Approche fondée sur les droits de la personne pour les enquêtes en milieu de travail

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Milieu de travail

Orientations et bonnes pratiques pour aider les employeurs sous réglementation fédérale à en savoir plus sur ce qui est requis pour mener des enquêtes en milieu de travail d'une manière qui respecte les droits de la personne et favorise un milieu de travail sain et inclusif.

No de catalogue : HR4-107/2023F-PDF

ISBN: 978-0-660-68422-2

Table des matières

Introduction

Le harcèlement et la violence en milieu de travail créent des obstacles systémiques à l'égalité en matière d'emploi. Ils peuvent causer des dommages psychologiques, émotionnels et physiques importants et durables aux personnes touchées. Ils peuvent avoir des conséquences profondes sur la dignité d'une personne et nuire à sa capacité à gagner sa vie, à se sentir en sécurité et à faire partie intégrante de la société. Si l'on n'intervient pas, le harcèlement et la violence en milieu de travail peuvent réduire la productivité et miner le moral, et entraîner une augmentation du roulement du personnel, de l'absentéisme et des coûts des soins de santé. Les enquêtes en milieu de travail sont un moyen important pour un employeur de prévenir et de régler les incidents de harcèlement et de violence en milieu de travail. Le présent guide aidera les employeurs sous réglementation fédérale à en savoir plus sur ce qui est requis pour mener des enquêtes en milieu de travail d'une manière qui respecte les droits de la personne et favorise un milieu de travail sain et inclusif.

Obligation légale de l'employeur

Le 1er janvier 2021, des modifications au Code canadien du travail (Code) et au Règlement sur la prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail (Règlement) sont entrées en vigueur. Ces modifications élargissent considérablement les obligations légales des employeurs sous réglementation fédérale concernant la façon de s'occuper des incidents de harcèlement et de violence en milieu de travail. Avec ses modifications, le Règlement définit les exigences que les employeurs doivent respecter afin de satisfaire à leurs obligations de prévenir les incidents de harcèlement et de violence en milieu de travail, y compris le harcèlement sexuel et la violence sexuelle, d'enquêter, de tenir des registres et de produire des rapports sur de tels incidents, et de fournir une formation dans ce domaine. Tous les employeurs sous réglementation fédérale doivent élaborer une politique de prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail, y compris des directives sur la manière dont le harcèlement des parties principales peut être porté à l'attention de l'employeur. Lorsqu'ils ne prennent pas les mesures appropriées pour prévenir, déceler et faire cesser le harcèlement et la violence en milieu de travail, les employeurs peuvent être tenus responsables tant sur le plan juridique que financier. 

Les obligations légales d'un employeur sous réglementation fédérale en vertu du Code et du Règlement vont de pair avec ses obligations en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP). Dans le présent guide, nous faisons spécifiquement référence aux obligations légales de l'employeur de prendre les meilleures mesures possibles pour prévenir et faire cesser le harcèlement, y compris le harcèlement sexuel en milieu de travail1. En vertu de la LCDP, les employeurs sont tenus : 

  1. de prendre des mesures raisonnables et appropriées pour promouvoir le respect de la LCDP et d'autres lois. Les employeurs ont l'obligation de favoriser une culture et un environnement de travail sans harcèlement ni harcèlement sexuel. Il s'agit notamment d'élaborer des politiques de prévention du harcèlement, un mécanisme de traitement des plaintes et des mesures visant à rétablir le milieu de travail après une enquête;  
  2. de prendre des mesures efficaces sans délai pour lutter contre le harcèlement et le harcèlement sexuel en milieu de travail. Cela inclut l'obligation d'enquêter sur les allégations, de protéger les travailleuses et les travailleurs2, de prévenir d'autres incidents de harcèlement et de prendre des mesures nécessaires pour corriger les problèmes et réparer les torts causés lorsque les allégations de harcèlement sont fondées.

Bon pour les affaires aussi

Disposer d'une politique efficace pour prévenir et faire cesser le harcèlement et la violence en milieu de travail n'est pas seulement une obligation légale, c'est aussi une question de bon sens sur le plan des affaires. Cela permet d'avoir un milieu de travail plus sain. Un milieu de travail sain est un lieu où les travailleuses et les travailleurs savent que le harcèlement ou la violence ne seront pas tolérés, et où ces personnes se sentent à l'aise et en sécurité de parler de ces problèmes. 

Pour créer ce type de milieu de travail, il est essentiel de mettre en place un processus d'enquête efficace. Le processus d'enquête est un outil important pour promouvoir l'égalité et lutter contre la discrimination. Des enquêtes équitables et impartiales donnent aux travailleuses et aux travailleurs l'assurance que l'employeur prend au sérieux les allégations de harcèlement et de violence et qu'il s'engage à créer et à maintenir un milieu de travail sûr et respectueux. Il s'agit d'un élément important pour inculquer un sentiment de confiance et de sécurité aux travailleuses et travailleurs. Il envoie un signal dans l'ensemble de l'organisation que les employeurs et les syndicats se tiendront responsables en ce qui concerne leurs obligations en matière de droits de la personne et leurs obligations légales. De plus, cela contribue grandement à créer le type de milieu de travail où les travailleuses et travailleurs compétents veulent travailler.

Personnes susceptibles d'utiliser ce guide

Le présent guide a pour but d'aider les employeurs, les travailleuses et travailleurs et les syndicats sous réglementation fédérale à mieux comprendre leurs droits et obligations en matière d'enquêtes en milieu de travail. Les pratiques recommandées dans le présent guide sont fondées sur les exigences législatives de la LCDP ainsi que sur le Code3

Bien que de nombreux principes relatifs aux droits de la personne présentés ici soient universels, les renseignements spécifiques contenus dans le présent document s'appliquent aux milieux de travail sous réglementation fédérale qui sont régis par la LCDP et le Code. Si votre milieu de travail est réglementé par une province ou un territoire, vous devez consulter la loi provinciale ou territoriale pertinente et les ressources disponibles dans la province ou le territoire où vous travaillez.

Qu'est-ce qu'une enquête en milieu de travail? 

Une enquête en milieu de travail est le processus par lequel un employeur examine un éventuel problème de harcèlement ou de violence en milieu de travail qui a été porté à son attention. L'objectif de l'enquête est de recueillir et d'examiner les renseignements relatifs à l'allégation et de déterminer si le harcèlement ou la violence a effectivement eu lieu. L'enquête, généralement menée par une enquêtrice ou un enquêteur et non par l'employeur, doit également fournir un compte rendu détaillé des mesures appropriées qui ont été prises par les responsables pour traiter la conduite alléguée jusqu'à l'ouverture d'une enquête. Les résultats de l'enquête détermineront les mesures qu'il faudra prendre au besoin pour corriger les problèmes ou réparer les torts en vue de rétablir le milieu de travail. 

Quand un employeur doit-il mener une enquête en milieu de travail?  

Une enquête en milieu de travail doit être menée lorsque : 

  • un employeur a des raisons de croire qu'il y a eu violence, harcèlement ou harcèlement sexuel au travail; 
  • il existe des renseignements ou des allégations qui pourraient (si elles sont prouvées) être considérées comme du harcèlement ou du harcèlement sexuel; 
  • un processus de règlement informel n'est pas approprié ou a été tenté, mais n'a pas abouti à un règlement complet de la situation;
  • un employeur reçoit une plainte anonyme (par écrit ou verbalement)4;
  • un employeur est personnellement témoin d'un possible incident de violence ou de harcèlement en milieu de travail. Dans de tels cas, les employeurs doivent lancer de manière proactive une enquête lorsqu'ils ont des raisons de croire qu'il y a violence, harcèlement ou harcèlement sexuel au travail (ou a eu lieu). Les enquêtes amorcées par l'employeur peuvent constituer un outil important pour cerner de manière proactive les comportements qui peuvent être inappropriés ou discriminatoires. En outre, les employeurs peuvent être tenus légalement responsables s'ils savaient ou auraient dû savoir qu'il y avait du harcèlement ou de la violence dans le milieu de travail, mais n'ont pas pris les mesures appropriées pour prévenir et déceler le comportement problématique, d'enquêter à ce sujet et de faire cesser le comportement en question5.

Qu'est-ce que le harcèlement ou la violence en milieu de travail?

