandat de revoir et de moderniser la réglementation des marchés financiers de la province.

M. Hall est reconnu pour sa générosité. Il met sa réussite commerciale au service des autres grâce à d’importantes initiatives caritatives. Il est président et fondateur du Conseil canadien des chefs d’entreprise contre le racisme systémique envers les Noirs et de l’Initiative BlackNorth qui vise à éliminer les obstacles systémiques anti-Noirs qui ont des répercussions négatives sur la vie de la population noire du Canada.

M. Hall est aussi directeur de la fondation SickKids et membre du conseil d’administration de Pathways to Education et du Festival international du film de Toronto. Il a changé la vie de milliers d’enfants dans les Caraïbes où il fait don de son argent et de son temps. En 2015, M. Hall reçoit le prix du vice-chancelier et en 2017, un doctorat honorifique; ces deux prix lui sont décernés par l’University des West-Indies.

GINA WILSON, DEPUTY MINISTER OF DIVERSITY AND INCLUSION AND YOUTH

Gina Wilson est Algonquine et commence sa carrière dans sa communauté de la Première Nation de Kitigan Zibi à titre de directrice générale de la santé et des services sociaux et directrice du centre de traitement de Wanaki. Mme Wilson est cadre supérieure à l’Assemblée des Premières Nations lorsqu’elle fait son entrée au gouvernement fédéral en 1996. Elle y occupe pendant cinq ans le poste de directrice générale des Affaires autochtones au Service correctionnel du Canada.

En 2006, Mme Wilson est nommée sous-ministre adjointe de Résolution des questions des pensionnats indiens Canada puis, de 2011 à 2013, sous-ministre adjointe du Secteur de la gestion des mesures d’urgence et des opérations régionales de Sécurité publique Canada. En 2014, elle devient sous-ministre adjointe principale, Secteur des traités et du gouvernement autochtone, pour Affaires autochtones et Développement du Nord Canada.

En mars, Mme Wilson est nommée sous-ministre déléguée à Emploi et Développement social Canada. Puis, de 2015 à 2017, elle est sous-ministre déléguée de Sécurité publique Canada. Le 23 mai 2017, elle devient sous-ministre des Femmes et de l’Égalité des genres et c’est dans ce poste qu’elle dirige la création du nouveau ministère et travaille à l’institution complète de l’ACS+ au sein du gouvernement.

En 2019, elle est nommée sous-ministre de Sécurité publique Canada, ce qui marque son troisième passage dans ce ministère.

En janvier 2020, Gina se voit confier la direction de certaines initiatives pangouvernementales concernant la jeunesse, les LGBTQ2, la lutte contre le racisme, le multiculturalisme et le savoir autochtone. Elle appuie Patrimoine canadien à titre de sous-ministre déléguée principale tout en exécutant ses fonctions de sous-ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse.

Mme Wilson joue un important rôle de leadership en tant que sous-ministre championne des fonctionnaires fédéraux autochtones et reçoit le prix Indspire de 2020 pour l’ensemble de son leadership et de son travail sur les enjeux autochtones et pour son soutien au personnel autochtone.

LARRY ROUSSEAU, VICE-PRÉSIDENT EXÉCUTIF DU CONGRÈS DU TRAVAIL DU CANADA

Larry Rousseau est élu vice-président exécutif du Congrès du travail du Canada (CTC) lors de la 28e convention constitutionnelle du CTC, en mai 2017. Auparavant, il avait été vice-président directeur régional de l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) – Région de la capitale nationale ainsi que vice-président régional du Syndicat des employées et employés nationaux de l’AFPC.

La première expérience de M. Rousseau au sein du mouvement ouvrier, la plus importante à ses yeux, survient lorsqu’il a 18 ans et qu’il est engagé comme commis d’entrepôt et préposé au classement pour la salle du courrier du CTC. Peu de temps après, il est élu délégué syndical pour la section locale 225 du Syndicat international des employés professionnels et de bureau (aujourd’hui le Syndicat canadien des employées et employés professionnels et de bureau).

M. Rousseau est ensuite embauché par Statistique Canada où il travaille encore à ce jour. Il est titulaire d’un certificat en droit civil décerné par la Section du droit civil de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa. Il détient aussi une maîtrise en administration publique de l’École nationale d’administration publique du Québec.