Toutes les plaintes de harcèlement ne nécessitent pas une enquête en milieu de travail. Dans un premier temps, l'employeur doit déterminer si l'allégation répond aux critères de violence ou de harcèlement en milieu de travail en vertu de la LCDP ou du Code, ou des deux. À cette étape, l'employeur ne doit pas essayer de déterminer si les allégations sont vraies. L'employeur doit plutôt se concentrer sur la question de savoir si les renseignements dont il dispose (s'ils sont prouvés) pourraient être considérés comme de la violence ou du harcèlement en milieu de travail en vertu de ces deux lois.

Dans les pages qui suivent, nous fournirons quelques définitions pratiques de ces termes, conformément à la législation en matière de droits de la personne. Cependant, établir la définition de ces termes est complexe. C'est pourquoi nous recommandons à l'employeur de consulter également les autres lois, conventions collectives et politiques du lieu de travail, susceptibles de contenir des définitions du harcèlement, du harcèlement sexuel ou de la violence en milieu de travail. Au final, les définitions contenues dans les lois fédérales ont préséance et s'appliquent à tous les milieux de travail sous réglementation fédérale. Les politiques du lieu de travail et les conventions collectives doivent être conformes aux définitions légales, mais elles peuvent fournir plus de détails ou donner des exemples utiles de ce qui serait considéré comme du harcèlement, etc.  

Pour obtenir des conseils et des définitions supplémentaires concernant les obligations d'un employeur en vertu du Code et du Règlement, veuillez consulter les ressources suivantes fournies par le Programme du travail d'Emploi et Développement social Canada :

Obligations des employeurs pour prévenir le harcèlement et la violence en milieu de travail sous réglementation fédérale. 2020. Gouvernement du Canada https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/sante-securite-travail/prevenir-harcelement-violence.html 

Prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail (PHV) — 943-1-IPG-104 https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/lois-reglements/travail/interpretations-politiques/104-prevention-harcelement-violence.html  

Exemple de politique de prévention du harcèlement et de la violence. 2020. Gouvernement du Canada. https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/sante-securite-travail/prevenir-harcelement-violence/exemple-politique.html 

Exemple de guide de l'utilisateur pour la prévention du harcèlement et de la violence. 2020. Gouvernement du Canada https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/sante-securite-travail/prevenir-harcelement-violence/exemple-guide-utilisateur.htm

Exemple d'outil d'évaluation des risques de harcèlement et de violence au travail. 2021. Gouvernement du Canada. https://www.chttps://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/sante-securite-travail/prevenir-harcelement-vanada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/sante-securite-travail/prevenir-harcelement-violence/outil-evaluation-risques.html

Qu'est-ce que le harcèlement?

Le harcèlement, sous quelque forme que ce soit, a un effet négatif sur le milieu de travail. Lorsqu'il est lié à un ou à plusieurs des motifs de distinction illicite inscrits dans la LCDP, il constitue également une forme grave de discrimination6. Le harcèlement crée des obstacles systémiques à l'égalité dans l'emploi. Les employeurs doivent prendre des mesures pour s'assurer qu'il n'y a pas de harcèlement dans leur milieu de travail. S'ils ne prennent pas les mesures nécessaires pour prévenir, repérer et éliminer le harcèlement en milieu de travail, les employeurs peuvent être tenus responsables sur les plans tant juridique que financier.

Le harcèlement, c'est lorsque quelqu'un dit ou fait quelque chose qui offense ou humilie une autre personne. En général, la personne qui harcèle doit dire ou faire ces choses offensantes à plusieurs reprises, mais un incident grave et isolé peut également être du harcèlement7. Le harcèlement peut être direct ou indirect, évident ou subtil, physique ou psychologique. Il peut se manifester de nombreuses façons, notamment par des mots prononcés, des messages écrits, des gestes et des images. 

Même si une personne n'a pas harcelé quelqu'un volontairement (en ayant l'intention de le faire), son comportement peut quand même constituer du harcèlement. La question est de savoir si une personne raisonnable aurait su que le comportement en question n'était pas approprié.

Sans s'y limiter, les exemples de harcèlement en milieu de travail peuvent inclure :

  • créer un environnement de travail toxique (par exemple, tolérer des commentaires ou des comportements hostiles, insultants ou dégradants);
  • répandre des rumeurs ou des potins à propos d’une personne ou d’un groupe;
  • faire des blagues ou des remarques offensantes;
  • faire de la cyberintimidation (autrement dit menacer, répandre des rumeurs ou parler négativement d’une personne en ligne);
  • proférer des menaces en personne, par téléphone, par courriel ou par un autre moyen contre une travailleuse ou un travailleur (y compris de la part de personnes non associées au lieu de travail, comme une conjointe, un conjoint ou un membre de la famille, lorsque l’incident se produit au cours du travail ou nuit à la sécurité du lieu de travail);
  • jouer des tours non désirés;
  • exclure ou isoler socialement une personne;
  • traquer ou suivre une personne de manière inappropriée;
  • trafiquer ou modifier l’équipement de travail ou les effets personnels d’une personne;
  • vandaliser ou cacher des effets personnels ou du matériel de travail;
  • empêcher délibérément une personne de faire son travail, peu importe le moyen utilisé;
  • critiquer, miner, rabaisser, humilier ou ridiculiser constamment une personne;
  • se mêler de la vie privée d’une personne;
  • ridiculiser ou réprimander une personne en public;
  • provoquer des contacts physiques déplacés;
  • faire des insinuations ou des sous-entendus à caractère sexuel;
  • faire des invitations ou des demandes non désirées et inappropriées, y compris de nature sexuelle;
  • montrer ou diffuser des affiches, des caricatures, des images ou d’autres éléments visuels offensants;
  • faire des gestes agressifs, menaçants ou grossiers;
  • abuser de son pouvoir, comme :
    • changer constamment les directives de travail,
    • ne pas diffuser de l’information,
    • fixer des délais impossibles qui entraîneront un échec,
    • refuser arbitrairement des demandes de congé, de formation ou de promotion;
  • faire des microagressions ou poser des actes subtils d’exclusion.

Les microagressions sont des remarques, des indignités, des rabaissements et des insultes qui sont commis de manière brève, indirecte et quotidienne et qui communiquent des attitudes discriminatoires envers les membres de groupes méritant l'équité. Intentionnelles ou non, elles peuvent être comportementales, verbales ou environnementales. Les personnes qui les subissent peuvent se sentir mal à l'aise, malvenues, insultées ou stigmatisée comme étant « l'autre » et se rappeler douloureusement les stéréotypes associés à leur identité. Par exemple, des microagressions racistes peuvent être, entre autres, le fait de demander avec insistance à une personne racisée d'où elle vient vraiment, de complimenter une personne racisée sur la qualité de son français ou de serrer plus fort son sac en présence d'un homme noir. Les microagressions fondées sur le sexe ou le genre peuvent renforcer les rôles traditionnels fondés sur le genre qui prévalent dans le milieu de travail, comme les privilèges accordés aux hommes et la dominance masculine. Ces microagressions peuvent prendre la forme de commentaires sur l'apparence d'une femme, des commentaires dégradants sur les capacités d'une femme et des suppositions sur l'infériorité des femmes dans certains domaines. Tous ces exemples démontrent des attitudes hostiles, diffamatoires ou négatives envers les femmes. Même s’il n’y a pas d’intention consciente de blesser une personne, les microagressions causent quand même du tort et leurs effets préjudiciables sont cumulatifs puisque les personnes visées subissent ces microagressions à répétition dans leur quotidien.

Autant la LCDP que le Code protègent les travailleuses et les travailleurs dans le milieu de travail.

La LCDP interdit le harcèlement dans l'emploi et dans la prestation de services fondé sur un ou plusieurs de ses 13 motifs de distinction illicite. 

Le Code protège également les travailleuses et les travailleurs contre le harcèlement, y compris le harcèlement qui n'est pas lié à un motif de distinction illicite, comme la violence conjugale. Le Code définit le harcèlement et la violence au paragraphe 122(1) :

Harcèlement et violence – Tout acte, comportement ou propos, notamment de nature sexuelle, qui pourrait vraisemblablement offenser ou humilier [une travailleuse ou un travailleur] ou lui causer toute autre blessure ou maladie physique ou psychologique, y compris tout acte, comportement ou propos réglementaire.

Le harcèlement en milieu de travail ne comprend pas les mesures de gestion appropriées (comme les évaluations de rendement, les directives et les attributions de tâches) si celles-ci sont effectuées équitablement pour des raisons légitimes. Toutefois, une mesure de gestion qui a un effet négatif et qui est fondée sur un motif de distinction illicite peut constituer une forme de harcèlement ou de discrimination. Par exemple, il s'agit d'une pratique discriminatoire si le responsable décide, en raison de la race d'une personne, de l'affecter à une tâche ou à un quart de travail moins intéressants.