M. Rousseau mène depuis longtemps des activités de militantisme politique et de défense des syndicats en particulier pour des questions liées aux relations de travail, à la santé et la sécurité, aux droits de la personne et à l’équité. Sa participation aux mouvements LGBTQ2SI, antiraciste et pacifiste fait partie intégrante de son engagement et de son dévouement à l’égard de la justice sociale. 

SHEILA BLOCK, ÉCONOMISTE PRINCIPALE POUR LE CENTRE CANADIEN DE POLITIQUES ALTERNATIVES

Sheila Block est économiste principale et commentatrice au Centre canadien de politiques alternatives. Ses recherches portent sur le marché du travail, les finances publiques et l’inégalité au Canada. Avec le professeur Grace Edward Galabuzi, Mme Block a coécrit la série de documents « Canada’s Colour Coded Labor Market ». Mme Block est titulaire d’un baccalauréat avec spécialisation en économie de l’Université de Colombie-Britannique et d’une maîtrise en économie de l’Université de Toronto. 

KATHY HOGARTH, PH. D., PROFESSEURE AGRÉGÉE DE L’ÉCOLE DE SERVICE SOCIAL DE L’UNIVERSITÉ DE WATERLOO

Kathy Hogarth est professeure agrégée à l’École de service social. Ses recherches, ses services et son enseignement portent principalement sur la race critique, le racisme et l’équité au Canada et à l’étranger.

En plus de son portefeuille universitaire, Mme Hogarth est vice-présidente de l’Association canadienne pour la formation en travail social et présidente de l’Association des écoles de travail social d’Amérique du Nord et des Caraïbes. Elle est conseillère, conférencière et formatrice dans le domaine de l’équité et de la race. L’une de ses dernières publications est un ouvrage intitulé « A Space for Race: Decoding Racism, Multiculturalism, and Post-colonialism in the Quest for Belonging in Canada and Beyond ».

ALEX NEVE, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL D’AMNESTY INTERNATIONAL CANADA

Alex Neve croit en un monde où les droits de la personne de tous les peuples sont protégés. Il est membre d’Amnistie internationale depuis 1985 et occupe le poste de secrétaire général d’Amnesty International Canada (section anglophone) depuis 2000. À ce titre, il effectue de nombreuses missions de recherche en droits de la personne partout en Afrique, en Asie et en Amérique latine, et plus près de chez nous dans des endroits comme la Première Nation de Grassy Narrows, dans le nord-ouest de l’Ontario, et Guantánamo Bay. M. Neve s’adresse à des auditoires de tout le pays sur un large éventail de questions relatives aux droits de la personne, témoigne régulièrement devant des comités parlementaires et des organes des Nations Unies, et agit fréquemment à titre de commentateur dans les médias.

M. Neve est avocat et titulaire d’un baccalauréat en droit de l’Université Dalhousie ainsi que d’une maîtrise en droit international en matière de droits de la personne décerné par l’Université d’Essex. Durant sa carrière, il devient membre de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, enseigne à l’École de droit Osgoode Hall et à l’Université d’Ottawa, est affilié au Centre d’études sur les réfugiés de l’Université York, et travaille comme avocat chargé de représenter des réfugiés dans un cabinet privé et dans un service d’aide juridique communautaire. II est membre du conseil d’administration de Partenariat Afrique Canada, du Centre canadien pour la justice internationale et du Centre pour le droit et la démocratie. M. Neve a reçu le titre d’officier de l’Ordre du Canada et de mentor de la Fondation Trudeau. De plus, il est récipiendaire de la Médaille du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II ainsi que de doctorats honorifiques en droit de l’Université St. Thomas, de l’Université de Waterloo et de l’Université du Nouveau-Brunswick.  

DIANE BRISEBOIS, PRÉSIDENTE ET CHEF DE LA DIRECTION DU CONSEIL CANADIEN DU COMMERCE DE DÉTAIL

Diane J. Brisebois est présidente et chef de la direction du Conseil canadien du commerce de détail (CCCD) depuis 1995. Avant de se joindre à l’équipe du CCCD, elle occupe pendant 14 ans le poste de présidente et directrice générale de l’Association canadienne des produits de bureau. Mme Brisebois est depuis plus de 38 ans à la tête d’associations du secteur de la vente au détail au Canada.