Qu'est-ce que le harcèlement sexuel?

Bien que le harcèlement sexuel ne soit pas défini en détail dans la LCDP, il est défini au sens large comme un comportement importun de nature sexuelle susceptible d'offenser ou d'humilier une travailleuse ou un travailleur. Il s'agit d'une pratique dégradante qui porte atteinte à la dignité et au respect de soi de la victime, à la fois en tant que travailleuse ou travailleur qu'en tant qu'être humain. 

Le harcèlement sexuel peut revêtir de nombreuses formes et viser n'importe quel sexe, y compris les hommes, les femmes, les personnes trans, les personnes non binaires ou les personnes de diverses identités de genre.

Sans s'y limiter, les exemples de harcèlement sexuel peuvent inclure : 

  • un contact physique inutile ou non désiré;
  • des questions persistantes, des insinuations ou la diffusion de commérages sur la vie privée d'une personne, comme sa sexualité, son identité ou expression de genre ou sa vie sexuelle;
  • des insultes ou des commentaires dévalorisants concernant le sexe ou le rôle de la personne;
  • le fait de regarder fixement une personne ou des parties de son corps;
  • le fait de traiter une personne différemment parce qu'elle ne se conforme pas au rôle qu'on attend d'elle en fonction de son sexe ou de son genre, comme un rôle traditionnellement occupé par l'autre sexe ou un autre genre; 
  • des invitations répétées à sortir, même si la personne a déjà refusé une telle invitation;
  • des commentaires de nature clairement sexuelle ou des blagues sexistes; 
  • le fait de montrer ou de diffuser des graphiques, des dessins, des courriels, des messages texte, des lettres ou des commentaires offensants;
  • des promesses ou des menaces pour obtenir des faveurs sexuelles; 
  • la création ou le maintien d'un environnement malsain, où les travailleuses et les travailleurs doivent tolérer ou subir des moqueries généralisées liées au sexe ou au genre dans le cadre de la culture du milieu de travail; 
  • tout autre comportement qui pourrait raisonnablement donner à penser que des conditions de nature sexuelle sont rattachées à l'emploi ou aux possibilités d'emploi d'une personne.

Qu'est-ce qu'un milieu de travail empoisonné?

Le concept de milieu empoisonné est étroitement lié au concept de harcèlement discriminatoire, et est de nature systémique. Un environnement de travail empoisonné est un environnement dans lequel des commentaires, des actes ou des microagressions insultants ou dégradants donnent aux personnes ou aux groupes le sentiment que le milieu de travail est hostile ou peu accueillant. Lorsque des commentaires ou des comportements de ce type ont une influence sur les autres et sur la façon dont ils sont traités, on parle d'un environnement empoisonné.

La caractéristique essentielle d'un milieu de travail empoisonné est qu'il est subi par plus d'une personne ou a des répercussions sur plus d’une personne de sorte qu'il peut être considéré comme une pratique, et a un effet néfaste sur les possibilités d'emploi, en particulier pour les travailleuses et travailleurs présentant les caractéristiques communes visées par le comportement.

Qu'est-ce que la violence en milieu de travail?

Le droit du travail fédéral définit la violence en milieu de travail comme des actes, des comportements, des menaces ou des gestes dont on peut raisonnablement s'attendre à ce qu'ils causent un préjudice, une blessure ou une maladie. La violence peut inclure, sans s'y limiter, le fait de poser ou de tenter de poser les gestes suivants :

  • des menaces verbales ou de l'intimidation;
  • des agressions verbales, y compris des jurons ou des cris visant à offenser une personne;
  • des contacts de nature sexuelle;
  • des agressions physiques contre une personne comme des coups de pied ou de poing, des crachats, des égratignures, des morsures, des étreintes, des pincements, des bousculades, des coups ou des blessures peu importe la manière utilisée;
  • des attaques ou des menaces d'attaquer quelqu'un avec n'importe quel type d'arme.

L'intention n'est pas pertinente pour établir une conclusion de harcèlement

Un travailleur autochtone a déclaré qu'il était harcelé par des commentaires, des blagues et des noms racistes de la part de ses superviseurs et de ses collègues. Certains témoins ont affirmé que, même si de telles blagues ou de tels commentaires ont été faits, ils ne l'ont été que dans le but de s'amuser entre amis, sans aucune intention d'offenser. Le Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal) a conclu que l'intention des commentaires n'est pas pertinente : « Le point essentiel est la perception qu'en a la personne qui est victime. »

L'absence d'objections aux commentaires, voire la participation aux « plaisanteries » a été invoquée comme moyen de défense. Le Tribunal a estimé que cela ne signifiait pas que la victime avait consenti aux commentaires, aux blagues et aux noms racistes ou rendu ce comportement acceptable. Selon le témoignage d'un expert, les gens peuvent accepter ce genre de comportement « qu'ils trouvent répréhensible et dégradant parce qu'ils se sentent impuissants à les arrêter et c'est comme un mécanisme de protection de l'ego »… c'est « une forme d'adaptation » (Swan c. Forces armées canadiennes).

Devriez-vous d'abord essayer un règlement informel?

Avant d'entamer le processus d'enquête, il est utile d'examiner si le problème peut être résolu de manière informelle entre les personnes concernées. Le règlement rapide ou informel d'une plainte n'est toutefois pas toujours approprié ou possible. Cela dépendra d'un certain nombre de facteurs : 

  • Comment la partie principale8 souhaite-t-elle que l'affaire soit traitée? La partie principale est le terme technique utilisé dans le droit du travail fédéral pour désigner la personne qui a fait l'allégation. (Dans la loi sur les droits de la personne, elle est appelée le plaignant). Il est également important de savoir comment la partie intimée (la personne accusée de harcèlement ou de violence, ou la personne mise en cause) souhaite que l'affaire soit traitée. Il est essentiel de respecter les besoins des deux parties et de veiller à ce que l'enquête et le processus de règlement informel, ou les deux, ne porte pas atteinte à leur dignité et à leur respect de soi. Par exemple, lorsque la partie principale subit un traumatisme à cause du comportement allégué de la partie intimée, le règlement informel peut être inapproprié.
  • S'il y a un déséquilibre de pouvoir entre la partie principale et la partie intimée. Un déséquilibre de pouvoir peut se produire, par exemple, lorsque la partie intimée est le superviseur de la partie principale ou a la possibilité d'influencer son travail ou son avancement professionnel. Cela peut inclure le cas où la partie principale est un travailleur vulnérable, comme un stagiaire ou un travailleur temporaire, nouveau ou en période d'essai. Dans ces circonstances, une partie principale peut estimer qu'elle ne peut pas participer de manière significative à un processus de règlement informel parce que, par exemple, elle craint des représailles ou estime qu'il n'est pas sûr de faire part de ses préoccupations concernant la partie intimée de cette manière.  
  • La compréhension de l'employeur des circonstances, notamment la nature et la gravité des allégations. Par exemple, un règlement informel ne sera pas approprié si le comportement allégué de la partie intimée semble être généralisé ou systémique ou s’il s’agit d’allégations sérieuses, comme des contacts sexuels importuns ou un comportement menaçant. L'objectif d'un processus de règlement informel est de répondre à des préoccupations individuelles spécifiques afin que les relations puissent être restaurées ou maintenues et que la partie principale puisse continuer à s'épanouir en toute sécurité au travail. Il ne s'agit pas d'un processus destiné à atténuer la nécessité de s'attaquer à des problèmes systémiques plus importants. 

Le cas échéant, le règlement informel peut donner l'occasion de résoudre un différend d'une manière mutuellement respectueuse, tout en évitant une escalade de la situation. Le règlement non officiel peut comporter une série d'options, comme une réunion entre la partie principale, la partie intimée et une personne occupant un poste de gestion ou de supervision. Il peut également s'agir d'une rencontre avec un tiers (comme une personne chargée de faciliter une réunion, une médiation ou une conciliation)9 qui aide les deux parties à parvenir à un règlement qui convient à chacun. Les deux parties doivent s'entendre sur l'utilisation d'un tiers et sur qui sera la personne précisément10.

Qui mène une enquête en milieu de travail?  

Choix d'une enquêtrice ou d'un enquêteur

C'est une bonne pratique pour un employeur de faire appel à l'expertise d'une personne impartiale pour mener l'enquête. La sélection de l'enquêtrice ou l'enquêteur doit se faire selon un processus de collaboration11. L'employeur, la partie principale et la partie intimée doivent tenter de s'entendre sur le choix d'une personne qualifiée pour mener l'enquête.  

Avant qu'il ne soit nécessaire de nommer une enquêtrice ou un enquêteur, les employeurs devraient envisager de travailler avec le « partenaire concerné12 » de l'organisation afin d'établir une liste de personnes qualifiées pour cette tâche à avoir sous la main, d'un commun accord13

En l'absence d'une liste établie, et s'il n'y a pas d'accord sur la nomination d'une enquêtrice ou d'un enquêteur dans les 60 jours suivant la date à laquelle l'avis d'enquête est donné, l'employeur doit nommer « une personne parmi celles que le Centre canadien d'hygiène et de sécurité au travail a désignées comme ayant les connaissances, la formation et l'expérience visées au paragraphe 28(1) » du Règlement14.

Qualités essentielles d'une bonne enquêtrice ou d'un bon enquêteur

Selon le Code, une enquêtrice ou un enquêteur en milieu de travail doit avoir les qualifications suivantes : 

  • formation et expérience en matière de techniques d'enquête (dans certaines circonstances, il sera important que l'enquêtrice ou l'enquêteur ait de l'expérience dans la conduite d'enquêtes tenant compte des traumatismes);
  • connaissances, formation et expérience en rapport avec les diverses formes de harcèlement et de violence en milieu de travail, y compris une compréhension des microagressions dans le contexte de l'emploi;
  • si nécessaire, connaissances, formation et expérience en matière d'égalité réelle, de racisme, de sexisme, de colonisation, de préjugés inconscients, de théorie du traumatisme, de violence sexiste et/ou de discrimination systémique; 
  • connaissance et expérience de l'application de la LCDP et d'autres principes et lois relatifs au harcèlement et à la violence en milieu de travail15

La personne choisie pour mener l'enquête doit également être impartiale et ne pas participer directement à l'affaire faisant l'objet de l'enquête. Cette personne doit être en mesure d'examiner les allégations avec un esprit ouvert. Par exemple, elle ne doit pas se rapporter à la partie principale ou à la partie intimée ni les superviser. 

L'enquêtrice ou l'enquêteur peut être externe à l'organisation, par exemple une avocate ou un avocat ou une personne spécialisée en gestion des ressources humaines qui est embauchée pour mener l'enquête. L'enquête peut aussi être menée par une travailleuse ou un travailleur interne, comme un membre du service des ressources humaines ou une avocate ou un avocat interne. Qu'il s'agisse de personnes provenant de l'extérieur ou de l'intérieur de l'organisation de l'employeur, toutes les enquêtrices et tous les enquêteurs doivent avoir les qualifications énoncées ci-dessus. 

Un certain nombre de facteurs peuvent aider à déterminer si on peut choisir une enquêtrice ou un enquêteur interne ou externe. Par exemple : 

  • Une personne faisant partie de l'effectif interne est-elle qualifiée pour mener l'enquête? 
  • La personne faisant partie de l'effectif interne est-elle suffisamment éloignée des incidents ou de l'unité de travail où les allégations ont eu lieu? Relève-t-elle de l'une des parties ou la supervise-t-elle? 
  • L'enquête porte-t-elle sur la conduite alléguée de membres de la haute direction? Si tel est le cas, il pourrait être nécessaire de faire appel à une personne externe pour mener l'enquête. 
  • Les allégations sont-elles complexes, sérieuses ou graves? Bien qu'il n'y ait aucune obligation légale de faire appel à une enquêtrice ou un enquêteur externe simplement parce que les circonstances sont complexes ou sérieuses, il pourrait être avisé de le faire. Une enquêtrice ou un enquêteur externe ayant de l'expérience pourrait être mieux outillé qu'une personne faisant partie de l'effectif interne pour mener à bien des enquêtes complexes. Son indépendance par rapport à l'organisation peut également renforcer la perception qu'ont les parties de l'équité et de l'objectivité de l'enquête.   

Comment mener une enquête en milieu de travail 

Fonctionnement

L'enquêtrice ou l'enquêteur commence par recueillir les renseignements pertinents au mandat de l'enquête. Cette personne doit notamment examiner les politiques du milieu de travail ainsi que toutes les plaintes écrites et leurs réponses.

Ensuite, l'enquêtrice ou l'enquêteur rencontre séparément les personnes concernées, y compris les deux parties et toute personne qui pourrait avoir été témoin de l’incident ou détenir des renseignements pertinents (un « témoin »). L'enquêtrice ou l'enquêteur peut également obtenir et examiner des documents ou d'autres renseignements qui sont pertinents pour les allégations ou l'intervention.

Le rôle de l'enquêtrice ou l'enquêteur est d'examiner ces renseignements et de déterminer : 

  • ce qui s'est passé; 
  • s'il s'agit de harcèlement ou de harcèlement sexuel au sens de la LCDP, du Code et/ou d'une politique du milieu de travail ou d'une convention collective applicable;
  • dans l'affirmative, les mesures correctives appropriées.

Les enquêtes ne sont pas toujours menées de la même manière et ne suivent pas toujours le même cours. Par exemple, certaines personnes commenceront leur enquête en rencontrant la partie principale, tandis que d'autres rencontreront d'abord la partie intimée. Il n'y a pas qu'une façon correcte de mener une enquête et l'approche de l'enquêtrice ou de l'enquêteur peut varier en fonction des types d'allégations, de la situation des parties et des renseignements disponibles.

Principes directeurs 

Il est important de noter que, quelle que soit la manière dont elle est menée, toute enquête doit être menée selon les principes suivants d'équité procédurale : 

Impartialité

L'enquêtrice ou l'enquêteur ne doit pas avoir un intérêt personnel dans le résultat de l'enquête. Cette personne doit tirer ses conclusions sur la base d'une évaluation impartiale des renseignements dont elle dispose. La personne qui mène une enquête doit non seulement être impartiale, mais aussi paraître impartiale. Les parties concernées ne doivent avoir aucun doute sur l'indépendance de l'enquêtrice ou de l'enquêteur. La perception de la partialité peut avoir un effet dissuasif sur la participation à une enquête si l'une des parties ou un témoin perçoit l'enquêtrice ou l'enquêteur comme représentant les intérêts de quelqu'un en particulier. 

Transparence

La transparence consiste à mener l'enquête de manière ouverte et visible. Cela signifie laisser les autres voir les mesures entreprises par l'enquêtrice ou l'enquêteur. Les deux parties doivent savoir qu'elles recevront tous les renseignements mis à la disposition de la personne chargée de l'enquête et qu'elles auront la possibilité d'y répondre.  

L'enquêtrice ou l'enquêteur doit partager les documents et communiquer les renseignements pertinents aux deux parties. Cette personne doit également donner aux parties l'occasion de proposer des témoins et de fournir des documents. Elle doit communiquer aux parties tout renseignement pertinent reçu de l'employeur, de l'autre partie ou des témoins. L'obligation de transparence de l'enquêtrice ou de l'enquêteur se poursuit tout au long du processus d'enquête. Par exemple, si (après avoir rencontré les parties) l'enquêtrice ou l'enquêteur reçoit un nouveau renseignement pertinent, il doit divulguer ce renseignement aux deux parties et leur donner la possibilité de répondre ou de faire des commentaires.

Respect des délais

Le temps est un facteur important dans une enquête. Les employeurs ont l'obligation de veiller à ce que le processus d'enquête se déroule rapidement et sans retard évitable.

Une enquêtrice ou un enquêteur doit également veiller à ce que son enquête soit menée dans les meilleurs délais possibles. Une enquête qui s'étire peut donner lieu à des tensions prolongées dans le milieu de travail et entraîner la perte de preuves et des souvenirs vagues. Bien entendu, le respect des délais dépendra des circonstances, notamment du nombre et de la disponibilité des témoins, de la complexité des questions et du nombre de questions factuelles contestées.

Il est également important de noter que les délais légaux peuvent varier. C'est pourquoi les employeurs doivent veiller à ce que les enquêtes respectent les délais fixés par la loi en vertu de laquelle elles sont menées.

Rigueur

Dans un processus d'enquête officiel, la rigueur n'a pas exactement la même signification que dans notre usage quotidien du terme. Si une enquête doit être approfondie, elle ne doit pas dépasser le mandat de l'enquête. Par exemple, la rigueur n'exige pas que l'enquêtrice ou l'enquêteur interroge un témoin si les renseignements suggèrent que la personne n'aurait aucune connaissance directe des questions relatives aux allégations. En d'autres termes, la rigueur n'exige pas qu'une enquêtrice ou un enquêteur étudie la question de fond en comble. Elle exige seulement que l'enquêtrice ou l'enquêteur examine des points qui pourraient couvrir des renseignements pertinents pour les allégations.   