Le CCCD est la plus grande association de commerce de détail du pays. Elle représente plus de 45 000 points de vente de toutes formes et de toutes tailles, d’un océan à l’autre. Les membres du CCCD représentent tous les segments du commerce de détail, y compris les marchandises générales, les épiceries et les pharmacies, ce qui englobe plus de 70 % de la totalité des ventes au détail du Canada, à l’exception des ventes d’automobiles et de gaz.

JOSEPHINE WONG, PH. D., PROFESSEURE À L’ÉCOLE DES SCIENCES INFIRMIÈRES DAPHNE-COCKWELL DE L’UNIVERSITÉ RYERSON

Josephine Pui Hing Wong a une vaste expérience dans le domaine des services essentiels de santé publique et de santé urbaine. Son expérience comprend l’élaboration de politiques sur l’équité et l’accès aux services de santé publique ainsi que de cadres de pratiques inclusifs. Elle est professeure et titulaire de la chaire de recherche en santé urbaine de l’École des sciences infirmières Daphne-Cockwell (faculté de services communautaires) de l’Université Ryerson. Son enseignement porte surtout sur les soins infirmiers en santé communautaire ainsi que sur la promotion de la santé des personnes en milieu urbain, et elle s’efforce de souligner la violence structurelle historique et contemporaine, le racisme systémique et les autres formes d’oppression qui entraînent des disparités sociales et de santé évitables. En plus d’enseigner, Mme Wong collabore avec des partenaires communautaires pour établir d’importants cercles d’apprentissage communautaire-universitaire qui rassemblent des membres de la communauté, des fournisseurs de services et des étudiants à des fins de discussion, d’échange des connaissances et de rédaction collaborative.

Le programme de recherche de Mme Wong s’appuie sur les principes de la justice sociale et de l’équité. Elle s’engage à mener ses recherches « avec » les communautés visées et non « pour » elles. Dans ses recherches, elle s’efforce de répondre aux questions « puis alors? » et « puis après? ». Consciente qu’il est nécessaire et urgent d’aller au-delà de la compréhension des manifestations précises liées aux inégalités en matière de santé, Mme Wong travaille étroitement avec les communautés touchées pour trouver des solutions novatrices sur le plan social qui favoriseront la résilience collective et

le changement. Les domaines de recherche de Mme Wong comprennent : les identités sociales et l’organisation sanitaire, le VIH, la santé en matière de sexualité et la santé mentale dans les collectivités diasporiques et transnationales. Elle a dirigé de nombreuses études d’intervention sur la réduction de la stigmatisation et la promotion de la santé mentale auprès des communautés asiatiques, noires et latinos du Canada ainsi que d’étudiants universitaires en Chine, et elle continue de le faire. À l’heure actuelle, Mme Wong dirige une recherche en matière d’intervention rapide qui est financée par le Fonds Nouvelles frontières en recherche et vise à atténuer les répercussions psychosociales négatives de la pandémie de COVID-19 sur les communautés marginalisées torontoises. 

MARJORIE VILLEFRANCHE, DIRECTRICE GÉNÉRALE DE LA MAISON D’HAÏTI

Marjorie Villefranche est directrice générale de la Maison d’Haïti. Sa participation à la lutte contre le racisme et la discrimination lui permet de rester à l’avant-plan dans le contexte actuel. C’est avec une énergie inépuisable que Mme Villefranche fait avancer les dossiers des femmes immigrées et des personnes migrantes sans papiers. Spécialiste de l’histoire de la communauté haïtienne, elle participe en 2014 au projet Histoires d’immigrations mené par l’UQAM et Bibliothèque et Archives nationales du Québec.

Depuis 2017, Mme Villefranche est également membre à temps partiel de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec (mandat jeunesse).

Mme Villefranche a reçu plusieurs prix, dont le prix de la Bâtisseuse de la cité (2017), le prix Personnalité de la semaine de La Presse-Radio Canada (2012) et le prix Femme de mérite – catégorie Éducation, de la Fondation YWCA (2008).