L'enquête doit également être menée d'une manière conforme au Code, à son Règlement et à toute politique du milieu de travail ou disposition de la convention collective. 

Bonnes pratiques pour mener une enquête en milieu de travail

Bien qu'il n'y ait pas de formule particulière pour mener une enquête, il existe un certain nombre de bonnes pratiques recommandées dans le Code :  

1. Évaluation des allégations

Lorsqu'une allégation est présentée, l'employeur doit évaluer si elle contient suffisamment de renseignements ou de détails pour être considérée comme de la violence ou du harcèlement en milieu de travail, aux termes du Code et de la LCDP, ou des deux. Au minimum, la plainte doit fournir :

  1. une description du ou des incidents et, le cas échéant, si le traitement est lié à un motif de distinction illicite;
  2. le nom de la personne qui aurait commis l'acte de violence ou de harcèlement (soit la partie intimée);
  3. la date, l'heure et le lieu des incidents.

Un employeur n'est pas obligé d'enquêter sur de « simples allégations ». Une simple allégation est une allégation qui ne contient pas suffisamment de détails pour correspondre à la définition de la violence ou du harcèlement en milieu de travail (par exemple, mon superviseur me harcèle tous les jours au travail parce qu'il n'aime pas les personnes qui pratiquent ma religion). Toutefois, si une telle allégation est reçue, il est bon de demander à la travailleuse ou au travailleur des détails supplémentaires avant de déterminer si la plainte justifie une enquête plus approfondie. 

2. Mesures provisoires à envisager

Selon la nature des allégations et les personnes concernées, il peut être nécessaire pour l'employeur de prendre des mesures provisoires avant même de connaître le résultat de l'enquête. Par exemple, dans certaines circonstances, la partie principale et la partie intimée ne doivent pas être en contact l'une avec l'autre avant la fin de l'enquête. L'employeur peut également être amené à empêcher la partie intimée d'avoir des contacts avec d'autres personnes.    

Il est important que les mesures provisoires ne pénalisent pas une partie principale pour avoir soulevé des allégations. Par conséquent, lorsqu'il est approprié de séparer la partie principale et la partie intimée, il est de bonne pratique de ne pas modifier les conditions de travail de la partie principale à moins qu'elle en ait exprimé la préférence. Toutefois, les mesures provisoires ne sont pas destinées à pénaliser la partie intimée. Les mesures provisoires doivent être limitées à ce qui est absolument nécessaire pour garantir que les travailleuses et les travailleurs sont protégés des conditions dans lesquelles l'incident allégué a eu lieu. 

Parmi les autres exemples de mesures provisoires, citons le fait de placer la partie intimée en congé administratif rémunéré, de demander à la partie intimée de travailler à domicile ou de réaffecter la partie intimée à des tâches appropriées qui ne requièrent pas de contact avec la partie principale.  

3. Tentative d'obtenir les allégations par écrit

Il est important de noter que le Code n'exige pas que les allégations soient faites par écrit. Mais dans la mesure du possible, c'est une bonne pratique d'inviter la partie principale à préparer une plainte écrite. Une plainte écrite peut être utile, car elle établit clairement la nature des allégations, qui servent ensuite de base pour déterminer la portée de l'enquête et le mandat de la personne choisie pour mener cette enquête. Une plainte écrite peut ne pas être pratique dans tous les cas, par exemple, lorsqu'une partie principale est réticente à préparer un document écrit ou lorsque son niveau d'alphabétisation rend cela difficile. Mais comme nous l'avons déjà mentionné dans le présent guide, les allégations peuvent également être verbales et un employeur peut être tenu d'enquêter sur les plaintes formulées verbalement16

Lorsqu'une plainte écrite est reçue, le document doit être communiqué à la partie intimée avant que l'enquêtrice ou l'enquêteur la rencontre. La partie intimée doit avoir une possibilité raisonnable de répondre par écrit à la plainte écrite. Sa réponse écrite doit être communiquée à la partie principale avant que l'enquêtrice ou l'enquêteur la rencontre. La partie principale doit également avoir la possibilité de répondre une dernière fois au document écrit. Tout cela peut se faire par écrit ou verbalement lors d'un entretien. 

4. Élaboration d'un mandat clair 

Le mandat est généralement une entente entre l'employeur et la personne choisie pour mener l'enquête et qui définit la portée de l'enquête (également appelé mandat de l'enquête). Un mandat doit être créé pour les enquêtes internes et externes. Dans les deux cas, un mandat clair est essentiel pour que l'enquête reste ciblée et pour garantir l'équité procédurale. 

La Cour fédérale affirme la nécessité d'un mandat clair

Dans l'affaire Shoan c. Canada (procureur général), 2016 CF 1003 (CanLII), la Cour fédérale a conclu qu'une enquêtrice avait violé les principes d'équité procédurale en dépassant la portée de son mandat d'enquête, qui consistait à enquêter sur la correspondance par courriel et la conduite entre la partie principale et la partie intimée. La Cour a estimé que l'enquêtrice avait pris en compte et formulé des conclusions concernant le comportement de la partie intimée envers d'autres personnes lors de divers événements sociaux et professionnels, ce qui dépassait le cadre de son mandat. Cela a été considéré comme une violation de l'équité procédurale. En raison de ce manquement, la Cour a annulé le rapport de l'enquêtrice et les mesures correctives que l'employeur avait imposées à la partie intimée.

Lors de l'élaboration du mandat, il est important que les paramètres d'une enquête soient suffisamment larges pour répondre à la plainte ou aux préoccupations qui ont été soulevées. Toutefois, si l'allégation est trop large ou s'étend sur plusieurs années, cela pourrait nécessiter une enquête plus approfondie et soulever des questions d'équité procédurale (par exemple, la disponibilité des témoins et leur capacité à se souvenir des incidents).

La personne choisie pour mener l'enquête doit aborder toutes les allégations contenues dans le mandat, mais elle ne peut pas aborder des questions qui n'en font pas partie. Cela ne l'empêche toutefois pas de recevoir et de prendre en compte les renseignements qui fournissent un contexte pertinent aux allégations. À titre de bonne pratique, l'enquêtrice ou l'enquêteur qui a connaissance d'autres allégations doit contacter l'employeur et demander des directives pour savoir si le mandat sera modifié pour inclure ces nouvelles allégations.

En plus de définir la portée de l'enquête, le mandat doit comprendre les éléments suivants :

  • Les allégations ou questions précises faisant l'objet de l'enquête. Par exemple, une enquête peut avoir comme but d'examiner les allégations précises soulevées dans une plainte écrite déposée par une travailleuse ou un travailleur particulier à une date donnée.  
  • Une déclaration selon laquelle l'enquête respectera les lois, les accords et les politiques applicables, y compris (le cas échéant) la LCDP, le Code et le Règlement sur la prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail et la jurisprudence applicable. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit également se conformer à toute convention collective applicable.  
  • L'exigence que l'enquête soit menée de manière équitable et impartiale par une personne indépendante.
  • L'exigence que tous les renseignements obtenus au cours de l'enquête demeurent confidentiels dans la mesure du possible. 
  • Des exigences relatives à la conservation des documents. Bien que le rapport d'enquête soit partagé avec les parties, l'enquêtrice ou l'enquêteur conserve généralement ses notes ainsi que d'autres documents liés à l'enquête. Dans des circonstances très limitées, certains de ces documents peuvent être considérés comme privilégiés (par exemple, les conseils juridiques échangés entre la cliente ou le client et son avocat). Dans la plupart des cas, cependant, une cour, un tribunal ou un arbitre exigera qu'ils soient produits (ou partagés) dans le cadre de la procédure d'adjudication.  
  • Le coût de l'enquête et les modalités de son paiement, dans les cas où une personne externe est choisie pour enquêter.

En tant que bonne pratique, le mandat doit être communiqué aux deux parties, bien que le coût de l'enquêtrice ou de l'enquêteur externe ne doive pas nécessairement l'être. 

5. Avis et soutien destinés aux parties 

L'employeur doit informer la partie principale et la partie intimée qu'une enquête est ouverte17. Participer à une enquête est une expérience stressante, et les employeurs doivent en tenir compte dans leurs communications avec les parties. Les employeurs sont tenus de soutenir les travailleuses et les travailleurs qui subissent du harcèlement, du harcèlement sexuel et de la violence en milieu de travail18. La partie principale et la partie intimée doivent recevoir autant de renseignements que possible sur le processus d'enquête et, à titre de bonne pratique, il convient de leur rappeler les ressources disponibles pour les aider, y compris les programmes d'aide aux employés, le cas échéant. Les parties doivent également être rassurées sur le fait que l'enquête est un processus confidentiel et qu'elles ont le droit d'être représentées tout au long de l'enquête. 

6. Permission de représentation 

La partie principale et la partie intimée ont le droit d'être accompagnées ou représentées à tout moment du processus d'enquête19. Lorsqu'une partie est membre d'un syndicat, elle peut choisir d'être représentée par son syndicat. 

Les enquêtrices et les enquêteurs doivent informer les parties de leur droit à être représentées. Si une partie souhaite être représentée, l'enquêtrice ou l'enquêteur ne doit pas l'interroger sans la présence d'une personne mandatée pour la représenter, sinon, cela peut remettre en question le processus d'enquête et les conclusions ou recommandations qui en découlent. 

Dans certains cas, une partie peut souhaiter être accompagnée par une personne qui lui apportera un soutien moral plutôt qu'une représentation active. C'est une bonne pratique de permettre aux témoins d'être accompagnés d'une personne de confiance pour les soutenir pendant les entretiens avec l'enquêtrice ou l'enquêteur. Cela peut atténuer une partie du stress et de l'inconfort inhérents aux entretiens d'enquête, et avoir un effet positif sur le processus. Autre bonne pratique, l'enquêteur doit informer les parties de leur droit d'être accompagnées d'une personne de confiance pendant le processus d'enquête.

7. Garantie d'indépendance de la personne chargée de l'enquête 

Comme il a été indiqué précédemment, l'enquête doit être menée de manière totalement indépendante. Cela signifie qu'il ne reçoit aucune instruction de l'employeur ou des parties concernant la manière dont l'enquête est menée (qui interroger, quels documents examiner, dans quel ordre le faire) ou les conclusions à tirer. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit recueillir les renseignements qui lui semblent nécessaires et doit ensuite déterminer les enjeux en fonction de sa propre évaluation de ces renseignements.  

8. Renseignements pertinents à fournir à la personne chargée de l'enquête 

Les employeurs doivent fournir à l'enquêtrice ou à l'enquêteur une copie de toute politique du milieu de travail et de la convention collective applicable, ainsi que de toute plainte et réponse écrite. L'employeur doit indiquer que toute autre information pertinente sera fournie sur demande de l'enquêtrice ou de l'enquêteur.

Le Code exige que l'employeur fournisse à l'enquêtrice ou à l'enquêteur « tous les renseignements pertinents à l'enquête20 ».

9. Garantie de transparence, d'impartialité et de la possibilité de répondre 

Comme il a été mentionné dans les principes directeurs, l'équité procédurale exige que l'enquêtrice ou l'enquêteur partage ouvertement tous les documents et renseignements pertinents avec les deux parties. Cette personne doit également donner aux parties la possibilité de proposer des témoins et de fournir des documents. Elle doit partager avec les parties tout renseignement ou tout document pertinent reçu de l'employeur, de l'autre partie ou des témoins. 

L'enquêtrice ou l'enquêteur a l'obligation de partager les renseignements pertinents tout au long du processus d'enquête. Par exemple, si de nouveaux renseignements pertinents lui sont transmis après avoir rencontré les parties, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit les transmettre aux deux parties et leur donner la possibilité de répondre ou de faire des commentaires. Cela peut se faire de différentes manières. Par exemple, l'enquêtrice ou l'enquêteur peut :

  • mener un entretien de suivi avec une partie ou les deux pour discuter des renseignements nouveaux ou supplémentaires;
  • communiquer des renseignements ou partager des documents avec chacune des parties par écrit et les inviter à fournir des commentaires écrits;
  • préparer un rapport préliminaire, qui résume les conclusions de l'enquêteur. Les parties pourraient avoir l'occasion de fournir des commentaires écrits avant que le document ne soit finalisé et partagé avec l'employeur. 

Cette liste n'est pas exhaustive. Les enquêtrices et les enquêteurs peuvent prendre ces mesures ou en prendre d'autres pour garantir la transparence et l'impartialité. 

10. Utilisation d'entretiens d'enquête 

L'objectif d'un entretien d'enquête est de recueillir des renseignements sur l'allégation, la nature de l'incident, la réponse et les circonstances dans lesquelles tout cela a eu lieu. L'entretien peut également donner aux parties l'occasion de comprendre les renseignements pertinents que l'enquêtrice ou l'enquêteur a reçus et y répondre. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit communiquer avec les parties et les témoins avant l'entretien pour expliquer le processus et la portée de l'enquête, son propre rôle et l'obligation des participants de préserver la confidentialité. Avant de les rencontrer, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit également transmettre aux parties tous les documents pertinents en sa possession.

Comme il a été indiqué précédemment, la personne chargée de l'enquête doit être impartiale, notamment pendant les entretiens d'enquête. Elle ne doit pas faire de commentaires ou poser des questions d'une manière qui suggère qu'elle a déjà tiré une conclusion sur ce qui s'est passé21.

Personnes à interroger

Le choix des personnes à interroger est important. La personne chargée de l'enquête doit être rigoureuse, mais elle doit également s'en tenir à son mandat et éviter de laisser l'enquête se prolonger plus longtemps que nécessaire (par exemple, interroger des témoins qui ne semblent pas avoir de renseignements nouveaux ou pertinents à apporter).

L'enquêtrice ou l'enquêteur doit interroger les deux parties. Il lui est aussi possible d'interroger d'autres témoins. En général, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit choisir des témoins qui ont des renseignements de première main (quelque chose qu'ils ont eux-mêmes vu ou entendu) qui sont pertinents pour l'allégation. Les témoins sont souvent des observateurs objectifs et les renseignements qu'ils fournissent peuvent être très utiles à l'enquête, notamment lorsqu'il existe un différend factuel entre les parties. 

En choisissant les témoins à interroger, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit tenir compte du degré d'objectivité du témoin. Un témoin qui n'a pas de lien personnel ou hiérarchique avec les parties peut être préféré à quelqu'un qui est un ami ou un subordonné de l'une ou des deux parties. 

Dans le cadre de son rôle, l'enquêtrice ou l'enquêteur identifiera généralement certains témoins, tout en donnant aux parties la possibilité de proposer leurs propres témoins. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit demander aux parties d'expliquer pourquoi elles pensent que la personne en question possède des renseignements pertinents pour l'enquête. Cependant, c'est l'enquêtrice ou l'enquêteur qui décide en dernier ressort des personnes à interroger, mais en prenant soin d'informer les parties que les témoins qu'elles proposent peuvent ou non être interrogés.

Ordre dans lequel les entretiens sont menés 

L'ordre dans lequel les entretiens sont menés peut varier. Quel que soit l'ordre dans lequel les entretiens sont menés, les parties doivent avoir la possibilité de connaître les renseignements pertinents et d'y répondre. Dans certaines circonstances, il peut être approprié que l'enquêtrice ou l'enquêteur rencontre les parties plus d'une fois.

11. Utilisation d'une approche fondée sur les droits de la personne lors des entretiens

L'enquêtrice ou l'enquêteur doit s'assurer que les entretiens d'enquête sont menés dans un lieu privé, pratique et neutre. Il est souvent utile d'organiser les entretiens en dehors du lieu de travail, à moins qu'il n'existe un endroit calme et privé sur le lieu de travail qui soit acceptable pour tous les participants. Dans la mesure du possible, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit planifier les entretiens à un moment et d'une manière qui ne perturbe pas le milieu de travail ou les personnes qui y participent.

Il est important que l'enquêtrice ou l'enquêteur tienne compte des besoins des personnes participantes en matière de droits de la personne et veille à ce que l'entretien se déroule dans un lieu qui leur soit accessible. Par exemple, si une partie ou un témoin est en congé d'invalidité, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit s'assurer que cette personne est en mesure, sur le plan médical, de participer à l'enquête avant de l'interroger. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit veiller à ce que des services d'interprétation ou d'autres lieux accessibles soient mis à disposition si nécessaire. L'employeur assume généralement le coût raisonnable de la prestation de ces services.

Si des entretiens consécutifs sont planifiés, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit éviter une situation où les parties ou les témoins se rencontreront. C'est important pour le respect de la vie privée et la confidentialité, mais aussi parce que ces rencontres peuvent être indésirables ou inconfortables.

L'enquêtrice ou l'enquêteur doit prendre des notes pendant les entretiens. Selon son propre style ou la nature de l'incident, une enquêtrice ou un enquêteur pourrait demander à chaque personne participante de revoir ses notes, d'y apporter des corrections et de les signer pour confirmer être en accord avec les renseignements. Bien que l'enquêtrice ou l'enquêteur n'ait pas l'obligation légale de partager les notes d'entretien avec les parties, celles-ci doivent avoir la possibilité de répondre aux renseignements pertinents obtenus tout au long du processus (voir la bonne pratique n° 8 ci-dessus).

Certaines personnes pourraient aussi vouloir enregistrer l'entretien, que ce soit la personne chargée de l'enquête ou une personne participante, ou les deux. Les personnes participantes doivent avoir la possibilité d'exprimer leur accord ou leur désaccord à ce sujet avant l'entretien. Tout enregistrement de l'entretien est confidentiel et est couvert par l'accord de confidentialité que chaque personne a signé (voir ci-dessous). Comme bonne pratique, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit demander à la personne participante de lui fournir une copie de l'enregistrement ainsi que toute transcription de l'enregistrement.

12. Assurance de confidentialité

Accords de confidentialité

L'enquête doit être menée de manière aussi confidentielle que possible. Toutes les personnes participant à l'enquête ont des droits et des obligations en matière de confidentialité. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit inciter les parties, les témoins et les personnes qui les représentent ou les personnes de confiance à signer un accord de confidentialité. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit également informer les personnes participantes de leurs obligations en matière de confidentialité. L'enquêtrice ou l'enquêteur doit également fournir une copie de l'accord de confidentialité avant de rencontrer les participants ou de leur transmettre des documents ou des renseignements.

Le but de l'accord de confidentialité est de : a) garantir le respect de la vie privée des personnes participantes pendant le déroulement de l'enquête (et avant tout résultat); b) protéger l'intégrité des renseignements et veiller à ce que les personnes participantes ne comparent pas les renseignements avant de fournir des preuves à la personne chargée de l'enquête. Les accords de confidentialité doivent être formulés avec soin et leur portée doit être limitée à ce qui est strictement nécessaire pour atteindre ces deux objectifs. 

Les accords de confidentialité doivent :

  • être limités à la durée de l'enquête. Ils ne doivent pas empêcher les personnes participantes de faire des déclarations une fois l'enquête terminée; 
  • ne pas empêcher les personnes de chercher à obtenir des conseils, un traitement ou un soutien pendant ou après l'enquête;
  • ne pas empêcher les parties principales ou les témoins de communiquer des renseignements nécessaires pour protéger les autres contre le harcèlement, le harcèlement sexuel et la violence; 
  • ne pas empêcher les parties principales ou les témoins de signaler des cas de harcèlement ou de violence passés, présents ou futurs;
  • ne pas empêcher la divulgation de renseignements nécessaires à l'avancement de toute autre procédure judiciaire (civile, pénale, administrative) découlant des mêmes circonstances; 
  • ne pas entraver la capacité des employeurs à repérer et à traiter efficacement les problèmes systémiques ou les schémas de comportement, notamment le harcèlement ou la violence répétés ou continus de la part d'une ou plusieurs parties intimées. 

Dans ce contexte, les accords de confidentialité sont généralement différents de ce que l'on appelle généralement les « accords de non-divulgation » ou AND.  Un AND fait généralement référence à une disposition d'un accord de règlement entre une partie principale et une partie intimée visée par une allégation. 

Accords de non-divulgation

L'utilisation des AND pour régler les plaintes de harcèlement a été fortement critiquée. Les AND n'ont souvent pas de date de fin et leur but est généralement de garder secrètes les modalités et l'existence d'un accord de règlement. Selon leur formulation, les AND peuvent limiter la capacité de la partie principale à discuter avec quiconque de ses allégations, des renseignements liés à ces allégations, du contenu de l'accord de règlement et du fait qu'un règlement a été conclu. S'ils sont mis en œuvre sans que leur impact négatif potentiel ne soit examiné, les AND peuvent contribuer à dissimuler des incidents de harcèlement répété, de harcèlement sexuel ou de violence. Ils peuvent également empêcher les organisations de s'attaquer adéquatement aux problèmes systémiques ou répétés. Certains AND tentent même de limiter la capacité d'une personne à accéder à un traitement, à des conseils ou à d'autres services de soutien. Les AND sont fortement déconseillés, sauf si la partie principale a accès à une représentation juridique ou à une défense adéquate, ou les deux. 

Témoins et confidentialité

Comme le stipule le Règlement du Code, l'identité des témoins ne doit pas être divulguée directement ou indirectement dans le rapport de l'enquêteur. Il est également important que l'enquêteur ne divulgue pas les noms des témoins tout au long de l'enquête en général, au mieux de ses capacités22. Participer à une enquête peut être stressant pour les témoins et les placer dans une position vulnérable. Protéger l'identité des témoins est un bon moyen de rassurer ceux qui pourraient être réticents à se manifester ou qui pourraient craindre des représailles.  

Aucune des parties n'est légalement autorisée à connaître l'identité des témoins ni à avoir accès aux notes d'entretien de l'enquêteur avec les témoins23. Cependant, les parties ont le droit de connaître le fond des renseignements pertinents reçus lors des entretiens avec les témoins et d'y répondre.  

13. Assurance d'une enquête dans les délais

En vertu de la LCDP, les employeurs sont tenus de prévenir et de faire cesser le harcèlement et la violence en milieu de travail. Il s'agit notamment de répondre aux allégations de harcèlement et de violence de manière efficace et dans les délais. Compte tenu de ces obligations, les employeurs ont un rôle important à jouer pour veiller à ce que le processus d'enquête se déroule rapidement et sans retard évitable.

Les enquêtrices et les enquêteurs doivent également veiller à ce que l'enquête soit menée dans les meilleurs délais possibles. Une enquête qui s'étire peut donner lieu à des tensions prolongées dans le milieu de travail et entraîner la perte de preuves et des souvenirs vagues. Bien entendu, le respect des délais dépendra des circonstances, notamment du nombre et de la disponibilité des témoins, de la complexité des questions et du nombre de questions factuelles contestées. 

Le Règlement du Code prévoit un délai d'un an pour la conclusion de l'enquête, y compris la mise en œuvre par l'employeur des recommandations formulées dans les rapports de l'enquêteur. Le délai d'un an commence le jour où l'employeur est informé de l'événement24. Lorsqu'une convention collective ou une politique du milieu de travail prévoit des délais pour les enquêtes, ceux-ci doivent être respectés dans la mesure où ils ne dépassent pas les délais prévus par le Règlement. Il est toutefois important de noter que ces délais doivent servir d'exigences minimales. Les enquêtrices et les enquêteurs doivent s'efforcer de terminer les enquêtes rapidement et bien avant la limite d'un an prévue par le Règlement. 

14. Mises à jour régulières

Tout au long du processus d'enquête, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit fournir des mises à jour régulières aux parties et à l'employeur. Ces mises à jour doivent inclure des renseignements sur l'avancement de l'enquête, y compris les prochaines étapes et (si possible) les délais prévus. Le Règlement exige également que l'employeur fournisse des mises à jour mensuelles sur le statut d'une plainte à la partie principale et à la partie intimée25. Si une enquête est en cours, l'employeur peut collaborer avec l'enquêtrice ou l'enquêteur pour rassembler les renseignements en vue de ces mises à jour. 

L'employeur n'a plus l'obligation de fournir des mises à jour mensuelles une fois que l'enquêtrice ou l'enquêteur lui a remis le rapport final et le rapport de synthèse (voir ci-dessous) et que l'employeur a mis en œuvre les recommandations adoptées en coopération avec le partenaire concerné26

15. Rapport d'enquête final à remettre

Une fois que la personne chargée de l'enquête a rassemblé les preuves, elle doit rédiger un rapport final et le remettre à l'employeur, à la partie principale et à la partie intimée. 

Le rapport final doit comprendre une description détaillée de l'incident, les conclusions de l'enquêtrice ou de l'enquêteur et des recommandations pour éliminer ou minimiser le risque que des incidents similaires se reproduisent. Ce rapport ne doit pas identifier, directement ou indirectement, les témoins ou les tierces parties27.

En préparant son rapport d'enquête, l'enquêtrice ou l'enquêteur doit :

  • répondre à toutes les allégations de la partie principale;
  • ne formuler des conclusions que sur les questions qui relèvent du mandat d'enquête;
  • expliquer clairement les raisons de ces conclusions; 
  • expliquer pourquoi la version d'une partie est préférée à celle d'une autre lorsqu'il existe différentes versions des faits pertinents; 
  • tenir compte des éléments suivants lors de l'évaluation de la crédibilité et de la fiabilité des preuves : 
    • la crédibilité de la version des faits d'un témoin ou d'une partie,
    • la cohérence des renseignements fournis par les parties,
    • toute incohérence entre les récits des témoins et les preuves documentaires,
    • la manière dont le témoin ou la partie fournit des renseignements,
    • la relation d'un témoin avec les parties; 
  • expliquer pourquoi certains témoins proposés par l'une des parties n'ont pas été interrogés. Ces situations peuvent inclure : 
    • le témoin ne semblait pas avoir une connaissance directe des questions en litige, 
    • le témoin n'a pas répondu à l'invitation de l'enquêteur à le rencontrer;
  • décrire tout problème en matière de procédure ou toute objection concernant le processus d'enquête, et expliquer comment ils ont été traités. Par exemple, si une partie affirme qu'elle n'a pas eu l'occasion de répondre à certains renseignements, le rapport doit décrire quels renseignements ont été fournis et pourquoi l'enquêtrice ou l'enquêteur estime qu'ils étaient suffisants.

En formulant des recommandations visant à éliminer ou à minimiser le risque qu'un incident similaire se reproduise, une enquêtrice ou un enquêteur doit avoir conscience des limites de son rôle et des renseignements à sa disposition. Par exemple, une enquêtrice ou un enquêteur doit s'abstenir de recommander des mesures disciplinaires spécifiques, en particulier si les antécédents disciplinaires complets d'une partie lui sont inconnus. Il est plus utile pour l'enquêtrice ou l'enquêteur de faire des recommandations générales qui peuvent être appliquées par l'employeur en fonction du contexte et des conditions d'emploi spécifiques.

Après l'enquête

Mesures pour faire cesser le harcèlement en milieu de travail

En vertu du Règlement, l'employeur et le « partenaire concerné » doivent déterminer conjointement quelles recommandations doivent être mises en œuvre parmi celles qui sont formulées dans le rapport d'enquête28. L'employeur est responsable de la mise en œuvre de ces recommandations29

En outre, conformément à l'article 65 de la LCDP, tout harcèlement ou acte discriminatoire commis par une travailleuse ou un travailleur est considéré comme un acte commis par l'employeur, à moins que ce dernier ne puisse démontrer qu'il a « pris toutes les mesures nécessaires pour empêcher l'acte » et pris des mesures pour en annuler les effets et remédier à tout préjudice qui en résulte30.

Tenue et examen des dossiers

En vertu du Règlement, l'employeur est tenu de conserver un dossier sur chaque plainte de harcèlement ou de violence en milieu de travail et sur la façon dont il a répondu à cette plainte, ainsi qu'une copie du rapport d'enquête pendant une période de dix ans31.

Ces dossiers fournissent des renseignements précieux sur la violence et le harcèlement perçus en milieu de travail. Les employeurs doivent examiner régulièrement ces dossiers afin de repérer des tendances, comme des plaintes répétées ou multiples de harcèlement dans certains services ou des plaintes concernant des personnes spécifiques. La surveillance de ces dossiers et la prise de mesures appropriées pour régler les problèmes sous-jacents font partie de l'obligation de l'employeur de prévenir le harcèlement en milieu de travail et peuvent limiter sa responsabilité en cas d'incidents en milieu de travail, conformément au paragraphe 65(2) de la LCDP.

Les employeurs doivent aussi connaître leur obligation en vertu du Code de compiler des renseignements sur les plaintes de harcèlement et de fournir ces documents chaque année dans un rapport au ministre du Travail ou au chef désigné de la conformité et de l'application32.

Comme bonne pratique, les enquêtrices et les enquêteurs doivent également conserver leurs dossiers d'enquête, comme les notes, les transcriptions et autres documents, pendant une période de dix ans33.

Annexe A : Schéma de traitement des allégations de harcèlement, de harcèlement sexuel ou de violence 

Version texte

Le graphique est un organigramme sur le processus de traitement d'une allégation de harcèlement, de harcèlement sexuel et (ou) de violence. La première étape décrite dans une zone de texte dit : L'employeur reçoit une plainte de harcèlement ou de violence ou a des raisons de soupçonner qu'il y a eu violence ou harcèlement. 

Il y a une autre boîte de texte à droite, reliée à la première boîte par une ligne pointillée. C'est écrit :  L'employeur doit confirmer la réception de la plainte dans les 7 jours et fournir aux deux parties des mises à jour mensuelles sur le statut de la plainte.

Sous la première étape se trouve une flèche pointant vers l'étape suivante, qui est décrite dans une zone de texte qui dit : Déterminer si une enquête peut être nécessaire —Les allégations, si elles sont prouvées, pourraient-elles constituer du harcèlement ou de la violence en vertu du Code canadien du travail ou de la Loi canadienne sur les droits de la personne? 

Deux flèches partent de cette case vers « Non » ou « Oui ». Une flèche pointe vers le bas de la case « Non » vers une autre case de texte qui dit :  Une enquête sur le harcèlement n'est pas requise par la législation.

Une flèche pointe vers le bas à partir de la case « Oui » vers une autre case de texte qui dit : La plainte peut-elle être résolue de manière informelle ou par conciliation?

Deux flèches partent de cette case vers « Non » ou « Oui ».  

Une flèche pointe vers le bas à partir de la case « Oui » vers une autre case de texte qui dit : La résolution informelle ou la conciliation ont-elles permis de régler la plainte?  

Si la réponse est oui, il y a une flèche vers le bas vers une zone de texte qui dit : Mettre en œuvre les modalités du règlement. Généralement, l'enquête n'est pas nécessaire.

Si la réponse est non, une flèche pointe vers une zone de texte qui dit : Procéder à l'enquête (voir les bonnes pratiques pour obtenir plus de détails).

Si la plainte ne peut être réglée de manière informelle, une flèche pointe vers le bas, de la case « Non » à la case de texte qui dit : Procéder à l'enquête (voir les bonnes pratiques pour obtenir plus de détails). À partir de cette boîte, des flèches pointent vers quatre zones de texte distinctes.  La première case dit : L'employeur informe les deux parties qu'une enquête aura lieu.  La deuxième case dit : L'employeur met en œuvre des mesures provisoires si nécessaire (p. ex., la séparation des parties).  La troisième case dit : L'enquêteur est choisi — les parties et l'employeur ont 60 jours pour convenir d'un enquêteur (voir les qualifications de l'enquêteur mentionnées ci-dessus).  Il y a une flèche de la troisième case vers une autre case de texte qui dit : Si aucun accord n'est conclu dans les 60 jours, l'employeur demande au ministre du Travail de nommer un enquêteur. La quatrième case dit : Des modalités sont établies, définissant la portée du mandat de l'enquête.

À partir de la zone de texte qui dit « Procéder à l'enquête », il y a aussi une flèche qui pointe vers le bas vers une zone de texte qui dit : L'enquêteur mène une enquête équitable, impartiale et opportune — il détermine ce qui s'est passé, s'il s'agit de harcèlement, de harcèlement sexuel ou de violence en milieu de travail, et recommande la manière de régler la plainte.

Sous cette zone de texte, une flèche pointe vers le bas vers une zone de texte qui dit : L'enquêteur rédige un rapport — les rapports comprennent des recommandations pour prévenir des incidents similaires de harcèlement. À partir de cette zone de texte, une flèche pointe vers la droite vers une zone de texte qui dit : Rapport final fourni à l'employeur, à la partie intimée et à la partie principale.  

À partir de la zone de texte qui dit « L'enquêteur rédige un rapport », une autre flèche pointe vers le bas vers une zone de texte qui dit : Après l'enquête — l'employeur prend les mesures appropriées pour donner suite aux conclusions de harcèlement, y compris des mesures disciplinaires si nécessaire. L'employeur est responsable de la mise en œuvre des recommandations de l'enquêteur.

Une ligne pointillée relie cette dernière zone de texte à une zone de texte à gauche qui dit : L'enquête doit être terminée, y compris la mise en œuvre des recommandations de l'enquêteur, dans un délai d'un an à compter de la date de réception de la plainte.